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12/06/2017 | FRANCE | N°16PA00495

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 12 juin 2017, 16PA00495


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 18 mars 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1516465/3-3 du 22 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué et a, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. B...

une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un dé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 18 mars 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1516465/3-3 du 22 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué et a, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 février 2016, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1516465/3-3 du 22 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- la décision attaquée était le refus de titre de séjour en date du 18 mars 2015 pris sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et non sur celui de l'article L. 313-10 du même code, et non l'arrêté du 20 janvier 2015, tel que le mentionne à tort le jugement attaqué ;

- M. B...ne justifie pas d'un visa d'une durée supérieure à trois mois, condition d'obtention d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il ne peut en être exempté dès lors qu'il est arrivé en France au plus tôt à l'âge de 18 ans ;

- la circonstance que M. B...démontre avoir suivi des formations n'est pas de nature à entacher la décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision litigieuse sur sa situation personnelle dès lors que l'intéressé ne démontre aucune insertion professionnelle significative et que la famille de l'intéressé se trouve dans son pays d'origine, le Maroc.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2017, M.B..., représenté par Me Bremaud, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que les moyens soulevés par le préfet de police ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 mai 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Luben,

- et les observations de Me Bremaud, avocate de M.B....

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant marocain, né le 3 juillet 1991, a sollicité le 20 mai 2014 un titre de séjour auprès du préfet de police sur le fondement des articles L. 313-11 (7°) et L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 20 janvier 2015, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du même code. Par un second arrêté du 18 mars 2015, il a refusé de lui délivrer un titre sur le fondement de l'article L. 313-7 du même code et l'a obligé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination. M. B...a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de ce second arrêté. Le préfet de police relève appel du jugement du 22 décembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 18 mars 2015 refusant à M. B...la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

2. En premier lieu, le préfet de police soutient que la décision attaquée devant le Tribunal administratif était le refus de titre de séjour en date du 18 mars 2015, pris sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur celui de l'article L. 313-10 du même code, et non l'arrêté du 20 janvier 2015. Toutefois, d'une part, il ne ressort pas des termes du jugement que les premiers juges aient cru devoir apprécier la légalité de l'arrêté du 20 janvier 2015 dès lors que seule la légalité de l'arrêté du préfet de police en date du 18 mars 2015 a été examinée dans le jugement attaqué. D'autre part, si les premiers juges mentionnent l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lieu et place de l'article L. 313-7 du même code, cette erreur purement matérielle est sans incidence sur la régularité ou le bien fondé du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, le préfet de police fait valoir que M. B...ne justifie pas d'un visa d'une durée supérieure à trois mois, condition d'obtention d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il ne peut en être exempté dès lors qu'il est arrivé en France au plus tôt à l'âge de 18 ans. Toutefois, le motif d'annulation retenu par le jugement attaqué est tiré de ce que le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé. Dès lors, le moyen soulevé par le préfet de police doit être écarté comme inopérant.

4. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B...est entré en France le 22 février 2010, selon ses déclarations. Il a été hébergé à plusieurs reprises par le SAMU social de Paris entre 2010 et 2012 et a été admis à l'aide sociale à l'enfance et placé dans un foyer socio-éducatif à Paris 20ème depuis le 1er février 2011. Il a été scolarisé du 9 septembre 2010 au 31 août 2011 dans le cadre d'une formation de " 3ème français langue renforcée " au lycée professionnel Turquetil à Paris, puis l'année suivante, au lycée professionnel Chennevière-Malezieux à Paris en 1ère année de certificat d'aptitude professionnelle (CAP) de chaudronnerie industrielle. Il a poursuivi cette formation l'année suivante et a ensuite été inscrit en 2013/2014 en 1ère professionnelle puis en 2014/2015 en terminale professionnelle, dans la même spécialité et au sein du même établissement. Postérieurement à l'arrêté attaqué, il s'est inscrit en 1ère année de brevet de technicien supérieur en chaudronnerie industrielle au lycée de l'Europe à Dunkerque et est désormais inscrit au titre de l'année 2016/2017 en deuxième de BTS dans cette même spécialité. Un rapport de son professeur principal du 27 janvier 2015 indique notamment qu'il est ponctuel et assidu, qu'il fait preuve de beaucoup de sérieux dans ses études, qu'il est respectueux envers le personnel de l'établissement et qu'il est très bien intégré. Dans ce cadre, il a été élu délégué de classe. Il a également fait l'objet d'un " parrainage républicain " organisé par la mairie de Paris le 16 février 2012. M. B...atteste maitriser l'usage de la langue française par des attestations de réussite au diplôme d'études en langues étrangères pour lequel il a obtenu le niveau A2 et à un test de connaissances organisé par l'Office français d'intégration et d'immigration auprès duquel il a suivi plusieurs cours destinés à favoriser son intégration en France. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu du parcours scolaire de M. B...et de son intégration réussie en France, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'arrêté attaqué était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M.B....

5. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 18 mars 2015 refusant à M. B...la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français en fixant son pays de destination.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bremaud, avocate de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Bremaud de la somme de 1 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Bremaud, avocate de M.B..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Bremaud renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juin 2017.

Le président rapporteur,

I. LUBENLe premier conseiller le plus ancien,

S. BONNEAU-MATHELOT

Le greffier,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA00495


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA00495
Date de la décision : 12/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : BREMAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-06-12;16pa00495 ?
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