La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/10/2016 | FRANCE | N°15PA01770

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 14 octobre 2016, 15PA01770


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1308305 du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 avril 2015 et 31 mars 2

016, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1308305 du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 avril 2015 et 31 mars 2016, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2005 et 2006.

Mme C...soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que, l'administration n'ayant pas donné suite au recours hiérarchique qu'elle a exercé avant la mise en recouvrement des impositions en litige, elle a de la sorte été privée d'une " voie de recours " ;

- la reconstitution de recettes à laquelle a procédé l'administration, qui repose sur la méthode dite " des vins ", conduit " à des résultats hors de proportion avec la réalité " alors que les deux méthodes alternatives qu'elle propose, fondées sur les " nappes en papier " et les " pommes frites ", sont économiquement beaucoup plus réalistes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens invoqués par Mme C...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Boissy, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public.

1. Considérant que MmeC..., qui exploite à titre individuel, à Paris, un restaurant sous l'enseigne " Au relais du Massif Central ", a fait l'objet, au cours de l'année 2008, d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2005 au

31 décembre 2006 au cours de laquelle la comptabilité présentée a été écartée et le chiffre d'affaires de son restaurant reconstitué ; qu'à l'issue de ces opérations de contrôle et de l'avis rendu le 25 juin 2009 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, Mme C...a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis des intérêts de retard prévus par l'article 1727 du code général des impôts et de la majoration prévue par le a. de l'article 1729 du même code, qui ont été mis en recouvrement les 25 septembre et 31 octobre 2010 pour un montant total de 93 281 euros ; que Mme C...relève appel du jugement du 3 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, les dispositions contenues dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifié sont opposables à l'administration ; qu'aux termes du paragraphe 5 du chapitre III de la charte remise à Mme C...avant l'engagement de la vérification de comptabilité : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...). Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental ou régional qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur (...) " ;

3. Considérant qu'en se bornant à solliciter, le 15 septembre puis le 8 octobre 2009, " un rendez-vous " avec le supérieur hiérarchique " afin d'examiner la mise en place d'une remise des pénalités par voie de transaction ", Mme C...ne peut pas être regardée comme ayant demandé la saisine de l'inspecteur principal aux fins d'obtenir des éclaircissements supplémentaires sur les redressements maintenus après l'avis rendu le 25 juin 2009 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, l'administration n'a en l'espèce pas entaché d'irrégularité la procédure d'établissement de l'impôt en s'abstenant de donner suite à une telle demande gracieuse ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 11 décembre 2008, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que, lors de l'examen de la comptabilité présentée par MmeC..., le service vérificateur a constaté que l'intéressée ne détenait pas de caisse enregistreuse, qu'aucune " fiche clients " n'avait été produite au titre de la période vérifiée, que les " doubles " de prise de commande n'avaient pas été conservés, seuls des cahiers remplis manuellement et procédant à une comptabilisation globale des recettes en fin de journée ayant été présentés ; que, compte tenu de ces éléments, et en particulier du défaut de présentation de documents justifiant les recettes et de l'absence de tenue et de conservation par l'intéressée de pièces justifiant le détail des recettes enregistrées globalement, l'administration apporte la preuve de ce que la comptabilité présentée par Mme C...au titre des années vérifiées comportait des graves irrégularités justifiant qu'elle soit écartée ;

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires :

5. Considérant que Mme C...fait valoir, en substance, que la reconstitution de recettes à laquelle a procédé l'administration, qui repose sur la méthode dite " des vins ", est excessivement sommaire et soutient que les deux méthodes alternatives qu'elle propose, fondées sur les " nappes en papier " et les " pommes frites ", sont économiquement beaucoup plus réalistes ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 11 décembre 2008 et de l'avis rendu le 25 juin 2009 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, que le service vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires du restaurant et la taxe sur la valeur ajoutée collectée au titre de la période vérifiée en plusieurs étapes ; que, s'appuyant sur le dépouillement des fiches clients produites pour la période allant du 14 avril au 5 juin 2008, il a d'abord déterminé le prix moyen du repas et la consommation moyenne de quarts de vin servis à l'occasion des repas et, tenant compte de l'évolution des prix entre 2005 et 2008 et des corrections apportées par la Commission, a estimé que le prix moyen du repas s'élevait, au cours des années 2005 et 2006, à 14,09 euros et que la consommation moyenne de quarts de vin s'élevait à 0,65 par couvert ; qu'il a ensuite déterminé le nombre de couverts servis au cours de la période vérifiée à partir de cette consommation moyenne des vins rapprochée des achats réels revendus au cours de la même période ; qu'après avoir recensé les achats réels de bouteilles de vins en 2005 et 2006 majorés du stock initial et minorés du stock final de chaque période, puis tenu compte des prélèvements, pertes et offerts, il a estimé que le nombre d'achats revendus s'élevait à 4 539 en 2005 et à 5 358 en 2006 ; qu'il a alors converti ces unités de bouteilles consommées en quarts de vins, pondéré ce chiffre par la consommation moyenne de quarts de vin au cours de la période, soit 0,65, et obtenu 20 949 couverts pour 2005 et 24 729 couverts pour 2006 ; que le service a enfin calculé le chiffre d'affaires en multipliant ce nombre de couverts par le prix moyen du repas, 14,09 euros, et ainsi reconstitué le chiffre d'affaires du restaurant à 295 175 euros en 2005 et 348 440 euros en 2006, soit, globalement, un chiffre d'affaires de 643 610 euros sur l'ensemble de la période vérifiée ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant de la méthode dite " des nappes ", il résulte de l'instruction et notamment de l'annexe n°2 à la proposition de rectification du

