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09/04/2015 | FRANCE | N°14PA02973

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 09 avril 2015, 14PA02973


Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2014, présentée pour M. D...C...et Mme A...C..., demeurant..., par Me Abrassart ; M. et Mme C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221204/7-2 du 9 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif s'est déclaré incompétent pour statuer sur leur demande de condamnation de l'Etat à leur verser une indemnité de 421 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a accepté de collaborer avec les autorités norvégiennes sur le fondement de la conven

tion de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèveme...

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2014, présentée pour M. D...C...et Mme A...C..., demeurant..., par Me Abrassart ; M. et Mme C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221204/7-2 du 9 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif s'est déclaré incompétent pour statuer sur leur demande de condamnation de l'Etat à leur verser une indemnité de 421 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a accepté de collaborer avec les autorités norvégiennes sur le fondement de la convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfant en vue d'assurer le retour immédiat de leur petit-fils en Norvège ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser une indemnité de 421 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a accepté de collaborer avec les autorités norvégiennes sur le fondement de la convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfant en vue d'assurer le retour immédiat de leur petit-fils en Norvège ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Les requérants soutiennent que :

- le juge administratif est compétent ;

- la responsabilité de l'Etat est engagée pour faute à raison des illégalités dont est entachée la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a accepté de collaborer avec les autorités norvégiennes sur le fondement de la convention de La Haye du 25 octobre 1980 en vue d'assurer le retour immédiat de leur petit-fils en Norvège ;

- cette décision est irrégulière dès lors qu'elle ne leur a pas été notifiée ni même communiquée ;

- elle méconnaît la loi du 11 juillet 1979 dès lors qu'elle n'est pas motivée ;

- elle est intervenue en méconnaissance du principe du contradictoire et les droits de la défense ;

- elle est intervenue sur une procédure irrégulière en méconnaissance des règles de saisine prévues par la convention de La Haye, sur le fondement de simples échanges verbaux entre ambassades et sans que n'aient été produits ni le formulaire obligatoire ni de pièce légalisée, alors qu'aucun document n'attestait de la séparation des époux B...depuis plus de deux ans et qu'aucune décision de justice n'était produite quant au divorce des époux et à la garde de l'enfant ;

- le garde des sceaux, ministre de la justice, ne pouvait légalement estimer que le déplacement de l'enfant en France était illicite au sens de la convention de La Haye dès lors que le couple n'était pas séparé en mai 2001 et disposait d'un domicile à Paris et d'un autre en Norvège comme le permet le code civil, que la loi norvégienne autorise en outre les déplacements de courte durée sans l'accord de l'autre parent et qu'aucune procédure judiciaire de divorce ou relative au droit de garde n'avait été seulement engagée ;

- cette décision porte atteinte à l'honneur et aux droits des membres de la famille, qui ont été accusés à tort d'enlèvement et sont privés de la garde de l'enfant, a influencé toutes les décisions de justice intervenues ultérieurement en leur défaveur, fait obstacle à toute nouvelle action en justice et a permis au père de l'enfant de s'octroyer tous les droits ; elle est ainsi à l'origine d'un préjudice financier lié aux frais de procédure et de visite à leur petit-fils ainsi que de troubles dans leurs conditions d'existence et d'un préjudice moral particulièrement important ;

Vu les observations, enregistrées le 15 janvier 2015, présentées par le ministre des affaires étrangères et du développement international ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2015, présenté par la garde des sceaux, ministre de la justice, qui conclut au rejet de la requête ;

La ministre fait valoir que :

- à titre principal, que la demande des requérants relève du juge judiciaire ;

