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31/12/2013 | FRANCE | N°12PA04808

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 31 décembre 2013, 12PA04808


Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2012, présentée pour la société Marret et Cie, dont le siège est à Papeete (98713), BP 1011, par Me A...;

la société Marret et Cie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1200193 du 11 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe sur la production des boissons alcoolisées et de certains produits sucrés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 octobre 2010 ;

2°)

de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie ...

Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2012, présentée pour la société Marret et Cie, dont le siège est à Papeete (98713), BP 1011, par Me A...;

la société Marret et Cie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1200193 du 11 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe sur la production des boissons alcoolisées et de certains produits sucrés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 octobre 2010 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

Vu la loi n°2004-193 du 27 février 2004 ;

Vu code des impôts de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2013 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président assesseur,

- et les conclusions de M. Boissy, rapporteur public ;

1. Considérant que la société Marret et Cie relève appel du jugement en date du 11 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe sur la production de boissons alcoolisées et de certains produits sucrés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 octobre 2010 ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 412-1 du code des impôts de la Polynésie française : " I. Les agents du service des contributions vérifient sur place la comptabilité des contribuables et les autres documents dont la tenue est obligatoire en vertu du présent code. (...) " ; que l'administration procède à la vérification de comptabilité d'une entreprise lorsqu'en vue d'assurer l'établissement d'impôts ou de taxes totalement ou partiellement éludés, elle contrôle sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par cette entreprise en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont elle prend alors connaissance et dont, le cas échéant, elle peut remettre en cause l'exactitude ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 433-6 du code des impôts de la Polynésie française : " Saisie dans le cadre de la procédure de redressement prévue à l'article 421-1-2, la commission émet un avis qui ne lie pas l'administration. Cependant, dans le cas où le service des contributions établit une imposition ou effectue un redressement sur la base d'une appréciation contraire à l'avis de la commission, il a l'obligation, avant la mise en recouvrement, sous peine de nullité de la procédure de vérification, de transmettre le dossier, pour décision, au Président de la Polynésie française ou à son délégataire. (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la notification de redressements adressée le 6 décembre 2010 à la société Marret et Cie, que cette société a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel le service des contributions de la Polynésie française a estimé qu'elle était assujettie, au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 octobre 2010, à la taxe sur la production de boissons alcoolisées et de certains produits sucrés ; que la circonstance que le service des contributions de la Polynésie française ait exploité, dans le cadre de ce contrôle sur pièces, certaines informations recueillies lors de la vérification de comptabilité de l'un des fournisseurs de la société requérante, la société " Brasserie de Tahiti ", ne permet pas d'établir qu'il aurait procédé à une vérification de la comptabilité de la société requérante dès lors qu'il ne s'est livré sur place à aucun contrôle de la sincérité des déclarations qu'elle avait souscrites en les comparant avec ses écritures comptables ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 433-6 du code des impôts de la Polynésie française que si, en vertu de la première phrase de cet article, la commission des impôts peut être saisie en cas de désaccord constaté dans le cadre de la procédure de redressement prévue à l'article 421-1-2 et émet un avis qui ne lie pas l'administration, l'obligation faite à cette dernière, par la deuxième phrase de l'article 433-6, de transmettre le dossier, pour décision, au président de la Polynésie française ou à son délégataire, lorsqu'elle envisage d'établir une imposition ou d'effectuer un redressement sur la base d'une appréciation contraire à l'avis de la commission, ne s'applique, sous peine de nullité de la procédure d'imposition, que lorsque la procédure de redressement a été précédée d'une procédure de vérification du même contribuable ; que la seule procédure de vérification prévue par le code des impôts de la Polynésie française est la vérification de comptabilité, qui figure à l'article 412-1 de ce code ;

6. Considérant que, ainsi qu'il a été dit au point 4, les impositions en litige ont été établies selon la procédure de redressement contradictoire à l'issue d'un contrôle sur pièces de la société Marret et Cie et non d'une vérification de la comptabilité de cette société ; qu'il s'ensuit que doit être écarté comme inopérant le moyen tiré par la société requérante de ce que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité au motif que le service des contributions a mis les impositions en litige en recouvrement sans transmettre préalablement le dossier, pour décision, au président de la Polynésie française, alors que les redressements ont été effectués sur la base d'une appréciation contraire à l'avis de la commission des impôts ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 338-1 du code des impôts de la Polynésie française : " Il est créé une taxe due par toute entreprise, personne physique ou morale, qui exerce à titre lucratif, et de façon habituelle, une activité de production portant sur les produits visés à l'article 338-2 ci-après. " ; qu'au nombre des produits visés à l'article 338-2 figurent les eaux gazéifiées additionnées de sucre ou d'autres édulcorants ou aromatisées, ainsi que les sirops, produits qui sont taxés à raison de 40 francs CFP par litre ; qu'aux termes de l'article 338-3 du même code : " Le fait générateur et l'exigibilité de la taxe sont constitués par la livraison ou l'enlèvement des produits soumis à la taxe " ; qu'aux termes de l'article 338-4 dudit code : " Les personnes qui réalisent les opérations imposables doivent, tous les mois, déposer une déclaration comportant les indications nécessaires à la liquidation et au contrôle de la taxe (...) " et qu'aux termes de l'article 338-6 : " La taxe est contrôlée et recouvrée comme en matière de taxe sur la valeur ajoutée (...) Les réclamations sont présentées, instruites et jugées comme pour cet impôt " ;

