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19/06/2012 | FRANCE | N°11PA03620

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 19 juin 2012, 11PA03620


Vu la requête, enregistrée 4 août 2011, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1102579/3-3 en date du 28 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 janvier 2011 refusant de délivrer à M. Samir A un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel l'intéressé est susceptible d'être reconduit, et lui a enjoint de délivrer à M. A un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;
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Vu la requête, enregistrée 4 août 2011, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1102579/3-3 en date du 28 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 janvier 2011 refusant de délivrer à M. Samir A un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel l'intéressé est susceptible d'être reconduit, et lui a enjoint de délivrer à M. A un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

2°) de rejeter la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2012 :

- le rapport de M. Piot, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- les observations de Me Chevalier, pour M. A ,

- et connaissance prise de la note en délibéré en date du 25 mai 2012, présentée pour M. A, par Me Chevalier ;

Considérant que M. A, de nationalité algérienne, entré en France le 17 décembre 2002 sous couvert d'un visa Schengen de type C, a présenté une première demande de certificat de résidence en 2007 qui a été rejetée par le préfet des Hauts-de-Seine ; qu'il a présenté une seconde demande de certificat de résidence sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 14 janvier 2011, le PREFET DE POLICE a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays de destination de sa reconduite ; que le PREFET DE POLICE fait appel du jugement en date du 28 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé ce dernier arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant pour annuler l'arrêté attaqué, le tribunal administratif a estimé que M. A, qui a, le 2 octobre 2009, déposé plainte contre son ancien avocat dans une affaire en cours d'instruction impliquant des manoeuvres frauduleuses alléguées relatives à la délivrance de récépissés de titre de séjour, établissait ainsi la nécessité de sa présence en France pour le suivi et le bon déroulement de son procès ; que toutefois, compte tenu de la possibilité de se faire représenter par un avocat, ou même de solliciter un visa afin de venir plaider sa cause devant cette juridiction, M. A ne justifie nullement de la nécessité de sa présence en France ; que l'arrêté en litige n'était ainsi entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation dans ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé, pour ce motif, son arrêté du 14 janvier 2011 ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Paris et devant elle-même ;

Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient M. A, l'arrêté en litige comporte l'exposé des motifs de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il ressort des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE s'est livré à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de l'intéressé ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des stipulations combinées des articles 7 b°) et 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé, les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions renouvelable et portant la mention " salarié ", sous réserve de détenir un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est même pas allégué par M. A qu'il ait été en possession d'un visa de long séjour ni d'une autorisation de travail lorsqu'il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement du b° de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé ; que, dès lors, le PREFET DE POLICE a pu légalement, pour ce motif, refuser de lui délivrer le titre de séjour sollicité et n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus de l'autoriser porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus " ;

Considérant que M. A fait valoir qu'il est entré sur le territoire français en décembre 2002, qu'il y vit de manière habituelle depuis près de 8 ans, qu'une partie de sa famille, dont des oncles et tantes et des cousins, certains de nationalité française, y séjournent régulièrement, qu'il y est intégré et qu'il dispose d'une promesse d'embauche dans l'hôtellerie ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille ; qu'il ne démontre pas la réalité des liens familiaux qu'il allègue et qui, en tout état de cause, ne sont pas suffisants pour caractériser une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il n'établit pas la continuité de sa présence en France notamment pour l'année 2008 durant laquelle il est rentré en Algérie pendant un temps indéfini ; que M. A démontre pas qu'il est dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans ; que, dans ces circonstances, compte tenu également des conditions de séjour de l'intéressé en France, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris ; que, dès lors, l'arrêté litigieux n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi (...) " ; et qu'aux termes de l'article 13 convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles " ;

Considérant que M. A soutient que l'arrêté lui refusant l'admission au séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant son pays de renvoi est de nature à porter atteinte à son droit à un procès équitable, tel que garanti par les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au motif que l'exécution dudit arrêté l'empêcherait de faire valoir ses droits lors du procès pénal qui l'oppose à son ancien avocat ; qu'ainsi qu'il a déjà été dit, M. A dispose de la possibilité de se faire représenter par l'intermédiaire d'un avocat, ou même de solliciter un visa afin de venir plaider sa cause durant ce procès, l'arrêté litigieux ne peut, dès lors, être regardé comme méconnaissant les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 " ; qu'il résulte des dispositions de l'article R. 312-2 du même code que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3, ou par les stipulations équivalentes des accords internationaux, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'était pas tenu de soumettre le cas de M. A à la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande ;

Considérant enfin qu'il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé par la voie de l'exception tiré de l'illégalité du refus d'admission au séjour dirigé contre la décision faisant obligation de quitter le territoire français doit être rejeté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 janvier 2011 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2011, n'appelle, par lui-même, aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction susmentionnées présentées par M. A doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris en date du 28 juin 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.

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N° 11PA03620


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA03620
Date de la décision : 19/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Jean-Marie PIOT
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : CHEVALIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-06-19;11pa03620 ?
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