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13/06/2014 | FRANCE | N°11PA01543

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 13 juin 2014, 11PA01543


Vu le recours, enregistré le 28 mars 2011, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0909388-0912267-0912280/5 en date du 27 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé les décisions du 25 mars 2008, retirant la décision du 14 février 2008 nommant M. A...en qualité d'agent d'administration du Trésor public de première classe stagiaire, et le radiant de la liste d'admission au concours correspondant, et du 6 février 2009 confirma

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Vu le recours, enregistré le 28 mars 2011, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0909388-0912267-0912280/5 en date du 27 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé les décisions du 25 mars 2008, retirant la décision du 14 février 2008 nommant M. A...en qualité d'agent d'administration du Trésor public de première classe stagiaire, et le radiant de la liste d'admission au concours correspondant, et du 6 février 2009 confirmant cette radiation, ainsi que celle du 3 juillet 2008 radiant l'intéressé de la liste d'admission au concours d'agent administratif des impôts ;

2°) de rejeter les demandes présentées les 8 août 2008, 24 avril 2008 et 23 juillet 2009, par M. A..., respectivement devant les Tribunaux administratifs de Versailles, Caen et Paris, les deux premières ayant fait l'objet d'ordonnances de renvoi respectivement les 22 et 6 mai 2009 ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, notamment son article 13 ;

Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2014 :

- le rapport de M. Privesse, premier conseiller,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me Nhari, avocat de M. A...;

1. Considérant que M. A...a été candidat durant l'année 2007 à deux concours externes régionaux en Île-de-France d'agent de recouvrement du Trésor public et d'agent de constatation ou d'assiette des impôts, et a été informé par deux courriers, respectivement des 14 et 15 février 2008, de son admission à ces concours et de sa nomination en qualité d'agent d'administration stagiaire de première classe, sous réserve notamment de la vérification de son aptitude par un médecin agréé, conformément aux termes de l'article 20 du décret du 14 mars 1986 susvisé ; qu'à la suite des examens médicaux auxquels M. A...s'est présenté, il a fait l'objet d'une première décision du 25 mars 2008, l'informant qu'il ne serait pas procédé à sa nomination en qualité d'agent d'administration du Trésor public, et le radiant de la liste d'admission à ce concours, du fait qu'il ne remplissait pas la condition d'aptitude précédemment mentionnée ; que cette décision a été confirmée à la suite de la saisine, sur demande de l'intéressé, du comité médical, le 18 décembre 2008, par une seconde décision du 6 février 2009 rendue sur avis défavorable dudit comité ; que, par ailleurs, une autre décision du 3 juillet 2008 a confirmé également à l'intéressé un refus de nomination sur un poste au sein de la direction des impôts de l'Orne, du fait de son état de santé incompatible avec l'exercice des fonctions postulées ; que l'intéressé a contesté ces trois décisions par trois requêtes distinctes devant les Tribunaux administratifs de Versailles, de Paris, et de Caen, dont deux ont fait l'objet d'un renvoi par ordonnances devant celui de Paris, lequel a, par un seul jugement en date du 27 janvier 2011, annulé les décisions précitées, en se fondant sur une erreur d'appréciation du ministre ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État fait appel dudit jugement en ce qu'il a annulé les décisions de refus de nomination et de radiation en cause ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M. A...:

2. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " (...) nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire : (...) / 5° S'il ne remplit les conditions d'aptitude physique exigées pour l'exercice de la fonction compte tenu des possibilités de compensation du handicap" ; qu'aux termes de l'article 20 du décret du 14 mars 1986 : " Nul ne peut être nommé à un emploi public s'il ne produit à l'administration, à la date fixée par elle, un certificat médical délivré par un médecin généraliste agréé constatant que l'intéressé n'est atteint d'aucune maladie ou infirmité ou que les maladies ou infirmités constatées et qui doivent être indiquées au dossier médical de l'intéressé ne sont pas incompatibles avec l'exercice des fonctions postulées. / Au cas où le praticien de médecine générale a conclu à l'opportunité d'un examen complémentaire, l'intéressé est soumis à l'examen d'un médecin spécialiste agréé. / Dans tous les cas l'administration peut faire procéder à une contre-visite par un médecin spécialiste agréé en vue d'établir si l'état de santé de l'intéressé est bien compatible avec l'exercice des fonctions qu'il postule " ; que l'article 21 du même décret dispose : " Lorsque les conclusions du ou des médecins sont contestées soit par l'intéressé, soit par l'administration, le dossier est soumis au comité médical compétent " ; que son article 7 dispose : " Les comités médicaux sont chargés de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les contestations d'ordre médical qui peuvent s'élever à propos de l'admission des candidats aux emplois publics, de l'octroi et du renouvellement des congés de maladie et de la réintégration à l'issue de ces congés / (...) L'avis du comité médical est communiqué au fonctionnaire sur sa demande " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'appréciation des conditions d'aptitude physique pour l'admission dans les corps de fonctionnaires ne peut porter que sur la capacité de chaque candidat, estimée au moment de l'admission, à exercer les fonctions auxquelles ces corps donnent accès ; que si l'appréciation de l'aptitude physique, mentale ou comportementale à exercer ces fonctions peut prendre en compte les conséquences de l'évolution prévisible d'une affection déclarée, elle doit aussi tenir compte de l'existence de traitements permettant de guérir l'affection ou de bloquer son évolution ;