8. Considérant qu'il incombe au service des contributions de la Polynésie française, dès lors que les impositions en litige ont été établies dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire et que les redressements qui sont à l'origine de ces impositions n'ont pas été acceptés par la contribuable, qui les a refusés dans les observations qu'elle a présentées le 3 janvier 2011, d'apporter la preuve du bien-fondé des impositions en litige ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Marret et Cie exploite à Tahiti, sur le territoire de la commune de Papeete, sous l'enseigne " Le Paradise Night ", un établissement de restauration, spectacle et discothèque dans lequel elle vend des boissons sucrées et gazéifiées sous les marques Coca-Cola, Sprite et Fanta ;

10. Considérant, en premier lieu, que, ainsi que le service des contributions de la Polynésie française l'a relevé dans la notification de redressements en date du 6 décembre 2010, les boissons susmentionnées servies aux consommateurs dans l'établissement de la société requérante sont obtenues à partir de sirops, fournis par la société anonyme Brasserie de Tahiti dans des outres en plastique (" Bag in Box ") et que la requérante transforme en sodas au moyen de fontaines à boissons, en y ajoutant de l'eau, filtrée et adoucie, et du gaz carbonique alimentaire, selon des ratios et des techniques conformes à ceux imposés par les fabricants ; que la société Marret et Cie fait ainsi subir aux sirops qu'elle achète à ce fournisseur une transformation qui modifie leur nature en permettant l'élaboration de 5,4 à 6,4 litres de boisson consommable à partir d'un litre de sirop, non consommable sans cette transformation ; que, grâce à ce procédé, cette société élabore donc un produit nouveau ; qu'il s'ensuit que le service établit que la société requérante doit être regardée, alors même qu'elle ne dispose pas des licences de production afférentes aux marques des boissons sucrées en cause, comme exerçant une activité de production, au sens de l'article 338-1 du code des impôts de la Polynésie française ;

11. Considérant que si la société requérante fait valoir qu'elle ne bénéficie pas, en tant que restaurateur, des différents avantages fiscaux institués en faveur des activités de production par la législation métropolitaine ou celle applicable en Polynésie française, cette circonstance est sans incidence sur l'application des dispositions précitées de l'article 338-1 du code des impôts de la Polynésie française, qui ne subordonnent pas l'application de la taxe sur la production de boissons alcoolisées et de certains produits sucrés à la qualité de producteur, au sens d'autres dispositions, mais s'appliquent à toute entreprise exerçant, comme elle, à titre lucratif, et de façon habituelle, une activité de production portant sur les produits visés par cet article ; que les dispositions de cet article ne s'appliquent pas uniquement, contrairement à ce que soutient la société requérante, aux entreprises qui exercent cette activité de production à titre principal, mais également à toutes celles qui, comme elle, l'exercent à titre habituel, même accessoire à une activité de restauration ;

12. Considérant qu'il est constant que cette activité porte sur des eaux gazéifiées additionnées de sucre ou d'autres édulcorants ou aromatisées, qui sont au nombre des produits visés à l'article 338-2 de ce code ;

13. Considérant que la société Marret et Cie ne saurait utilement se prévaloir, à l'appui de ses conclusions tendant à la décharge de la taxe à laquelle elle a été assujettie à raison de son activité de production de boissons sucrées et gazéifiées, dont l'assiette est définie par les dispositions précitées des articles 338-1 et 338-2 du code des impôts de la Polynésie française, de ce que l'activité de vente de boissons qu'elle exerce par ailleurs est regardée comme une activité de service par les dispositions de l'article 340-3 de ce code relatives à la taxe sur la valeur ajoutée ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que la remise aux consommateurs, au sein de l'établissement, des boissons obtenues dans les conditions indiquées au point 10, dans des gobelets cartonnés fermés par un couvercle en plastique, pour être consommées sur place ou emportées, doit être regardée comme constituant, au sens de l'article 338-3 du code des impôts de la Polynésie française, un enlèvement des produits soumis à la taxe, opération qui rend exigible la taxe due par la société Marret et Cie ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Marret et Cie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Marret et Cie demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Marret et Cie une somme de 500 euros au titre des frais exposés par la Polynésie française et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Marret et Cie est rejetée.

Article 2 : La société Marret et Cie versera à la Polynésie française une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N°12PA04808


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

46-01-03-02-03 Outre-mer. Droit applicable. Lois et règlements (hors statuts des collectivités). Collectivités d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie. Polynésie française.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : QUINQUIS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Date de la décision : 31/12/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12PA04808
Numéro NOR : CETATEXT000028451535 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-31;12pa04808 ?
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