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26/04/2012 | FRANCE | N°11PA02381

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 26 avril 2012, 11PA02381


Vu la requête, enregistrée le 20 mai 2011, présentée pour M. Christian A, retenu au ..., par Me Ekani ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102967 du 21 avril 2011 par lequel le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 16 avril 2011 portant reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrativ

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Vu la requête, enregistrée le 20 mai 2011, présentée pour M. Christian A, retenu au ..., par Me Ekani ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102967 du 21 avril 2011 par lequel le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 16 avril 2011 portant reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2012 :

- le rapport de Mme Versol ;

Considérant que, par une décision du 16 avril 2011, notifiée le même jour, le préfet de police a ordonné la reconduite à la frontière de M. A, ressortissant congolais ; que le requérant relève appel du jugement du 21 avril 2011 par lequel le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (...) 3° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire prise depuis au moins un an (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a fait l'objet, le 16 octobre 2008, d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, notifiée le 23 octobre suivant ; que l'obligation de quitter le territoire français étant exécutoire depuis au moins un an à la date à laquelle le préfet de Seine-et-Marne a décidé qu'il serait reconduit à la frontière, l'intéressé entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en premier lieu, que M. A ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions d'annulation, l'irrégularité de la notification de l'arrêté contesté portant reconduite à la frontière, au motif allégué du défaut de mention des nom et qualité de l'agent qui a notifié la décision contestée ainsi que du défaut de mention, au titre des voies de recours, des numéros de téléphone et de télécopie du Tribunal administratif de Melun ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. (...) / 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; qu'aux termes de l'article 8 de la même directive : " 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2. Si un État membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe 4, apparaisse. / 3. Les États membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement " ; qu'enfin, aux termes de l'article 12 de la même directive : " Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles. Les informations relatives aux motifs de fait peuvent être limitées lorsque le droit national permet de restreindre le droit à l'information, en particulier pour sauvegarder la sécurité nationale, la défense et la sécurité publique, ou à des fins de prévention et de détection des infractions pénales et d'enquêtes et de poursuites en la matière (...) " ;

Considérant que M. A a fait l'objet, le 16 octobre 2008, d'une décision de refus de séjour, assortie d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'il n'est pas contesté que cette décision qui comportait un délai de retour d'un mois à compter de sa notification à l'intéressé ainsi que les voies et délais de recours a été régulièrement notifiée le 23 octobre 2008 ; que l'obligation de retour faite à M. A par cette décision n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7 de la directive susvisée ; qu'ainsi, en application des dispositions précitées de l'article 8 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée, le préfet de Seine-et-Marne n'était pas tenu d'accorder un nouveau délai de départ volontaire à M. A ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, d'une part, que l'arrêté contesté portant reconduite à la frontière et la décision portant obligation de quitter le territoire français sont des décisions dont les régimes juridiques sont distincts, d'autre part, que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été exécutée et serait pour ce motif devenue caduque ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions des articles 7 et 12 de la directive n° 2008/115/CE susvisée, le moyen tiré de la méconnaissance de ladite directive doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que si M. A fait valoir qu'entré en France en avril 2007, il a sollicité le bénéfice de l'asile, se maintient sur le territoire depuis quatre ans et vit en concubinage avec une compatriote, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé ne justifie de sa relation maritale avec Mme B qu'à compter de juin 2010 et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Congo où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans et où résident sa mère ainsi que ses deux enfants nés en 1990 et 1996 ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. " ; que le moyen tiré de la violation de ces stipulations est inopérant à l'encontre de la décision de reconduite à la frontière qui ne fixe pas, par elle-même, le pays vers lequel elle sera exécutée ;

Considérant, en cinquième lieu, que si le requérant soutient que le préfet de Seine-et-Marne a méconnu les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment celles de l'article L. 313-11, il n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces au dossier que le préfet de Seine-et-Marne a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de M. A ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées, l'Etat n'étant pas la partie perdante ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 11PA02381


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA02381
Date de la décision : 26/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-02 Étrangers. Reconduite à la frontière. Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : EKANI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-04-26;11pa02381 ?
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