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29/11/2012 | FRANCE | N°12PA00406

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 29 novembre 2012, 12PA00406


Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2012, présentée pour M. Suat B, demeurant au ... par Me Soubre-M' barki ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103401/7 du 15 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet du Val-de-Marne du 18 mars 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

2°) d'annuler ladite décision ainsi que l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 8 décembre 2011 lui refusant un titre d

e séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'e...

Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2012, présentée pour M. Suat B, demeurant au ... par Me Soubre-M' barki ; M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103401/7 du 15 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet du Val-de-Marne du 18 mars 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

2°) d'annuler ladite décision ainsi que l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 8 décembre 2011 lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2012 ;

- le rapport de Mme Versol,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public ;

1. Considérant que, par lettre du 15 novembre 2010, dont le préfet du Val-de-Marne a accusé réception le 18 novembre 2010, M. B, de nationalité turque, a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en invoquant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que du silence gardé par le préfet du Val-de-Marne pendant plus de quatre mois est née une décision implicite de refus le 18 mars 2011 ; que M. B relève appel du jugement du 15 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 8 décembre 2011 portant refus de délivrer un titre de séjour à M. B et obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant que les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 8 décembre 2011 refusant de faire droit à la demande de M. B de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite du préfet du Val-de-Marne du 18 mars 2011 refusant de délivrer à M. B un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête,

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser le séjour à un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B, entré en France le 6 septembre 2000, s'est marié religieusement le 8 mars 2008, puis civilement, à Paris, le 26 février 2009, à une compatriote, entrée en France en 1999, à l'âge de treize ans, et titulaire d'une carte de résident valable dix ans, jusqu'au 11 novembre 2018 ; qu'à la date de la décision contestée, deux enfants étaient nés de cette union, les 15 janvier 2009 et 21 novembre 2010 ; que la réalité de l'existence de la vie commune de M. B avec son épouse, justifiée notamment par un bail aux noms des époux, conclu le 10 mars 2010, n'est pas contestée par le préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense ni devant le Tribunal administratif de Melun, ni en appel ; qu'en outre, le requérant établit que les parents, frères et soeurs de son épouse résident régulièrement en France et sont titulaires de titres de séjour valables dix ans ; que, dans ces conditions, alors même que l'intéressé n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, la décision en litige a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et a donc méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'eu égard aux motifs du présent arrêt, l'exécution de celui-ci implique nécessairement que le préfet du Val de Marne délivre à l'intéressé un titre de séjour temporaire, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n 'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 15 novembre 2011 et la décision implicite du préfet du Val-de-Marne du 18 mars 2011 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val de Marne de délivrer à M. B un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 12PA00406


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA00406
Date de la décision : 29/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SOUBRE-M'BARKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-11-29;12pa00406 ?
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