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27/04/2012 | FRANCE | N°11PA01824

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 27 avril 2012, 11PA01824


Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2011, présentée pour M. Samy A, demeurant chez M. et Mme B ..., par Me Fournier-Labat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104794/8 en date du 17 mars 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 12 mars 2011 décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivr

er une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
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Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2011, présentée pour M. Samy A, demeurant chez M. et Mme B ..., par Me Fournier-Labat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104794/8 en date du 17 mars 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 12 mars 2011 décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir au cours de l'audience publique du 13 avril 2012, présenté son rapport et entendu :

- le rapport de M. Ladreit de Lacharrière, rapporteur,

- et les observations de Me Fournier-Labat pour M. A ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive n°2008/115/CE du

16 décembre 2008 susvisée relatif au " départ volontaire " : " 1.La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2.Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / 3.Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire. / 4.S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; que le 7) de l'article 3 de la même directive définit ce " risque de fuite " comme " le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite " ; qu'aux termes de l'article 8 de la même directive, intitulé " éloignement " : " 1.Les Etats membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2.Si un Etat membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe4, apparaisse. / 3.Les Etats membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) " ; que le délai imparti aux Etats membres pour transposer cette directive expirait, en vertu du paragraphe 1 de son article 20, le

24 décembre 2010 ;

Considérant que les articles 7 et 8 de la directive cités ci-dessus énoncent des obligations en termes non équivoques, qui ne sont assorties d'aucune condition et ne sont subordonnées dans leur exécution ou dans leurs effets à aucun acte des institutions de l'Union européenne ou des Etats membres ;

Considérant que les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction alors en vigueur, en ce qu'elles n'imposent pas qu'une mesure de reconduite à la frontière soit assortie d'un délai approprié pour le départ volontaire d'un ressortissant de pays tiers dans des cas autres que ceux prévus à l'article 7, paragraphe 4, de la directive, sont incompatibles avec les objectifs de ces articles 7 et 8 ; que les dispositions de cette directive ne font toutefois pas obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise à l'encontre d'un ressortissant de pays tiers dans les cas prévus aux 1°, 2° et 4° du II de l'article L. 511-1, dès lors que cette mesure est assortie d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ;

Considérant que la décision contestée du 12 mars 2011 décidant la reconduite à la frontière de M. A, de nationalité algérienne, a été prise sur le fondement des dispositions alors en vigueur du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas assortie d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ; que, par suite, M. A est fondé à soutenir qu'elle méconnaît les dispositions précitées de la directive n°2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ; que cette décision doit dès lors être annulée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 2011 décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L.512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. ";

Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de délivrer à

M. A une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du 17 mars 2011 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police en date du 12 mars 2011 décidant la reconduite à la frontière de M. A sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N°11PA01824 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA01824
Date de la décision : 27/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Pierre LADREIT DE LACHARRIERE
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : FOURNIER-LABAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-04-27;11pa01824 ?
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