3. Considérant d'une part, qu'à la suite du courrier du 14 février 2008 informant M. A... de sa réussite au concours d'agent d'administration du Trésor public, l'intéressé a été invité à se présenter à trois visites médicales successives les 28 février, 10 mars et 21 mars 2008 ; que le 28 février 2008, le docteur Marcq, médecin généraliste agréé, a estimé, dans un premier temps, que M. A...souffrait d'une affection psychologique qui ne le rendait pas inapte à l'exercice de ses fonctions, mais qui était constitutive d'une invalidité permanente dont le taux devait être précisé par un expert psychiatre et a, pour ce motif, demandé l'avis complémentaire d'un psychiatre agréé à même notamment de préciser par expertise le taux d'IPP de l'intéressé, et son aptitude mentale ou comportementale à exercer les fonctions auxquelles il postulait ; que le 10 mars suivant, le docteur Mekki, psychiatre agréé, a constaté que le handicap de M. A...était compatible avec l'exercice de la fonction postulée et, observant effectivement la présence d'une affection à l'origine d'un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 10%, qu'il n'existait pas de réel suivi médical à ce jour, à part une prise de médicaments n'ayant pas d'incidence sur l'exercice des fonctions ; que cependant, par un second certificat médical du 21 mars 2008, sur lequel l'administration s'est fondée, le docteur Marcq a déclaré : " M. A...inapte à exercer ses fonctions d'agent d'administration du Trésor public " ; que ce dernier certificat ne présentait aucune précision ni aucune justification permettant de remettre en cause non seulement le premier avis de ce même médecin généraliste, mais encore et surtout les résultats favorables à l'intéressé de l'examen conduit par un médecin expert au surplus désigné par le généraliste ; que, dès lors, c'est à tort, en commettant une erreur d'appréciation, que l'administration s'est fondée, pour prononcer la radiation de l'intéressé, sur ce seul certificat ;

4. Considérant d'autre part, qu'à la suite du courrier du 15 février 2008 informant M. A... de sa réussite au concours d'agent de constatation ou d'assiette des impôts, l'intéressé a été invité à se présenter à une visite médicale le 28 mars 2008 devant le docteur Gontran-Massey, médecin généraliste agréé ; que celui-ci a souhaité recueillir l'avis d'un médecin psychiatre avant de se prononcer sur l'aptitude de l'intéressé aux fonctions d'agent des impôts ; que, par un certificat médical établi le 28 avril suivant, le docteur Ferry, médecin psychiatre, a estimé que " l'état de santé psychologique de M. A...ne montre pas de contre-indication à l'exercice d'une activité professionnelle " ; qu'alors qu'il n'avait pas encore reçu le certificat médical établi par le médecin psychiatre, le médecin généraliste, qui n'avait pourtant pas procédé à un nouvel examen de M.A..., transmettait au directeur des services fiscaux de l'Orne un pré-rapport concluant à l'inaptitude de l'intéressé aux fonctions postulées, qu'il confirmait par un avis définitif du 1er juillet 2008 ;

5. Considérant que, dans ces conditions, l'administration ne pouvait, pour déclarer M. A... définitivement inapte à l'exercice des fonctions d'agents des impôts, se fonder sur le certificat médical d'un médecin généraliste qui, sans la moindre justification écartait l'avis d'un médecin spécialiste lequel, à l'inverse et sans ambiguïté, estimait que l'intéressé était apte à occuper un emploi dans la fonction publique ; que c'est donc en commettant une erreur d'appréciation, que l'administration a estimé, au vu des éléments précédemment mentionnés, qu'il y avait lieu de radier, par la décision du 3 juillet 2008, M. A... de la liste d'admission au concours d'agent administratif des impôts ;

6. Considérant enfin que, si l'avis émis le 21 novembre 2008 par le médecin psychiatre saisi par le comité médical départemental de l'Essonne, lequel au demeurant n'a pas été produit au dossier en dépit d'une mesure d'instruction diligentée par la Cour le 3 avril 2014, conclut à l'inaptitude de M. A...aux fonctions d'agent du Trésor, une telle circonstance est insuffisante pour remettre en cause les avis contraires et sans réserve rendus par deux autres psychiatres agréés ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a estimé que le ministre avait commis une erreur d'appréciation en radiant l'intéressé des deux listes d'admission litigieuses et a annulé, par voie de conséquence, les trois décisions contestées par M.A... ; que, dès lors, le recours du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, doit être rejeté ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce , de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État est rejeté.

Article 2 : L'État versera à M. A...la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11PA01543


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA01543
Date de la décision : 13/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : DUQUESNE-CLERC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-06-13;11pa01543 ?
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