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17/12/2013 | FRANCE | N°13PA02459

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 17 décembre 2013, 13PA02459


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juin 2013 et 15 juillet 2013, présentés pour M. A... D..., incarcéré au centre pénitentiaire de Roanne, rue Georges Mandel, Bâtiment D260 Ecrou n°868 à Roanne (42323), par Me E... ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1120651 du 2 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

28 novembre 2001 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son expulsion du territoire français ;

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) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, le versemen...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juin 2013 et 15 juillet 2013, présentés pour M. A... D..., incarcéré au centre pénitentiaire de Roanne, rue Georges Mandel, Bâtiment D260 Ecrou n°868 à Roanne (42323), par Me E... ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1120651 du 2 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

28 novembre 2001 par lequel le ministre de l'intérieur a prononcé son expulsion du territoire français ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, le versement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'autre part, la somme de

3 000 euros, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à Me E...;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 novembre 2013 :

- le rapport de M. Dellevedove, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Rousset , rapporteur public ;

1. Considérant que M. D..., né le 16 avril 1975, de nationalité tunisienne, entré sur le territoire français à l'âge de 2 ans, a fait l'objet de plusieurs condamnations pénales entre 1993 et 2011 ; que, par l'arrêté en date du 28 novembre 2001, le ministre de l'intérieur a décidé son expulsion, comme constituant une nécessité impérieuse pour la sécurité publique en raison de l'ensemble de son comportement ; que, le 18 mars 2011, M. D... a sollicité le renouvellement de sa carte de résident par le biais du service pénitentiaire d'insertion et de probation de Roanne, qui l'a informé qu'il faisait l'objet de cet arrêté d'expulsion ; que M. D... fait appel du jugement en date du 2 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu, par une motivation qui rappelle tant les textes conventionnels, législatifs et réglementaires applicables que les faits de l'espèce, à l'ensemble des conclusions et des moyens opérants de M. D...; que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, les premiers juges n'avaient pas à démontrer de manière détaillée en quoi les délits qu'il a commis justifient qu'il soit regardé comme susceptible de constituer une menace pour l'ordre public, ni même de développer les raisons pour lesquelles il a estimé que les liens affectifs qu'il a avec des personnes résidant en France ne sont pas suffisant pour que son expulsion constitue une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi, les premiers juges ont respecté l'obligation de motivation imposée par les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

Au fond :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté a été signé pour le ministre de l'intérieur par M. B...C..., chef de service, qui disposait à cet effet d'une délégation de signature régulière qui lui avait été consentie par arrêté du 25 mai 2001, publié au Bulletin Officiel de la République Française le 26 mai 2001 ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté comporte l'exposé des motifs de fait et de droit qui en constituent le fondement et que le ministre de l'intérieur s'est livré à un examen de l'ensemble de la situation personnelle de M. D... ; que, dès lors, l'arrêté du 28 novembre 2001 est suffisamment motivé ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : " Sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public (...) " ; qu'aux termes de l'article 26 de cette ordonnance : " L'expulsion peut être prononcée : (...) / b) Lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation à l'article 25. / En cas d'urgence absolue et lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, l'expulsion peut être prononcée par dérogation aux articles 24 et 25 " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, à la date de l'arrêté contesté, M. D... avait fait l'objet de quatre condamnations pénales en 1994, 1997, 2000 et 2001 à raison desquelles il a purgé un quantum total de six ans et quatre mois d'emprisonnement ; qu'il a été condamné en raison de faits de port d'arme prohibé de 6ème catégorie, de vol avec violence, de violences volontaires sur agent dépositaire de l'autorité publique et d'infractions à la législation sur les stupéfiants ; qu'eu égard au caractère récurrent et de gravité des délits constatés, le ministre de l'intérieur a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, et nonobstant l'avis défavorable rendu par la commission spéciale d'expulsion, estimer que l'expulsion de M. D... constituait une nécessité impérieuse pour la sécurité publique et, par suite, prendre à son encontre la décision en litige ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que M. D... fait valoir qu'il est entré en France à l'âge de 2 ans, qu'il n'a aucune attache en Tunisie, pays dont il ne parle pas la langue, que ses frères et soeurs sont français, qu'il entretient une relation stable avec une ressortissante française et qu'il est père d'un enfant de nationalité française né en 2003 ; que, toutefois, les documents qu'il produit, et notamment les attestations de concubinage et d'hébergement délivrées par sa compagne, sont insuffisants pour établir l'intensité des liens familiaux dont il se prévaut alors, d'ailleurs, que sa fille est née postérieurement à l'arrêté contesté, qu'il ne l'a reconnue que sept ans après sa naissance et qu'il n'établit pas contribuer effectivement à son entretien et à son éducation ; qu'il ne saurait justifier de son insertion sociale en se bornant à produire une promesse d'embauche ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté du

28 novembre 2001 n'a pas porté au droit de M. D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, l'arrêté contesté, qui n'est entaché d'aucune erreur de fait, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ces mêmes circonstances ne sont pas davantage de nature à faire regarder cet arrêté comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 28 novembre 2001 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une quelconque somme au bénéfice de M. D... et de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête susvisée de M. D... est rejetée.

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N° 13PA02459


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02459
Date de la décision : 17/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : CHILLAOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-17;13pa02459 ?
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