- à titre subsidiaire que leur demande n'est pas fondée ; qu'en effet, le courrier du ministre des affaires étrangères en date du 13 août 2001, qui fait état d'une simple demande du ministre de la justice de mise en application de la convention et non d'une décision de sa part, ne relève pas du champ d'application de la loi du 11 juillet 1979 ; que Mme C...épouse B...a pu faire valoir sa position tout au long de la procédure judiciaire ; qu'en sa qualité d'autorité centrale au sens de la convention du 25 octobre 1980, il lui appartient de faire une mise en oeuvre loyale de la procédure organisée mais il ne lui appartient pas d'apprécier le caractère illicite ou non du déplacement d'un enfant, qualification que seule l'autorité judiciaire peut opérer ; qu'en l'espèce, le bien-fondé de la mise en oeuvre de la convention de La Haye a été reconnu ultérieurement par l'autorité judiciaire, dans une décision du juge des affaires familiales du Tribunal de grande instance de Paris du 21 janvier 2002 confirmée par la Cour d'appel de Paris le 6 juin 2002 ; qu'enfin, les requérants ne justifient pas du lien de causalité direct et certain entre la décision litigieuse et les préjudices dont ils demandent réparation ;

Vu les observations, enregistrées le 2 février 2015, présentées par le Premier ministre qui s'associe aux observations présentées par la garde des sceaux, ministre de la justice ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 6 mars 2015, présenté pour M. et MmeC..., qui maintiennent leurs conclusions et leurs moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants signée à La Haye le 25 octobre 1980 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 2015 :

- le rapport de Mme Chavrier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Roussel, rapporteur public,

- les observations de MmeC...,

- et les observations de Me Abrassart, avocat de M. et MmeC... ;

Vu la note en délibérée communiquée par M et Mme C...le 27 mars 2015 ;

1. Considérant que M. et Mme C...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à leur verser la somme de 421 000 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de l'illégalité fautive de la décision par laquelle le ministre de la justice a accepté de coopérer avec les autorités norvégiennes en vue du retour immédiat de leur petit-fils en Norvège, sur le fondement de la convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants ; que par un jugement en date du 9 mai 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que les époux C...relève régulièrement appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en mai 2001, les autorités norvégiennes ont, aux fins de mise en oeuvre de la convention sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants signée à La Haye le 25 octobre 1980, transmis aux autorités françaises la demande présentée par M.B..., ressortissant norvégien, tendant au retour en Norvège de son filsG..., emmené en France par sa mère, Mme F...C... ; que le ministre de la justice, en sa qualité d'autorité centrale désignée par la France pour cette convention, a saisi le parquet de Paris de la situation du jeune G...B... ; que par une ordonnance du 21 janvier 2002 rendue sur la requête introduite le 16 novembre 2001 par le procureur de la République du Tribunal de grande instance de Paris, le juge aux affaires familiales a constaté le retour effectif de l'enfant en Norvège et a par conséquent constaté qu'il n'y avait plus lieu d'ordonner le retour immédiat de l'enfant " déplacé pourtant illicitement (...) de Norvège où il avait sa résidence habituelle (...) jusqu'en France " ;

3. Considérant que ni la décision des autorités françaises, révélée par une note verbale du ministre des affaires étrangères adressée à l'ambassadeur de Norvège, d'accepter la demande de coopération des autorités norvégiennes ni la décision par laquelle le ministre de la justice a transmis au procureur de la République la demande tendant à ce que soit ordonné le retour en Norvège du petit-fils des requérants ne sont dissociables de la procédure judiciaire ultérieurement mise en oeuvre ; que, par suite, il n'appartient pas à la juridiction administrative de connaître de l'action en responsabilité fondée sur les illégalités fautives dont seraient entachées ces décisions ; que c'est donc à bon droit que le Tribunal administratif de Paris a jugé que les conclusions à fin d'indemnisation présentées par M. et Mme C...devaient dès lors être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font par voie de conséquence obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., à M. D...C..., au garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre des affaires étrangères et du développement international et au Premier ministre.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Chavrier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 avril 2015.

Le rapporteur,

A-L. CHAVRIERLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

M. E...

La République mande et ordonne au Premier ministre en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 14PA02973


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02973
Date de la décision : 09/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Anne Laure CHAVRIER
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : DESBRUERES-ABRASSART

Origine de la décision
Date de l'import : 22/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-04-09;14pa02973 ?
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