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19/03/2015 | FRANCE | N°14PA02390

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 19 mars 2015, 14PA02390


Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 15 mai, 31 octobre et 8 décembre 2014, présentés pour M. A...B...et Mme E...F..., épouseB..., demeurant..., par Me Lendrevie, avocat ; M. et Mme B... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1318500,1318502 du 15 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés des 20 et 25 novembre 2013 par lesquels le préfet de police a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un

délai de trente jours, en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler,...

Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 15 mai, 31 octobre et 8 décembre 2014, présentés pour M. A...B...et Mme E...F..., épouseB..., demeurant..., par Me Lendrevie, avocat ; M. et Mme B... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1318500,1318502 du 15 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés des 20 et 25 novembre 2013 par lesquels le préfet de police a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer leur situation et de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour durant ce réexamen, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- les premiers juges ont méconnu leur droit à un procès équitable, garanti par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ne tenant pas compte du mémoire produit le 3 mars 2014 ;

- ni le préfet de police ni les premiers juges n'ont procédé à un examen particulier de leur situation ;

- le préfet de police n'a pas pris en compte l'intérêt supérieur de leur enfant, en méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le préfet de police a méconnu les principes de transparence, d'équité, de respect des droits des administrés et du respect du contradictoire ;

- les premiers juges ont estimé à tort que le moyen tiré de l'illégalité externe des décisions contestées, au motif du défaut de production de l'avis médical du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, n'avait pas été soulevé ;

- le jugement est entaché de contradiction de motifs ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ont été méconnues ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation de leur enfant, notamment au regard de sa prise en charge médicale et scolaire ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu les pièces dont il résulte que la requête et les mémoires complémentaires ont été communiqués au préfet de police qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 mars 2015, présentée pour M. et Mme B..., par Me Lendrevie ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2015 :

- le rapport de Mme Versol, premier conseiller,

- et les observations de Me Lendrevie, avocat de M. et MmeB... ;

1. Considérant que M. et Mme B..., ressortissants algériens entrés en France en novembre 2008 selon leurs déclarations, ont sollicité la délivrance de certificats de résidence algériens portant la mention " vie privée et familiale " ; que, par deux arrêtés des 20 et 25 novembre 2013, le préfet de police a rejeté leurs demandes, en leur faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et en fixant le pays de destination ; que M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 15 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des termes du jugement attaqué ni des pièces du dossier que le Tribunal administratif de Paris n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. et Mme B... ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des visas du jugement, que le mémoire produit par Mme B... et enregistré le 4 mars 2014 au greffe du tribunal, a été visé et analysé par les premiers juges ; qu'en outre, ce mémoire a été communiqué au préfet de police ; que les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir qu'en ne tenant pas compte de ce mémoire, le tribunal aurait méconnu leur droit à un procès équitable, garanti par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des termes du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Paris a suffisamment motivé sa réponse aux moyens tirés de la méconnaissance, d'une part, des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, d'autre part, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation du jugement attaqué doit être écarté ;

5. Considérant, en quatrième lieu, que si les requérants soutiennent que les premiers juges ont estimé à tort que n'a pas été soulevé de moyen tiré de l'illégalité externe des décisions contestées, au motif du défaut de production par le préfet de police de l'avis médical du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, il ressort des pièces du dossier qu'en première instance, les requérants ont seulement soulevé un moyen tiré de ce que le préfet ne contredisait pas sérieusement les certificats médicaux produits en ne versant pas l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police de Paris, moyen auquel le jugement attaqué a suffisamment répondu, notamment dans son point 6 ; que, par suite, le moyen susnanalysé manque en fait et doit être écarté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort ni des termes des arrêtés contestés ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation personnelle de M. et Mme B... avant de rejeter leurs demandes de titre de séjour ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que si M. et Mme B... soutiennent que le préfet de police a méconnu les principes de transparence, d'équité, de respect des droits des administrés et du respect du contradictoire, ils n'assortissent pas ce moyen de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;

