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08/04/2016 | FRANCE | N°14PA03027

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 08 avril 2016, 14PA03027


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...E...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006 pour un montant de 56 358 euros en droits et de 48 467 euros de pénalités.

Par un jugement n° 1205977-7 du 15 mai 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentair

e, enregistrés les 11 juillet 2014 et

29 janvier 2015, M. et Mme E..., représentés par la Sela...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...E...ont demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006 pour un montant de 56 358 euros en droits et de 48 467 euros de pénalités.

Par un jugement n° 1205977-7 du 15 mai 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 juillet 2014 et

29 janvier 2015, M. et Mme E..., représentés par la Selarl cabinet Chandellier-B..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205977-7 du 15 mai 2014 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge et le remboursement des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- en l'absence de tout " traçabilité " entre le rôle homologué et l'extrait de rôle définitif, ils ne peuvent être regardés comme inscrits sur le rôle 929 ; le rôle 929 est dépourvu de caractère exécutoire à leur égard ; la mise en recouvrement des impositions à leur encontre est donc dépourvue de fondement et est donc irrégulière ;

- en l'absence de désinvestissement des sommes en litige au sein de la société ADIGE et dont le montant a été porté à l'actif du bilan, il ne peut exister de distribution ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête par des moyens contraires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la réclamation préalable ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser, président-assesseur

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., de la SELARL Chandellier-B..., avocat de

M. et Mme E....

1. Considérant que la SA Adige, dont M. E...est président et principal associé et qui a pour activité la construction de bâtiments, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2006 au 30 juin 2007 à l'issue de laquelle l'administration a procédé à la réintégration dans ses résultats de dépenses considérées comme non engagées dans l'intérêt de l'exploitation ; que ces sommes ont été considérées comme des revenus distribués, en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, et ont à ce titre été soumises à l'impôt sur le revenu entre les mains de M. et MmeE... ; qu'il en est résulté des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre de l'année 2006 notifiées aux requérants par proposition de rectification du 30 septembre 2008 selon la procédure de rectification contradictoire de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et mises en recouvrement le

30 septembre 2009 ; que M. et Mme E...relèvent appel du jugement en date 15 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande en décharge de ces impositions supplémentaires d'un montant de 56 358 euros en droits et 48 467 euros de pénalités ;

Sur la régularité de la procédure :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1658 du code général des impôts : " Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet ou d'avis de mise en recouvrement. " ; qu'aux termes de l'article 1659 du même code : " La date de mise en recouvrement des rôles est fixée par l'autorité compétente pour les homologuer en application de l'article 1658 en accord avec le directeur départemental des finances publiques. Cette date est indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables. " ; qu'aux termes de l'article 1682 dudit code : " Le rôle, régulièrement mis en recouvrement, est exécutoire non seulement contre le contribuable qui y est inscrit, mais contre ses représentants ou ayants cause. " ; qu'aux termes de l'article L. 104 du livre des procédures fiscales : " Les comptables chargés du recouvrement des impôts directs délivrent aux personnes qui en font la demande soit un extrait de rôle ou un certificat de non-inscription au rôle, soit une copie de l'avis de mise en recouvrement, selon le comptable compétent pour recouvrer l'impôt (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 252 A du même livre : " Constituent des titres exécutoires les arrêtés, états, rôles, avis de mise en recouvrement, titres de perception ou de recettes que l'Etat, les collectivités territoriales ou les établissements publics dotés d'un comptable public délivrent pour le recouvrement des recettes de toute nature qu'ils sont habilités à recevoir. " ; qu'aux termes de l'article L. 253 dudit livre, dans sa version applicable à l'année d'imposition en litige : " Un avis d'imposition est adressé sous pli fermé à tout contribuable inscrit au rôle des impôts directs dans les conditions prévues aux articles 1658 à 1659 A du code général des impôts. / L'avis d'imposition mentionne le total par nature d'impôt des sommes à acquitter, les conditions d'exigibilité, la date de mise en recouvrement et la date limite de paiement. " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par lettre du 3 février 2012, la comptable du pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne a communiqué aux époux E...la décision d'homologation, datée du 15 octobre 2011, du rôle n° 929, pour les impositions supplémentaires d'impôt sur le revenu mises en recouvrement le 31 octobre 2011 à l'encontre des contribuables relevant du Service des impôts des particuliers de la commune de Nemours et du Pôle de recouvrement spécialisé de Seine-et-Marne ; qu'en réponse à leur demande, un extrait de ce rôle leur a été communiqué par lettre du 23 février 2012, conformément aux dispositions de l'article L. 204 du livre des procédures fiscales ; que l'administration a, par ailleurs, produit en appel la page 3 de la liste des contribuables imposés au rôle 929 sur laquelle figure la cotisation en litige d'impôt sur le revenu des épouxE..., ainsi que leur nom ; que M. et Mme E... qui ne contestent pas l'homologation du rôle 929, se bornent à soutenir qu'aucun lien n'est établi entre l'extrait de rôle qui leur a été communiqué et le rôle 929 ; que, toutefois, l'extrait de rôle qui a été communiqué à

