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02/10/2014 | FRANCE | N°12PA04999

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 02 octobre 2014, 12PA04999


Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2012, présentée pour la société Translease, dont le siège est 30 rue Galilée à Paris (75116), par Me A... ; la société Translease demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108756/2-2 du 15 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des p

énalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme...

Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2012, présentée pour la société Translease, dont le siège est 30 rue Galilée à Paris (75116), par Me A... ; la société Translease demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108756/2-2 du 15 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l'instance ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Versol, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public ;

1. Considérant que la société Translease, qui exerce une activité de location de matériel de levage et de courtier en financement, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration l'a informée de différentes rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que la société Translease relève appel du jugement du 15 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 et des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ;

3. Considérant que si, lorsqu'elle envisage de modifier les bases d'imposition d'un contribuable, il incombe à l'administration d'informer celui-ci de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a pu obtenir dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, afin qu'il soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les pièces concernées soient mises à sa disposition, cette obligation ne porte que sur les renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements ;

4. Considérant que la société Translease a fait l'objet, le 24 juin 2008, d'une perquisition et d'une saisie de documents dans le cadre d'une instruction judiciaire ; que, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès du juge d'instruction près le Tribunal de grande instance de Meaux, le vérificateur a pu consulter, les 13 et 27 mai 2009, des documents saisis lors de la perquisition dans les locaux de la société Translease ; que si la requérante soutient qu'elle n'a pas eu communication des informations obtenues par l'administration dans l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, il n'est pas contesté qu'elle n'a effectué aucune diligence pour obtenir communication de ces informations auprès du juge d'instruction ; qu'en outre, l'administration fait valoir, sans être contredite, que, pour fonder les rappels notifiés en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le vérificateur ne s'est appuyé que sur des éléments résultant de l'examen contradictoire des pièces comptables et des documents consultés sur place ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la requérante n'a pas eu communication des informations obtenues par l'administration dans l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire et que ces informations n'ont pas été soumises au débat oral et contradictoire ne peut qu'être écarté ; que la requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que le défaut de communication par l'administration des informations qu'elle a obtenues, fait obstacle à lui seul à ce qu'elle puisse justifier de la régularité des écritures comptables litigieuses au cours de la procédure contentieuse ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée collectée :

5. Considérant qu'aux termes du 3 de l'article 283 du code général des impôts : " Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Translease, agissant en qualité de courtier entre la société Dimalev, fournisseur de matériel de levage, et la société Locafinance, propriétaire et bailleur dudit matériel, a adressé le 19 février 1997 à la société Cegelec un contrat de location de matériel de levage établi à l'en-tête de la société Locafinance ; que la propriété du matériel en cause a été cédée le 31 juillet 2002 à la société Translease ; que la société Cegelec refusant de restituer le bien, la société Translease lui a facturé des " indemnités d'utilisation ", pour la période du 23 septembre 2002 au 28 février 2006, d'un montant mensuel de 2 246 euros hors taxes et 440,22 euros de taxe sur la valeur ajoutée, soit une somme de 2 686,22 euros toutes taxes comprises ; que, par jugement du Tribunal de commerce de Nantes du 2 décembre 2004, partiellement réformé par la Cour d'appel de Rennes le 13 janvier 2006, la société Cegelec a été condamnée à verser à la société Translease à titre de dommages-intérêts une somme mensuelle de 2 246,03 euros à compter du 23 septembre 2002 jusqu'à la date de restitution du matériel et les intérêts au taux légal ; qu'en avril 2006, la société Cegelec a versé à la société Translease les sommes de 92 648,74 euros, correspondant au capital, et de 2 059,44 euros, correspondant aux intérêts, en exécution de l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes ; que relevant que la société Translease a soldé comptablement le compte client de la société Cegelec et a réduit le compte 4457000 " TVA collectée " de 13 986,98 euros en contrepartie du compte 771000 " produit exceptionnel ", le service lui a notifié le 24 juillet 2009 un rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 13 987 euros ; qu'il résulte de l'instruction que la société requérante n'a produit aucune facture rectificative établie à destination de la société Cegelec ; que si elle fait valoir que la facture rectificative en cause a été saisie par l'autorité judiciaire, elle ne démontre par aucune des pièces versées au dossier en avoir demandé la communication au juge d'instruction ; que, par ailleurs, elle ne peut utilement se prévaloir de ce qu'elle n'aurait pas perçu de taxe sur la valeur ajoutée sur la somme versée par la société Cegelec en exécution de l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes pour soutenir qu'elle ne demeurait pas redevable de la taxe facturée à la société Cegelec, à concurrence de la somme de 13 987 euros, en application des dispositions précitées de l'article 283 du code général des impôts ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible :

7. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations, la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

8. Considérant qu'à l'issue de la vérification de la comptabilité de la société Translease, l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des factures d'honoraires émanant de la société EDN Rénovation, apporteuse d'affaires, au motif que les factures présentées par la redevable ne permettaient pas d'établir la nature précise et la réalité des prestations facturées en 2006 par cette société ; que l'administration fait valoir que si la société Translease a présenté la société EDN Rénovation comme une entreprise monégasque de travaux publics européens, apporteuse d'affaires dans le cadre de contrats de financement de clients auprès d'organismes financiers, cette société exerce une activité de nettoyage spécialisée dans la rénovation du marbre selon les informations recueillies sur un annuaire électronique des entreprises monégasques ; que le service relève également que ni les factures initiales établies en 2006, ni les factures rectificatives présentées devant les premiers juges ne permettent d'établir la nature précise et la réalité des prestations facturées en 2006, alors que les contrats en cause ont été conclus en 2004 par la redevable ; qu'en appel, la société Translease ne produit pas davantage qu'en première instance de justifications complémentaires attestant la réalité d'échanges commerciaux avec la société EDN Rénovation, ni d'éléments permettant d'établir qu'elle a demandé communication des justifications qui auraient été saisies par l'autorité judiciaire, ainsi qu'elle s'en est prévalue devant le tribunal ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée en litige ;

9. Considérant que, s'agissant de la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à une opération de revente de matériel acquis auprès de la société MABO et à des commissions versées à un apporteur d'affaires, M. B..., d'une part, ainsi que du solde créditeur du poste " taxe sur la valeur ajoutée sur achats ", au 31 décembre 2005, d'autre part, la société requérante se borne à soutenir, sans en justifier, qu'elle n'a pas eu accès aux justifications demandées par l'administration, au motif de leur saisie par l'autorité judiciaire ; que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur les pénalités :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

11. Considérant, en premier lieu, que les propositions de rectification adressées les 3 décembre 2008 et 24 juillet 2009 à la société Translease qui mentionnent, dans des paragraphes spécifiquement consacrés aux pénalités, les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, précisent l'ensemble des circonstances de fait sur lesquelles l'administration s'est fondée pour établir l'intention de la redevable de minorer l'impôt ; que, par suite, les pénalités litigieuses doivent être regardées comme suffisamment motivées ;

12. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des stipulations du 2 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie " ;

13. Considérant que l'administration relève que la société Translease a déduit de la taxe sur la valeur ajoutée sur des commissions réclamées par une salariée qui n'était par ailleurs pas inscrite au registre du commerce et des sociétés, ainsi que sur des opérations non justifiées d'entremise, sur des dépenses personnelles ou non justifiées de restaurant et de déplacement exposées en faveur du dirigeant de la société, sur une facture de matériels de levage émise le 31 mai 2005 par la société Mabo sans livraison des matériels en cause ; qu'en se fondant sur ces éléments, l'administration établit ainsi l'intention délibérée de la contribuable d'éluder l'impôt et en conséquence, le bien-fondé des pénalités pour manquement délibéré dont elle a majoré les redressements ; que, ce faisant, elle n'a pas méconnu la présomption d'innocence énoncée au paragraphe 2 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Translease n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu de laisser à la charge de la société Translease la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article R. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Translease est rejetée.

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N° 12PA04999


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04999
Date de la décision : 02/10/2014
Type d'affaire : Administrative

Analyses

19-06-02-08-03-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Conditions de la déduction.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : ZERBIB

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-10-02;12pa04999 ?
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