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28/06/2016 | FRANCE | N°15PA03040

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 28 juin 2016, 15PA03040


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 juin 2014 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1424181/1-2 du 12 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, respectivement enregistrés les

30 juillet 2015 et 26 mai 2016, M.B..., représenté par Me Hostein, demande à la Cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 juin 2014 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1424181/1-2 du 12 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, respectivement enregistrés les 30 juillet 2015 et 26 mai 2016, M.B..., représenté par Me Hostein, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 mai 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 16 juin 2014 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, en l'admettant provisoirement au séjour durant le temps nécessaire à ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, en faveur de son conseil, la somme de 1 500 euros sur les fondements de l'article L 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

M. B...soutient que :

- en l'absence de mention de l'empêchement du signataire de droit de la décision contestée, celle-ci doit être regardée comme ayant été signée par une autorité incompétente ;

- le préfet n'ayant pas saisi la commission du titre de séjour, le refus contesté est entaché d'un vice de procédure, alors qu'il a sollicité son admission exceptionnelle sur le fondement des dispositions énoncées par 1'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles doivent être interprétées selon les termes de la circulaire du 28 novembre 2012, et qu'il justifie de sa présence continue en France depuis 2002 ;

- la décision préfectorale contestée viole les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie de sa présence de manière continue en France depuis 2002 au travers des très nombreux documents qu'il produit, lesquels mentionnent tous la même adresse ;

- le mode de preuve de la présence sur 10 années a été assoupli par les récentes circulaires ministérielles ;

- il établit la pérennité de sa présence en France, celle d'une partie de sa famille, et l'existence de liens personnels et professionnels tissés depuis 12 ans sur le territoire et son intégration dans la société française, ces éléments étant de nature à constituer des motifs exceptionnels au sens de ces dispositions ;

- le préfet a également méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire doit également être annulée pour incompétence de son signataire, manque de base légale, défaut de motivation, violation des stipulations de l'article 8 de la convention susmentionnée, et erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée.

La requête de M. B...a été communiquée au préfet de police qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Privesse, premier conseiller,

- et les observations de Me Hostein, avocat de M.B....

1. Considérant que M. A...B..., né le 29 juin 1968, de nationalité marocaine, déclarant résider en France depuis janvier 2002, a sollicité le 22 octobre 2013 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par un arrêté du 16 juin 2014, le préfet de police a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français, en fixant le pays à destination duquel il serait reconduit ; que M. B...relève appel du jugement du 12 mai 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle le refus de séjour a été pris : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative n'est tenue de consulter la commission du titre de séjour que lorsqu'elle envisage de refuser un titre de séjour à un étranger qui remplit effectivement les conditions pour obtenir un titre de séjour temporaire ou une carte de séjour de plein droit ;

3. Considérant que M. B...établit par les très nombreux documents probants qu'il produit, lesquels mentionnent tous la même l'adresse, sa présence habituelle sur le territoire français depuis l'année 2002, soit depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté du 16 juin 2014 ; que, par suite, M. B...doit être regardé comme établissant remplir la condition de durée de résidence posée par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de police était donc tenu de soumettre la demande du requérant à la commission du titre de séjour avant de prendre la décision en litige ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué du 12 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 juin 2014 du préfet de police ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'à la suite de l'annulation qui vient d'être prononcée, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de M.B..., de saisir de son cas la commission du titre de séjour, et de l'admettre provisoirement au séjour durant le temps nécessaire à ce réexamen ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Hostein, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 mai 2015 et l'arrêté du préfet de police du 16 juin 2014 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M.B..., de saisir de son cas la commission du titre de séjour, et de l'admettre provisoirement au séjour durant le temps nécessaire à ce réexamen.

Article 3 : L'Etat versera à Me Hostein une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Me Hostein, au préfet de police et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- M. Privesse, premier conseiller,

- M. Dellevedove, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 juin 2016.

Le rapporteur,Le président,J-C. PRIVESSEB. EVENLe greffier,A-L. CALVAIRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA03040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03040
Date de la décision : 28/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: M. CANTIE
Avocat(s) : HOSTEIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-28;15pa03040 ?
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