M. et Mme E...a été délivré avec la mention " pour extrait conforme " par le comptable du

Pôle Recouvrement Spécialisé ; que cette mention prévaut à moins qu'il ne soit établi par des faits précis qu'elle soit inexacte ; qu'au surplus, l'absence de lien alléguée entre l'extrait de rôle délivré et le rôle 929 qui ne peut être communiqué aux contribuables, ainsi qu'il résulte des dispositions précitées, mais dont l'administration a néanmoins produit une copie partielle, ne ressort pas des pièces du dossier ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il n'est pas établi que

M. et Mme E...figuraient sur le rôle 929 et en conséquence, de l'irrégularité de la procédure, ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. " ; qu'aux termes du 1 de

l'article 109 du même code : " Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. " ; que l'administration soutient sans être contredite que les rehaussements notifiés à M. et Mme E...par proposition de rectification du

30 septembre 2008 n'ont pas été contestés dans les délais légaux ; que, par suite, il appartient aux requérants de verser au dossier soumis au juge tous les éléments de nature à étayer la contestation des impositions en litige ;

6. Considérant que suite à la vérification de comptabilité de la SA Adige, dont M. E... est gérant et principal associé, au titre de la période du 1er janvier 2006 au 30 juin 2007, certaines dépenses ont été considérées comme non engagées dans l'intérêt de l'exploitation et notamment des dépenses, désormais seules en litige, facturées par la SA Larressat à la société Adige relatives au chantier de l'abbaye royale d'Yerres enregistrées dans un compte de charges pour un montant total hors taxes de 100 850,43 euros ; que l'administration ayant retenu que ces factures ne correspondaient pas à des prestations effectivement réalisées au profit de la SA Adige, une rectification correspondante à l'impôt sur les sociétés a été notifiée au titre de l'exercice 2006 sur le fondement du 1° du 1 de l'article 39 précité du code général des impôts et ces rehaussements, considérés pour leur montant comme des revenus distribués, ont été taxés à l'impôt sur le revenu entre les mains de M. et Mme E...sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du même code ; que pour soutenir que les dépenses en litige ont été comptabilisées à l'actif du bilan de la

SA Adige au 31 décembre 2006 dès lors qu'elles ont servi à acquérir un bien immobilier à Chitry-le-Fort, M. et Mme E...se fondent sur les écritures comptables qui ont été transcrites dans une déclaration rectificative déposée le 25 septembre 2007, postérieurement à la clôture des comptes et à l'expiration du délai de déclaration et en outre postérieurement à l'envoi de l'avis de vérification et à la première intervention sur place effectuée le 20 septembre 2007 ; que lors de la première vérification de comptabilité, le vérificateur a constaté la comptabilisation dans les écritures de l'année 2006 de factures émises au cours de cette année par l'entreprise Larressat pour des travaux réalisés sur un bien immobilier pour lesquels il a été établi par la brigade de contrôle et de recherche de Pau, dans le cadre d'une procédure de contrôle de facturation exercée sur le fondement des articles L. 80 F à L. 80 H du livre des procédures fiscales, que lesdites factures ne correspondaient pas à des travaux effectivement réalisés au profit de la société mais à des travaux réalisés sur un bien immobilier appartenant à M.F..., qui est le beau-frère de M.E... ; que M. E...a reconnu avoir lui-même demandé à la société Larressat d'adresser les factures en cause à la

