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13/05/2016 | FRANCE | N°15PA01244

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 13 mai 2016, 15PA01244


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Provins a demandé au tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de prescrire une expertise tendant à déterminer les causes des désordres apparus sur le dallage du parvis du centre culturel et sportif de Saint-Ayoul.

Par une ordonnance n° 1306786 du 19 novembre 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a confié à M. E...le soin de réaliser cette expertise et désigné la commune de Provins, la société

Pagot, la SARL Doazan-Hirschberger et la Société des Carrières d'Etrochey (SCE) co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Provins a demandé au tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de prescrire une expertise tendant à déterminer les causes des désordres apparus sur le dallage du parvis du centre culturel et sportif de Saint-Ayoul.

Par une ordonnance n° 1306786 du 19 novembre 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a confié à M. E...le soin de réaliser cette expertise et désigné la commune de Provins, la société Pagot, la SARL Doazan-Hirschberger et la Société des Carrières d'Etrochey (SCE) comme étant les parties concernées par cette expertise.

Par une ordonnance n° 1306786 du 6 mars 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a étendu les opérations d'expertise à la société Carrières et

Marbrerie d'Etrochey ainsi qu'à Me F...et MeH..., pris en leur qualité respective de mandataire liquidateur et d'administrateur judiciaire de la SCE.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 mars et 18 septembre 2015, la société par actions simplifiées Carrières et Marbreries d'Etrochey (SAS CME), représentée par la SCP Desfilis et McGowan, demande à la Cour d'annuler cette ordonnance n° 1306786 du

6 mars 2015.

La SAS CME soutient que :

- le juge des référés, en ne lui communiquant pas la demande d'extension d'expertise, a méconnu la procédure contradictoire prévue par l'article R. 532-4 du code de justice administrative et entaché l'ordonnance attaquée d'irrégularité ;

- l'ordonnance attaquée est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- dès lors qu'elle n'a pas repris le passif de la SCE mais seulement certains de ses actifs, l'extension des opérations d'expertise à son égard n'est pas utile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2015, la commune de Provins, représentée par la SELARL Landot et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SAS CME le versement d'une somme de 3 500 euros en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Provins soutient que :

- le moyen tiré de ce que la SAS CME n'a pas repris le passif de la SCE mais seulement certains de ses actifs est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par la SAS CME ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2015, la société Pagot, représentée par la SELAS Chetivaux Simon, conclut au rejet de la requête.

La société Pagot soutient que :

- le moyen tiré de ce que la SAS CME n'a pas repris le passif de la SCE mais seulement certains de ses actifs est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par la SAS CME ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2015, la société Ecotech, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SAS CME le versement d'une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Ecotech soutient que :

- le moyen tiré de ce que la SAS CME n'a pas repris le passif de la SCE mais seulement certains de ses actifs est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par la SAS CME ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2015, la SARL Doazan-Hirschberger, représentée par MeJ..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SAS CME les dépens de l'instance.

La SARL Doazan-Hirschberger soutient que les moyens soulevés par la SAS CME ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- les observations de MeG..., pour la commune de Provins,

- et les observations de MeC..., pour la société Pagot ;

1. Considérant que, dans le cadre de la réalisation du centre culturel et sportif de

Saint-Ayoul, la commune de Provins a notamment confié le lot n°1, " VRD - Espaces verts " à un groupement conjoint composé des sociétés Pagot et Saint-Germain Paysage ; que, par une décision du 21 mars 2007, le maître d'ouvrage a prononcé la réception sans réserve de ce lot n° 1 avec effet au 29 septembre 2006 ; qu'au cours de l'hiver 2007-2008, des désordres sont apparus sur les dallages du parvis de ce centre ; que, les 23 février et 18 mai 2010, la commune de Provins a mis en demeure la société Pagot de procéder aux travaux de réfection afin de remédier à ces désordres ; que, le 17 mars 2011, cette société a informé la commune que le revêtement utilisé pour le dallage, la pierre d'Etrochey, fournie par la Société des Carrières d'Etrochey (SCE), lui avait été imposé par le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché et que la pose de ce revêtement, sans joints, avait été exécutée conformément au choix du maître d'oeuvre, l'atelier d'architecture et de paysage Doazan-Hirschberger ; que, saisi par la commune de Provins sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a, par une ordonnance du 19 novembre 2013, confié à M. E...le soin de réaliser une expertise tendant à déterminer les causes des désordres et a par ailleurs désigné la commune de Provins, la société Pagot, la SARL Doazan-Hirschberger et la SCE comme étant les parties concernées par cette expertise ; que, par une ordonnance du

