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15/11/2016 | FRANCE | N°16PA02601

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 15 novembre 2016, 16PA02601


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 décembre 2015 par lequel le préfet de police de Paris lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1521204/6-2 du 23 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 août 2016, M.B..., représen

té par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 décembre 2015 par lequel le préfet de police de Paris lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 1521204/6-2 du 23 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 août 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1521204/6-2 du 23 mars 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 3 décembre 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et pendant ce délai, de lui délivrer, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous la même condition d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

- l'arrêté du préfet de police est entaché d'un défaut de motivation ;

- cet arrêté est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- la décision portant refus de séjour méconnait les stipulations de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- cette décision méconnait les dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie d'exception de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- cette décision méconnait les stipulations de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- cette décision méconnait les dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ses décisions sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de Grande Instance de Paris du 24 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dellevedove a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant tunisien, né le 7 janvier 1986, a déclaré être entré en France en 2009 ; qu'il a sollicité, le 6 mai 2015, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par l'arrêté contesté du 3 décembre 2015, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé son pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 23 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté comporte l'exposé des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le préfet de police s'est livré à un examen complet et circonstancié de sa situation personnelle, familiale et professionnelle ; que la circonstance que le préfet a mentionné dans sa décision que le père de l'intéressé était titulaire d'une carte de résident, alors qu'il est de nationalité française, constitue une erreur matérielle insuffisante, en l'espèce, pour démontrer un défaut d'examen de la situation de l'intéressé ; que, dès lors, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté litigieux et du défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " 1. Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : (...) b) A l'enfant tunisien d'un ressortissant français si cet enfant à moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge " ;

4. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.B..., il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment de la fiche remplie en préfecture le 6 mai 2015, que l'intéressé aurait sollicité un titre de séjour sur le fondement des stipulations susmentionnées de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ; que, dès lors, le préfet n'était pas tenu d'examiner sa demande d'admission au séjour au regard de ce fondement ; qu'en tout état de cause, l'intéressé ne peut se prévaloir de ces stipulations dès lors qu'il ne justifie pas résider régulièrement sur le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. B...fait valoir qu'il justifie d'une résidence en France depuis l'année 2009, que son père et ses deux frères ont la nationalité française, que sa mère est titulaire d'une carte de résident, qu'il justifie d'une intégration particulière au sein de la société française par la maîtrise de langue française et l'exercice d'une activité professionnelle à temps partiel ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier, que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille ; que la circonstance que ses parents et ses frères ne soient pas en situation irrégulière en France n'est pas, en elle-même, de nature à lui conférer un droit au séjour ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident quatre frères et soeurs et où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 23 ans ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de refus de séjour, assortie d'une obligation de quitter le territoire français, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, l'arrêté contesté n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ces mêmes circonstances ne sont pas davantage de nature à faire regarder cet arrêté comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B...;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tout titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation " ; qu'aux termes de l'article 3 de ce même accord : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord , reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention "salarié" " ; qu'aux termes de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; qu'il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une telle activité ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour en qualité de salarié, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour en cette qualité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point traité par l'accord franco-tunisien ; qu'ainsi, les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont applicables aux ressortissants tunisiens qu'en matière de délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que M. B...ne saurait utilement soutenir que c'est à tort que le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, d'autre part, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, précisées notamment au point 6, en refusant de régulariser la situation administrative de M. B...sur le fondement du mécanisme d'admission exceptionnelle au séjour prévue par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant enfin qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêté litigieux en tant qu'il porte refus de délivrance d'un titre de séjour n'est entaché d'aucune illégalité ; que, dès lors, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision présenté à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire doit être pareillement écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.

Délibéré après l'audience du 2 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- M. Dellevedove, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2016.

Le rapporteur,

E. DELLEVEDOVELe président,

B. EVEN

Le greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02601


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02601
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : TRORIAL

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-11-15;16pa02601 ?
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