SA Adige avec comme libellé "travaux effectués sur l'abbaye royale d'Yerres - travaux de maçonnerie" ; que, par ailleurs, à la suite d'une deuxième vérification de comptabilité au titre de l'année 2006, le service vérificateur a constaté que les livres comptables présentés pour

l'exercice 2006 n'étaient pas ceux qui avaient été soumis à son examen lors de la précédente vérification, lesquels avaient été détruits ; que les factures fournisseurs relevées au cours du premier contrôle n'apparaissaient plus dans les nouveaux livres de l'exercice 2006 ; que les services fiscaux ont d'ailleurs dressé un procès-verbal que M. E... a refusé de signer en faisant valoir que les documents non conservés n'étaient que " des tirages informatiques provisoires et sans valeur " ; qu'il a toutefois lui-même précisé que " C'[était] en raison de ces débats familiaux que l'achat a[vait] pris du retard, et que ces sommes [avaient] été portées au 31 décembre 2006 en acomptes sur achat d'immobilisation, les actes d'acquisition par Adige ayant été passés le 18 octobre 2007 devant Me D...A..., notaire à Chablis. Ces dépenses se rattach[ai]ent donc à une opération d'acquisition d'actif par la société Adige, opération sur laquelle l'accord des parties remonte à 2006. " ; qu'alors qu'il supporte la charge de la preuve, M. E... n'établit pas, en tout état de cause, l'accord des parties qu'il invoque ; qu'ainsi, au 31 décembre 2006, il n'y avait pas encore d'acquisition de biens immobiliers justifiant leur inscription à l'actif du bilan de la société Adige ; que les faits allégués d'une donation familiale, d'une acquisition dans un premier temps des biens par M. E... pour être revendus ensuite à la société et les difficultés rencontrées pour la finalisation de la donation familiale, alors que les actes notariés d'acquisition sont postérieurs à l'année 2006, ne permettent pas de retenir, dès lors qu'aucune erreur comptable n'est invoquée, que l'administration aurait dû prendre en compte la déclaration rectificative déposée hors délai de déclaration ; que l'assemblée générale invalidant les comptes ayant servi de base à la déclaration initiale de l'année 2006, s'est tenue le 29 juin 2007, après l'audition du 26 juin 2007 du responsable de la société Larressat dans le cadre de l'enquête diligentée et que l'assemblée générale approuvant les comptes rectifiés a eu lieu le 10 octobre 2007, soit après le début des opérations de contrôle sur place ; que les travaux facturés par la société Larressat ont été, aux dires de son responsable, réalisés dans la commune d'Orsanco située dans les Pyrénées-Atlantiques et non à Chitry-le-Fort dans l'Yonne, où sont situés les biens acquis par la société Adige ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments et nonobstant l'attestation du commissaire aux comptes produite aux débats, délivrée au vu de la nouvelle liasse fiscale,

M. et Mme E...ne rapportent pas la preuve de l'absence de désinvestissement des sommes en litige, à la clôture des comptes, ni par suite de l'absence de revenus distribués mis à la charge de

M. E...en sa qualité de maître de l'affaire ;

En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale :

7. Considérant que M. et Mme E...se prévalent de l'instruction fiscale

BOFIP BOI-RPPM-RCM-10-20-20-50-20120912 § 160 qui prévoit " Bien entendu, les bénéfices correspondant aux rehaussements opérés par l'administration ne constituent des revenus mobiliers que s'ils ont été distribués, c'est à dire dans la mesure où ils ne sont pas demeurés investis dans l'entreprise. " ; que toutefois cette doctrine ne comporte pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle exposée au point 6 pouvant être opposée à l'administration fiscale sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... E...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Cheylan, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 avril 2016.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT Le greffier,

A-L. PINTEAU

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA03027


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03027
Date de la décision : 08/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SELARL CHANDELLIER-CORBEL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-04-08;14pa03027 ?
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