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12/05/2015 | FRANCE | N°14PA03897

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 12 mai 2015, 14PA03897


Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2014, présentée pour M. A... D..., demeurant au..., par Me C... ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1317824/5-2 du 3 juillet 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 septembre 2013 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant mention " vie privée et familiale

" dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°)...

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2014, présentée pour M. A... D..., demeurant au..., par Me C... ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1317824/5-2 du 3 juillet 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 septembre 2013 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté litigieux :

- est insuffisamment motivé, s'agissant notamment de sa vie familiale ;

- est entaché d'une d'erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où il ne constitue plus une menace à l'ordre public et est en cours de réinsertion ;

- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale car toute sa famille vit en France ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 25 septembre 2014, présenté pour M. D... par Me B...; il conclut aux mêmes fins que dans son mémoire introductif et fait en outre valoir que :

- il a toujours vécu en France depuis l'âge d'un an et ses quatre frères et soeurs sont de nationalité française et résident en France ;

- il n'a fait l'objet ni d'une expulsion, ni d'une interdiction du territoire, et ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire ;

-il n'a aucune attache en Tunisie, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2015, présenté par le préfet de police qui conclut au rejet de la requête en faisant valoir que :

- la décision est suffisamment motivée en fait et en droit ;

- l'intéressé a été condamné à de multiples reprises entre 2003 et 2007 et est un délinquant d'habitude coupable de faits d'une extrême gravité ;

- s'il invoque la présence d'une concubine, il ne l'établit pas davantage que les liens de famille allégués sur le territoire français ;

- il ne démontre aucune intégration en France où il est sans logement personnel, sans ressources et sans activité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2015 le rapport de Mme Terrasse, président assesseur ;

1. Considérant que M.D..., ressortissant tunisien né le 5 janvier 1980, est entré en France en septembre 1981 ; que par arrêté du 5 septembre 2013, le préfet de police a opposé un refus à sa demande de délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ; que

M. D...relève appel du jugement du 3 juillet 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué, par lequel le préfet de police a refusé de délivrer à M. D...le titre de séjour sollicité, vise les textes dont il fait application et mentionne les éléments de fait, dont ceux relatifs à sa situation familiale, sur lesquels il se fonde ; qu'il satisfait ainsi aux dispositions précitées des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

5. Considérant que M. D...soutient que la décision est entachée d'erreur d'appréciation au motif qu'il ne constitue plus une menace à l'ordre public compte tenu de sa volonté de réinsertion sociale depuis sa sortie de prison ; qu'il a toutefois fait l'objet de multiples condamnations, ayant conduit à son incarcération du 7 février 2003 au 9 novembre 2011, pour des faits portant gravement atteinte à l'ordre public ; qu'il a notamment été condamné à sept ans de réclusion criminelle par un arrêt de la cour d'assises d'Evry statuant en appel, en date du

15 juin 2007, pour des faits de viol sur un mineur de quinze ans ; que, dès lors, eu égard à la gravité et la nature des faits reprochés, le préfet de police n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que la présence de M. D...sur le territoire national constituait une menace à l'ordre public ;

6. Considérant que M. D...soutient que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il se prévaut de la présence régulière en France de ses parents et de ses deux soeurs, dont une a la nationalité française, d'une présence continue en France depuis 1981, d'une relation forte et durable avec sa concubine, d'une absence d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine et d'un début de réinsertion professionnelle ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé n'établit ni les liens familiaux qu'il invoque et à plus forte raison leur maintien durant son incarcération, ni la continuité de son séjour sur le territoire national depuis 1981, les années de détention ne pouvant être prises en compte, ni ses liens de concubinage, non mentionnés dans sa " feuille de salle " ; qu'il ne démontre pas plus la réalité d'une insertion sociale en France où il ne dispose ni d'un logement autonome, ni de revenus, ni d'une activité professionnelle ; que, dès lors, eu égard à la particulière gravité des faits reprochés à M.D..., célibataire et sans charge de famille, l'arrêté attaqué n'a pas porté une atteinte disproportionnée aux buts en vue duquel il a été pris ; que le moyen tiré de la violation du droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale doit, par suite, être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant le présent arrêt, qui rejette les conclusions présentées par M. D... en vue de l'annulation de l'arrêté contesté n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions ci-dessus analysées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 16 avril 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Vettraino, président de chambre,

Mme Terrasse, président assesseur,

M. Romnicianu, premier conseiller,

Lu en audience publique le 12 mai 2015.

Le rapporteur,

M. TERRASSELe président,

M. VETTRAINO

Le greffier,

E. CLEMENT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11PA00434

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N° 14PA03897


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03897
Date de la décision : 12/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Marianne TERRASSE
Rapporteur public ?: Mme BONNEAU-MATHELOT
Avocat(s) : BENANE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-12;14pa03897 ?
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