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26/02/2013 | FRANCE | N°11PA00364

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 26 février 2013, 11PA00364


Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2011, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me C...; M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007046/3 en date du 7 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 17 mars 2010 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, et fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté susmentionné ;

3°) d'enjoindre, sous

astreinte, au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " ...

Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2011, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me C...; M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007046/3 en date du 7 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 17 mars 2010 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français, et fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté susmentionné ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord du 17 mars 1988 modifié entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

Vu l'accord cadre relatif à la gestion concertée des migrations entre la France et la Tunisie en date du 28 avril 2008 publié le 24 juillet 2009 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2013, le rapport de M. Privesse, rapporteur ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité tunisienne, né le 9 mars 1973, qui a déclaré être entré sur le territoire français le 18 avril 1996, a sollicité pour la première fois en 2008 la délivrance d'une carte de séjour temporaire ; que cette demande a été rejetée par le préfet de police le 4 mars 2009 par une décision qui a été annulée par jugement du 6 avril 2009 du Tribunal administratif de Paris ; que le préfet de police, auquel ce jugement a enjoint d'avoir à réexaminer le cas de M.B..., en a saisi la commission du titre de séjour qui a émis un avis défavorable à la délivrance d'un titre de séjour ; que le préfet de police, par l'arrêté en litige du 17 mars 2010, a refusé à M. B...l'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, et fixé son pays de destination ; que M. B... relève appel du jugement du 7 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes du d) de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : - Les ressortissants tunisiens qui, à la date d'entrée en vigueur de l'accord signé à Tunis le 28 avril 2008, justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans (...) " ; qu'aux termes de l'article 7 quater du même accord : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; que le décret n° 2009-905 du 24 juillet 2009 portant publication de l'accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire, du protocole relatif à la gestion concertée des migrations ainsi que du protocole en matière de développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signés à Tunis le 28 avril 2008 a fixé au 1er juillet 2009 l'entrée en vigueur dudit accord ; qu'en conséquence, la date à prendre en compte pour apprécier la justification de la présence habituelle en France depuis plus de dix ans de ressortissants tunisiens qui se prévalent des stipulations précitées de l'article 7 ter d de l'accord franco-tunisien modifié susvisé est celle du 1er juillet 2009 ;

3. Considérant que l'authenticité de certains des documents produits par M. B...pour établir sa résidence habituelle et continue en France depuis plus de dix ans au 1er juillet 2009, notamment des bulletins de salaire et des certificats médicaux a été contestée par le préfet de police ; qu'il résulte de l'examen des pièces du dossier que ne peuvent être tenus comme ayant valeur probante les bulletins de salaire prétendument émis par une société Barka-Elec affectée d'une adresse erronée, produits au titre des années 1999 et 2000 ; que la présence sur le territoire français du requérant durant ces mêmes années n'est pas établie par la production d'un formulaire de déclaration de revenus pour 1999 non visée par les services fiscaux, de deux factures des 17 juillet 1998 et 12 janvier 2000, non plus que par un simple imprimé postal mentionnant son nom ; que le seul courrier, daté du 24 février 1999, d'une compagnie d'assurances suisse comportant le nom et l'adresse de M. B...qui en aurait été destinataire, mais qui n'est pas accompagné du contrat souscrit, ne saurait attester du caractère habituel du séjour en France de l'intéressé, non plus que l'attestation de rendez-vous pour une consultation ophtalmologique du 14 février 2000 ; que par suite, M.B..., qui n'est donc susceptible, en tout état de cause, de n'établir sa présence habituelle en France qu'à compter de l'année 2001, ne peut être regardé comme remplissant la condition des dix années de séjour habituel en France à la date du 1er juillet 2009 ; que le préfet de police n'a dès lors pas méconnu les dispositions précitées du d) de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en prenant la décision contestée du 17 mars 2010 ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 juin 1988 en matière de séjour et de travail : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation " ; que l'article 3 de la même convention stipule que : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " " ; que le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 stipule, en son point 2.3.3, que : " Le titre de séjour portant la mention " salarié ", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'annexe I du présent protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ;

5. Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ;

6. Considérant que s'il résulte des stipulations de l'accord franco-tunisien ainsi que de celles du protocole signé à Tunis le 28 avril 2008 que ces dernières régissent de manière intégrale la situation des ressortissants tunisiens au regard de leur droit au travail, et par suite, de la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié, de telle sorte que ces dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la régularisation exceptionnelle par le travail ne trouvent pas à s'appliquer, il n'en va toutefois pas de même des dispositions du même article afférentes à la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le cadre d'une admission exceptionnelle au séjour pour laquelle ni les stipulations de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, ni celles du protocole précité ne prévoient de dispositions spécifiques applicables à ces ressortissants ; qu'ainsi, les dispositions de l'article L. 313-14 sont applicables aux ressortissants tunisiens s'agissant de la seule délivrance d'une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

7. Considérant que si M. B... a sollicité le bénéfice de ces dispositions au titre de ses activités professionnelles, il ne peut donc s'en prévaloir et a au demeurant bénéficié de la procédure applicable aux ressortissants tunisiens, ainsi que le précise l'arrêté litigieux ; que l'emploi de maçon qu'il souhaitait exercer, ne figure pas, sur la liste des 74 métiers ouverts aux ressortissants tunisiens annexée au protocole susmentionné du 28 avril 2008 ; qu'au surplus il n'a produit aucun contrat de travail, a fortiori visé par l'autorité compétente au sens de l'article 2.3.3. du même protocole ; qu'ainsi les moyens tirés de ce que le préfet de police a omis de transmettre la demande de M. B...à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, et n'a pas explicité les motifs pour lesquels il écartait la demande d'admission exceptionnelle au séjour sont inopérants ;

8. Considérant par suite, que M. B... ne peut utilement soutenir qu'il remplissait les conditions légales d'obtention de la carte de séjour portant la mention "salarié" mentionnées à l'article 2 dudit protocole ; que par suite, en rejetant sa demande également sur ce motif, le préfet de police a fait une exacte application de ces stipulations ;

9. Considérant que ni la durée du séjour en France de M. B..., dont il a été dit au point 3 ci-dessus qu'elle n'était pas établie, ni la présence sur le territoire français de son frère, ni le fait que M. B...y a exercé des emplois salariés, ne constituent des circonstances exceptionnelles ou des motifs fondés sur des considérations humanitaires justifiant l'admission au séjour de l'intéressé sur le fondement des dispositions précitées ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, si M. B...soutient qu'il a tissé des liens stables et intenses en France, qu'il est parfaitement intégré dans la société française, que l'arrêté litigieux porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée, en raison de la durée de son séjour sur le territoire français où réside également son frère, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est célibataire sans charge de famille, qu'une partie de sa famille proche, notamment ses parents, se trouve en Tunisie, et ainsi qu'il ne démontre pas l'intensité de sa vie familiale en France ; que le préfet de police n'a dès lors pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français ;

11. Considérant, que le préfet de police s'est prononcé sur l'ensemble des éléments invoqués par le requérant, qu'il n'est pas établi qu'il aurait refusé de faire usage de son pouvoir de régularisation ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté litigieux serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B...;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 7 décembre 2010, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M.B..., n'appelle, par lui-même, aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par le requérant doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font en tout état de cause obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme quelconque au bénéfice de M. B...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête susvisée de M. B...est rejetée.

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N° 11PA00364


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA00364
Date de la décision : 26/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : GASSOCH-DUJONCQUOY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-02-26;11pa00364 ?
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