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15/11/2016 | FRANCE | N°16PA02341

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 15 novembre 2016, 16PA02341


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2015 par lequel le préfet de police de Paris lui a retiré sa carte de résident.

Par un jugement n° 1517925/5-3 du 1er juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, M. A..., représenté par Me Luthi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 15179

25/5-3 du 1er juin 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 4 septembre 2015 ;

3°) d'enj...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2015 par lequel le préfet de police de Paris lui a retiré sa carte de résident.

Par un jugement n° 1517925/5-3 du 1er juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, M. A..., représenté par Me Luthi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1517925/5-3 du 1er juin 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 4 septembre 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui restituer sa carte de résident dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, pendant ce délai, un titre de séjour provisoire l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de son arrêté sur sa situation personnelle dès lors que les faits reprochés ne justifient pas le retrait de sa carte de résident.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dellevedove,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de Me Luthi, avocat de M. A....

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 341-6 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou par personne interposée, engagée, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident peut être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, ayant occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 341-6 du code du travail " ; que la sanction prévue par l'article L. 314-6 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a pour effet, sauf lorsqu'elle n'est pas assortie d'une obligation de quitter le territoire français et s'accompagne de la délivrance d'un autre titre de séjour, de mettre fin au droit au séjour de l'étranger concerné ;

2. Considérant que M.A..., ressortissant turc, né le 1er août 1953, entré en France, selon ses déclarations, en 1979, s'est vu renouveler sa carte de résident, en dernier lieu le 2 février 2015, avec la mention d'une validité jusqu'au 1er février 2025 ; que, par l'arrêté contesté du 4 septembre 2015, le préfet de police a retiré ce titre de séjour en application de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. A...relève appel du jugement du 1er juin 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté litigieux du 4 septembre 2015, M. A...vivait en France depuis trente six ans, avec son épouse qui dispose d'une carte de résident, et a exercé depuis son arrivée une activité professionnelle ; que les faits de travail dissimulé qui lui ont été reprochés ont été commis entre le 9 avril 2010 et le 7 septembre 2011, et ont donné lieu à une condamnation par un jugement du Tribunal correctionnel de Paris le 19 janvier 2012, soit plus de trois ans avant la décision contestée ; que, eu égard à l'ensemble de ces circonstances, et notamment à la durée et aux conditions du séjour de l'intéressé en France, l'arrêté contesté a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 2015 portant retrait de sa carte de résident et à obtenir l'annulation de ce jugement et de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. Considérant que l'annulation de l'arrêté contesté du 4 septembre 2015 par lequel le préfet de police a procédé au retrait de la carte de résident de M. A...ayant pour effet de remettre de plein droit en vigueur la carte de résident dont bénéficiait l'intéressé, valable du 2 février 2015 au 1er février 2025, le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte présentées par le requérant ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1517925/5-3 du 1er juin 2016 et l'arrêté du préfet de police du 4 septembre 2015 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à M. A...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le surplus des conclusions de la requête.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 2 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- M. Dellevedove, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2016.

Le rapporteur,

E. DELLEVEDOVE

Le président,

B. EVENLe greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02341
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : LUTHI

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-11-15;16pa02341 ?
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