9. Considérant que M. et Mme B...font valoir que l'état de santé de leur enfantD..., né en France en 2010, nécessite des soins hospitaliers et ambulatoires spécifiques ainsi que des aménagements de sa scolarité afin que cette dernière soit adaptée à ses pathologies, ce dont il ne pourrait bénéficier en Algérie ; que si les documents médicaux produits établissent que l'état de santé du jeune D...rend nécessaire une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ne ressort pas de ces justificatifs ni des autres pièces du dossier qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Algérie, eu égard au caractère peu circonstancié sur ce point des certificats médicaux établis par le docteur Pham Thi, allergologue et pneumo-pédiatre à l'hôpital Necker, et par le docteur Haddad, médecin généraliste ; que le rapport médical établi postérieurement aux décisions contestées, le 19 octobre 2014, par les docteurs Rachedi et Kharoubi, qui se borne à rappeler la pathologie dont souffre l'enfant de M. et Mme B... et à indiquer que " vu les circonstances et le manque de matériel, l'enfant ne peut pas suivre une aérosolthérapie ", est insuffisamment circonstancié et n'est pas de nature à démontrer l'impossibilité de bénéficier d'un traitement approprié en Algérie ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le jeuneC..., inscrit à l'école maternelle depuis septembre 2013, ne pourrait poursuivre sa scolarité en Algérie dans des conditions satisfaisantes ; que, dans ces conditions, M. et Mme B... se trouvant tous deux en situation irrégulière sur le territoire français et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans le pays d'origine, les décisions contestées n'ont pas porté à l'intérêt supérieur de l'enfant de M. et Mme B... une atteinte contraire aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de police a entaché les décisions contestées d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation de leur enfant, notamment au regard de sa prise en charge médicale et scolaire, alors même que l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police de Paris, du 25 février 2013, n'a pas été produit devant le tribunal, en dépit de ce qu'annonçait le mémoire en défense ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que les premiers juges ont précisé, aux points 2 et 3 du jugement attaqué, les dispositions et stipulations sur lesquels se sont respectivement fondés M. et Mme B...pour solliciter des titres de séjour, ainsi que cela ressort des demandes déposées par les intéressés auprès des services préfectoraux les 7 janvier et 5 avril 2013 et versées au débat par le préfet de police, avant de mentionner, au point 5 du jugement, que Mme B... n'a pas fondé sa demande sur les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que ces mentions du jugement ne révélant aucune contradiction dans ses motifs, le moyen tiré de cette contradiction ne peut qu'être écarté comme manquant en fait ;

12. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

13. Considérant que M. et Mme B...font valoir qu'ils résident depuis novembre 2008 en France, où séjournent également la mère de Mme B..., qui les héberge, ainsi que ses frères et soeurs et qu'ils sont insérés socialement et professionnellement ; que les requérants se prévalent également de l'état de santé de leur enfantC..., qui nécessiterait un suivi médical et la mise en place d'un accueil individualisé à l'école ; que, toutefois, les requérants ne démontrent pas être dépourvus d'attaches familiales en Algérie, où résident les parents de M. B..., ainsi que sa fratrie, et où ils ont vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-cinq et vingt-deux ans ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 8 ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le jeuneC..., inscrit à l'école maternelle depuis septembre 2013, ne pourrait poursuivre sa scolarité en Algérie ni qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement médical approprié dans ce pays ; que, dans ces conditions, les décisions contestées n'ont pas porté au droit de M. et Mme B...au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; que, par suite, ces décisions n'ont méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien précité ;

14. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions contestées sur la situation personnelle des intéressés ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Mme E...F..., épouseB..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police

Délibéré après l'audience du 5 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Dalle, président,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

- Mme Versol, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 mars 2015 .

Le rapporteur,

F. VERSOL Le président,

D. DALLELe greffier,

C. BUOT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02390


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02390
Date de la décision : 19/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DALLE
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : LENDREVIE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-03-19;14pa02390 ?
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