2 avril 2014, cette expertise a été étendue, sur le fondement de l'article 532-3 du code de justice administrative, à la société Socotech, le contrôleur technique, à la société Ecotech, qui aurait réalisé le CCTP, et à l'assureur du maître d'oeuvre, la MAF Assurances ;

2. Considérant qu'en février 2015, M. E...a demandé que l'expertise soit étendue à la société par actions simplifiées Carrières et Marbreries d'Etrochey (SAS CME) qui serait, selon lui, venue aux droits de la SCE ; qu'à l'issue d'une réunion tenue le 4 mars 2015 sur le fondement de l'article R. 621-8-1 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a, par une ordonnance en date du 6 mars 2015, décidé d'étendre les opérations d'expertise à la SAS CME ainsi qu'à Me F...et MeH..., en leur qualité respective de mandataire liquidateur et d'administrateur judiciaire de la SCE ; que la

SAS CME relève appel de cette ordonnance en tant qu'elle a étendu l'expertise à son égard ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 532-3 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, à la demande de l'une des parties formée dans le délai de deux mois qui suit la première réunion d'expertise, ou à la demande de l'expert formée à tout moment, étendre l'expertise à des personnes autres que les parties initialement désignées par l'ordonnance, ou mettre hors de cause une ou plusieurs des parties ainsi désignées. / Il peut, dans les mêmes conditions, étendre la mission de l'expertise à l'examen de questions techniques qui se révélerait indispensable à la bonne exécution de cette mission, ou, à l'inverse, réduire l'étendue de la mission si certaines des recherches envisagées apparaissent inutiles " ; qu'aux termes de l'article R. 532-4 du même code : " Le juge des référés ne peut faire droit à la demande prévue au premier alinéa de l'article R. 532-3 qu'après avoir mis les parties et le cas échéant les personnes auxquelles l'expertise doit être étendue en mesure de présenter leurs observations sur l'utilité de l'extension ou de la réduction demandée / Il peut, s'il l'estime opportun, débattre des questions soulevées par cette demande lors de la séance prévue à l'article R. 621-8-1 " ; qu'aux termes de l'article R. 621-8-1 de ce code : " Pendant le déroulement des opérations d'expertise, le président de la juridiction peut organiser une ou plusieurs séances en vue de veiller au bon déroulement de ces opérations. A cette séance, peuvent notamment être examinées, à l'exclusion de tout point touchant au fond de l'expertise, les questions liées aux délais d'exécution, aux communications de pièces, au versement d'allocations provisionnelles ou, en matière de référés, à l'étendue de l'expertise. / Les parties et l'expert sont convoqués à la séance mentionnée à l'alinéa précédent, dans les conditions fixées à l'article R. 711-2. / Il est dressé un relevé des conclusions auxquelles ont conduit les débats. Ce relevé est communiqué aux parties et à l'expert, et versé au dossier (...) " ;

4. Considérant, en premier lieu, que si la SAS CME fait valoir qu'elle n'a pas été informée de la demande d'extension de l'expertise à son égard avant la séance du 4 mars 2015 organisée sur le fondement de l'article R. 621-8-1 du code de justice administrative, il ressort toutefois des pièces du dossier de première instance, et en particulier du relevé de conclusions de cette séance, que la société, qui était présente lors de la réunion du 4 mars 2015, a pu présenter toutes observations utiles à l'occasion des échanges effectués avec les autres parties, l'expert et le juge ; que, dans ces circonstances, elle n'est pas fondée à soutenir que l'ordonnance attaquée a été rendue en méconnaissance de la procédure contradictoire prévue à l'article R. 532-4 du code de justice administrative ;

5. Considérant, en second lieu, que si le juge des référés s'est borné, dans l'ordonnance attaquée, à faire état de l'utilité de la demande d'extension des opérations d'expertise à l'égard de la SAS CME et à mentionner le relevé de conclusions de la séance du 4 mars 2015, il a en revanche suffisamment motivé les raisons qui l'ont conduit à prononcer une telle extension dans le relevé de conclusions ; que l'ordonnance attaquée doit ainsi être regardée comme comportant une motivation par référence à ce relevé de conclusions ; que la SAS CME, à qui ce relevé a bien été communiqué, et qui en critique d'ailleurs certains motifs dans sa requête d'appel, n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'ordonnance attaquée serait entachée d'une insuffisance de motivation ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

