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10/05/2016 | FRANCE | N°15PA02659

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 10 mai 2016, 15PA02659


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1500793/6-2 du 2 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé cet arrêté du 22 décembre 2014, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. C... un titre de s

éjour portant la mention " salarié " dans un délai de trois mois.

Procédure devant la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1500793/6-2 du 2 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé cet arrêté du 22 décembre 2014, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai de trois mois.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif enregistrés respectivement les 6 juillet et 28 août 2015, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500793/6-2 du 2 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal.

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'arrêté contesté était entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2016 et complété par des pièces nouvelles enregistrées le 4 avril 2016, M. C..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun moyen d'appel n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 publié par le décret n° 94-203 du 4 mars 1994 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties on été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auvray ;

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

1. Considérant que, par un arrêté du 22 décembre 2014, le préfet de police a refusé de délivrer à M. C..., ressortissant marocain né le 17 juillet 1978 à Tafouralt, un titre de séjour que l'intéressé avait sollicité sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord

franco-marocain du 9 octobre 1987 et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

2. Considérant qu'après avoir relevé que M. C... produisait de très nombreux bulletins de paie et contrats de travail en qualité de ferrailleur au moins depuis l'année 2010, des relevés de compte bancaire depuis 2006, des avis d'imposition, un grand nombre de feuilles de soins et de factures et que l'intéressé faisait valoir sa bonne intégration sociale et professionnelle, les premiers juges ont estimé que l'arrêté contesté du 22 décembre 2014 était entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

3. Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. C... et leurs deux enfants mineurs vivent au Maroc ; qu'en outre, si l'intimé produit de nombreux bulletins de paie ou des contrats de travail intérimaire, le préfet de police établit que l'intéressé a travaillé sous une fausse carte de résident, notamment auprès de la société de travail intérimaire Sovitrat, tandis qu'il ressort des pièces du dossier que M. C... s'est présenté comme étant de nationalité française auprès de la société Leader Interim ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif tiré de l'erreur manifeste d'appréciation pour annuler l'arrêté contesté édicté par le préfet de police ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de l'accord

franco-marocain, entré en vigueur le 1er janvier 1994 : " Les ressortissants marocains résidant en France et titulaires, à la date d'entrée en vigueur du présent Accord, d'un titre de séjour dont la durée de validité est égale ou supérieure à trois ans, bénéficient de plein droit, à l'expiration du titre qu'ils détiennent, d'une carte de résident valable dix ans (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de cet accord : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent Accord reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. Après trois ans de séjour continu en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent pourront obtenir un titre de séjour de dix ans (...) " ;

7. Considérant que si M. C... a été regardé par le préfet de police comme ayant demandé son admission au séjour notamment sur le fondement des stipulations susrappelées de l'article 3 de l'accord franco-marocain, l'intéressé n'invoque aucun moyen susceptible de se rattacher à ces stipulations ; qu'en tout état de cause, comme le relève d'ailleurs l'arrêté préfectoral contesté, M. C... ne présente pas de contrat de travail visé par les services de la main-d'oeuvre étrangère ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au

1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

9. Considérant qu'en se bornant à se prévaloir de l'ancienneté de son séjour en France, où il déclare être arrivé en 2005 et de ce qu'il occupe un emploi de ferrailleur, de surcroît de manière intermittente et, au moins au sein de deux entreprises, sous couvert soit d'une fausse carte de résident, soit d'une fausse carte nationale d'identité, M. C... ne peut être regardé comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code précité, du volet " salarié " duquel il ne peut du reste utilement se prévaloir en sa qualité de ressortissant marocain, les conditions de délivrance des titres de séjour portant la mention " salarié " étant exclusivement régies par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

11. Considérant que si M. C...soutient que l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que doit être écarté le moyen tiré de ce que cet arrêté porterait au droit de l'intimé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise, étant en outre précisé que M. C... est entré en France au plus tôt à l'âge de 27 ans et qu'il a conservé des attaches familiales au Maroc, où vivent non seulement son épouse et leurs deux enfants mineurs, mais également d'autres membres de sa fratrie ; que si l'intimé soutient en outre qu'il vit chez son père qui, malade, a besoin de son assistance, il ne l'établit en tout état de cause pas ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté préfectoral serait entaché d'erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la vie personnelle de M. C... doit, pour les mêmes motifs, être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 22 décembre 2014, lui a enjoint de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " salarié " et a mis à sa charge le versement à ce dernier d'une somme de 1 000 euros ; que les conclusions de M. C... tendant à ce que la Cour mette à la charge de l'Etat, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, ne peuvent par suite qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1500793/6-2 du 2 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C.... Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2016 à laquelle siégeaient :

M. Auvray, président de la formation de jugement,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 10 mai 2016.

L'assesseur le plus ancien,

A. MIELNIK-MEDDAH

Le président-rapporteur,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA02659


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02659
Date de la décision : 10/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Brice AUVRAY
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : TOUBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-05-10;15pa02659 ?
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