11 décembre 2008, et ainsi que le propose Mme C...elle-même, que le nombre de jours d'ouverture du restaurant, au cours de la période vérifiée, s'élève à 616 jours, soit 298 jours pour 2005 et 318 jours pour 2006, que le prix moyen du repas s'élève à 14,09 euros, que le coefficient d'utilisation des nappes peut être évalué à 1,7 tandis que la consommation des nappes par le personnel peut être raisonnablement estimée à 5 nappes par jour d'ouverture du restaurant, soit 3 080 (616 X 5) ; que si la requérante a produit un ensemble de factures qui attestent qu'elle a acheté, pour la période allant du 1er décembre 2004 au 30 janvier 2007, 61 paquets de

500 nappes, il ressort toutefois de la facture du 21 avril 2006 qu'alors que l'intéressée avait commandé 7 paquets de nappes, seulement 3 paquets lui ont été facturés, 4 paquets étant désignés " en reliquat " ; qu'alors que l'examen de l'ensemble des autres factures indique que le fournisseur avait bien pour pratique, lorsqu'il ne disposait pas de l'intégralité des articles commandés, de les mentionner, sans les facturer, comme étant " en reliquat ", et d'établir, dans les jours suivants, lorsque ces articles, enfin disponibles, avaient été livrés, une facture séparée, la requérante n'a pas produit la facture concernant ces 4 paquets désignés " en reliquat " pour ce qui concerne la commande correspondant à la facture du 21 avril 2006 et n'a produit aucun autre élément de nature à prouver qu'elle aurait en définitive renoncé à cette partie de la commande ; que, dans ces conditions, Mme C...est réputée avoir commandé, au titre de la période allant du 1er décembre 2004 au 30 janvier 2007, 65 paquets de 500 nappes, soit 32 500 nappes pour 26 mois, ce qui correspond, pour la période de 24 mois concernant la période vérifiée, à 30 000 nappes ; que, dès lors, compte tenu des autres éléments retenus par Mme C...à l'appui de sa méthode de reconstitution alternative dite " des nappes ", le nombre de couverts par jour d'ouverture s'élève à 74,29 ( (30 000-3080) / 616 = 43,70 X 1,7) ; qu'eu égard au prix moyen du repas retenu, 14,09 euros, le chiffre d'affaires du restaurant peut ainsi être évalué, selon cette première méthode alternative, à 311 940 euros en 2005 et 332 875 euros en 2006, soit, globalement, un chiffre d'affaires de 644 815 euros sur l'ensemble de la période vérifiée ; que, même si la reconstitution du chiffre d'affaires annuel respectivement obtenu en utilisant la méthode " des vins " et celle " des nappes " diffère légèrement, le chiffre d'affaires globalement reconstitué au titre de l'ensemble de la période vérifiée est sensiblement le même ; que, dans ces conditions, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la méthode de reconstitution utilisée par l'administration serait excessivement sommaire ;

8. Considérant, en dernier lieu, que, s'agissant de la méthode de reconstitution dite " des pommes frites ", si Mme C...allègue, sans d'ailleurs l'établir, que 75% des plats servis au cours de la période vérifiée étaient accompagnés d'une ration moyenne de 170 à 180 grammes de pommes frites, elle n'apporte toutefois aucun élément de nature à prouver que le poids des pommes de terres surgelées correspondant aux achats recensés par ses soins serait bien identique à celui des pommes de terre cuites ; que, dès lors, les seuls éléments figurant à l'appui de cette seconde méthode alternative ne permettent pas d'invalider la méthode utilisée par l'administration, laquelle est en tout état de cause corroborée par la première méthode alternative proposée par la requérante ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige ; que ses conclusions aux fins d'annulation et de décharge doivent par suite être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 14 octobre 2016.

Le rapporteur,

L. BOISSYLe président,

L. DRIENCOURTLe greffier,

A-L. PINTEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

N°15PA01770 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01770
Date de la décision : 14/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Laurent BOISSY
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : WEBER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-10-14;15pa01770 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award