6. Considérant qu'en application des dispositions des articles R. 532-1 et R. 532-3 du code de justice administrative, le juge des référés peut appeler en qualité de parties à une expertise, par la voie de la désignation initiale ou de l'extension, les personnes qui ne sont pas manifestement étrangères au litige susceptible d'être engagé devant le juge de l'action qui motive l'expertise ; que, par ailleurs, le juge du référé peut appeler à l'expertise en qualité de sachant toute personne susceptible d'apporter des éléments utiles à l'expert et dont la présence est de nature à éclairer ses travaux ;

7. Considérant, il est vrai, qu'il résulte de l'instruction que, par un jugement du

11 janvier 2011, le tribunal de commerce de Dijon a retenu le plan de cession proposé par les sociétés Uni-marbre et groupe Marbrek et autorisé la cession de la SCE à ces dernières sociétés et prononcé la liquidation judiciaire de cette société ; que le capital social de la société Carrières et marbreries de France est détenu par la société Marbrek à hauteur de 66 % et par la société

Uni-marbres à hauteur de 34 % ; que la SAS CME, dont le capital est détenu à 100 % par la

SAS Carrières et marbreries de France, a été créée le 16 mars 2011 et immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 29 mars 2011 ; que, le 4 mai 2011, la SCE a cédé à la SAS CME une partie de son fonds de commerce ; que si, en vertu de cette cession, le cessionnaire a notamment " pris en charge les engagements fournisseurs nécessaires à l'activité reprise et contractés par la société des carrière d'Etrochey pendant la période de redressement judiciaire et qui ont été réalisés et facturés " après le 12 janvier 2011 et " remboursé au redressement judicaire de la SCE les acomptes versés aux fournisseurs pour les commandes qui n'avaient pas été exécutées " au 12 janvier 2011, il ne résulte pas de l'instruction, et en particulier de

l'article 7.3. de l'acte de cession, que la SAS CME aurait repris des éléments de passif identifiés et, en particulier, des dettes concernant des commandes passées antérieurement au

12 janvier 2011 ; que, dès lors, si les désordres affectant les dalles du parvis du centre culturel et sportif de Saint-Ayoul sont susceptibles, le cas échéant, au terme des opérations d'expertise, de révéler, même partiellement, la responsabilité de la SCE en sa qualité de fournisseur des pierres, et si certains des acteurs ayant participé à l'exécution du lot n°1 sont susceptibles de rechercher la responsabilité de la SCE à ce titre, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que la responsabilité de la SAS CME qui n'a, selon les éléments dont dispose la Cour, pas repris le passif de la SCE, pourra être recherchée à raison des désordres en cause ;

8. Considérant, toutefois, que, selon les constats provisoires opérés par l'expert, " les pierres sinistrées posées " " ne correspondent pas aux pierres extraites pour la construction " et " il est vraisemblable que les pierres de teinte claire ont été extraites dans une fin de banc ou dans un banc de mauvaise qualité " et " ne devraient pas être commercialisées " ; que, dès lors que la SAS CME est devenue propriétaire du site sur lequel les bancs de pierre en litige ont été extraits, il est nécessaire de permettre à l'expert, le cas échéant, de pouvoir procéder à des investigations sur ce site et de pouvoir obtenir, de la part de cette société, des informations techniques nécessaires au bon déroulement de sa mission ; que, dans ces conditions, l'extension des opérations d'expertise à l'égard de la SAS CME apparaît utile à la bonne exécution de la mission de l'expert ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui vient d'être dit que la SAS CME n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a étendu l'expertise à son égard ; que ses conclusions aux fins d'annulation doivent par suite être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que la présente instance n'ayant occasionné aucun des frais prévus par l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions présentées par la

SARL Doazan-Hirscherger tendant à ce que soit mis à la charge de la SAS CME les dépens de l'instance doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS CME les sommes que demandent respectivement la commune de Provins et la société Ecotech et au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Carrières et Marbrerie d'Etrochey est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées, d'une part, par la SARL Doazan-Hirscherger et, d'autre part, par la commune de Provins et la société Ecotech tendant respectivement à l'application des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Carrières et Marbreries d'Etrochey, à Me A...H..., à Me I...F..., à la commune de Provins, à la SARL Doazan-Hirschberger, à la SAS Pagot, à la SAS société des carrières d'Etrochey, à la société Socotec, à la société Ecotech, à la société Maf Assurances et à M. D...E....

Délibéré après l'audience du 8 avril 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 13 mai 2016.

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

L. DRIENCOURT

Le greffier,

A-L. PINTEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA01244 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01244
Date de la décision : 13/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-011 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé tendant au prononcé d'une mesure d'expertise ou d'instruction.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SCP DESFILIS et MC GOWAN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-05-13;15pa01244 ?
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