La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/2015 | FRANCE | N°15PA01156

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 26 novembre 2015, 15PA01156


Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2015, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Rivière Jenovacki, avocat à la Cour ; Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1422234/3-3 du 17 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 septembre 2014 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'

enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai...

Vu la requête, enregistrée le 19 mars 2015, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Rivière Jenovacki, avocat à la Cour ; Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1422234/3-3 du 17 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 septembre 2014 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 15 euros par jour de retard ou de procéder à un nouvel examen de sa situation, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le préfet de police a entaché son arrêté d'une erreur de fait dès lors qu'elle établit résider habituellement en France depuis plus de 10 ans et qu'elle est bien intégrée à la société française dont elle a appris la langue ;

- le préfet de police a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il n'a pris que partiellement en compte sa situation familiale ; elle séjourne depuis 2003 en France avec son fils, est divorcée depuis de longues années et n'a plus que son père en Serbie ; son fils, âgé de 27 ans, étudie le français à l'université de Belgrade et souhaite faire ses études en France ; elle vit chez sa soeur, qui réside régulièrement en France avec son mari et ses enfants ; elle a noué des liens particuliers en France ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 12 novembre 2015 :

- le rapport de Mme Coiffet, ,

- et les observations de Me Bulajic, avocat de MmeB... ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante serbe, est entrée en France le 16 octobre 2003 selon ses déclarations ; qu'elle a, le 8 juillet 2014, sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 8 septembre 2014, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite ; que Mme B... fait appel du jugement du 17 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

3. Considérant que MmeB..., pour établir sa résidence habituelle en France depuis l'année 2004, a produit pour la première fois en appel, au titre de chacune des dix années concernées, de nombreux documents médicaux, des décisions d'admission à l'aide médicale d'Etat ou des attestations de couverture maladie universelle, des demandes signées de carte de solidarité transport ou la carte de transport elle-même, des documents bancaires ainsi que des avis d'imposition mentionnant l'existence de revenus ; que ces documents, dont l'authenticité n'est pas remise en cause par le préfet de police, qui n'a pas produit de mémoire en défense, sont suffisamment nombreux et diversifiés pour permettre de regarder la requérante comme justifiant du caractère habituel de sa résidence en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté du 8 septembre 2014 ; que, par suite, le préfet de police devait saisir la commission du titre de séjour avant de statuer sur la demande d'admission exceptionnelle au séjour de MmeB... ; que la requérante est dès lors fondée à soutenir qu'en l'absence de saisine de cette commission, la décision de refus de titre de séjour qui lui a été opposée a été prise au terme d'une procédure irrégulière ; que cette décision doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 septembre 2014 du préfet de police ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

6. Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par MmeB..., n'implique cependant pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé ; que, par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce que lui soit délivré un titre de séjour doivent être rejetées ; qu'il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de police de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressée dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par MmeB... ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris du 17 février 2015, ensemble l'arrêté susvisé du 8 septembre 2014 du préfet de police, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de titre de séjour de Mme B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2015.

Le rapporteur,

V. COIFFETLe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

L. GUINET La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 15PA01156


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01156
Date de la décision : 26/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : RIVIERE JENOVACKI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-11-26;15pa01156 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award