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05/10/2017 | FRANCE | N°17PA01062,17PA01146

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 05 octobre 2017, 17PA01062,17PA01146


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 13 novembre 2013 par laquelle le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes a rejeté sa demande tendant à être autorisée à exercer une libre prestation de services en France.

Par un jugement n° 1520137/6-1 du 27 janvier 2017, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes en date du 13 novembre 2013.

Procédure devant la

Cour :

I/ Par une requête enregistrée le 28 mars 2017 sous le n° 17PA01062, le Conseil n...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 13 novembre 2013 par laquelle le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes a rejeté sa demande tendant à être autorisée à exercer une libre prestation de services en France.

Par un jugement n° 1520137/6-1 du 27 janvier 2017, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes en date du 13 novembre 2013.

Procédure devant la Cour :

I/ Par une requête enregistrée le 28 mars 2017 sous le n° 17PA01062, le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes, représenté par Me Gonzalez, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1520137/6-1 du 27 janvier 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de mettre à la charge de Mme A...le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du Tribunal administratif de Paris est irrégulier dès lors que le moyen d'annulation retenu par le tribunal tiré de ce que la décision attaquée méconnait les dispositions de l'article R. 4311-38 du code de la santé publique telles qu'elles doivent être interprétées à la lumière de la directive du 7 septembre 2005 n'avait pas été soulevé par Mme A... ; les premiers juges auraient ainsi dû mettre le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes à même de présenter ses observations ; en ne le faisant pas, ils ont méconnu le principe du contradictoire ;

- la requête de Mme A...devant le Tribunal administratif de Paris était irrecevable car tardive ;

- le Tribunal administratif de Paris a commis une erreur de droit dès lors que les dispositions contestées doivent être interprétées comme autorisant le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes à solliciter tous les éléments d'appréciation visés à l'article R. 4311-38, alinéa 3, du code de la santé publique ;

- le dossier de Mme A...était incomplet, malgré les demandes réitérées de transmission de documents par le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes ; le caractère occasionnel et temporaire de l'activité n'étant pas vérifiable, le Conseil était fondé à refuser la déclaration préalable de MmeA....

II/ Par une requête, enregistrée le 4 avril 2017 sous le n° 17PA01146, le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes, représenté par Me Gonzalez, demande à la Cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 1520137/6-1 du 27 janvier 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de mettre à la charge de Mme A...le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ensemble des conditions posées par l'article R. 811-5 du code de justice administrative est rempli dès lors que le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes établit, par des moyens sérieux, que le jugement dont il est relevé appel encourt l'annulation et qu'aucun moyen de la requête de Mme A...ne saurait être accueilli.

Les requêtes ont été communiquées à MmeA..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique,

- l'arrêté de la ministre de la santé et des sports du 20 janvier 2010 relatif à la déclaration préalable de prestation de services pour l'exercice des professions de conseiller en génétique, préparateur en pharmacie, préparateur en pharmacie hospitalière, infirmier, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, ergothérapeute, psychomotricien, orthophoniste, orthoptiste, manipulateur d'électroradiologie médicale, audioprothésiste, opticien-lunetier et diététicien,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Luben,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de Me Gonzalez, avocat du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 17PA01062 et 17PA01146 de Mme A...sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes même du jugement attaqué qu'il a annulé la décision du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes en date du 13 novembre 2013 au motif qu'en exigeant en l'espèce de Mme A...des informations qui ne sont pas au nombre de celles figurant à l'article 7 de la directive n° 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes a méconnu les dispositions de l'article R. 4311-38 du code de la santé publique telles qu'elles doivent être interprétées à la lumière de cette directive du 7 septembre 2005. Cependant, MmeA..., ni dans sa requête introductive d'instance, ni dans son mémoire en réplique enregistré au greffe du Tribunal administratif de Toulon le 8 août 2014 ni celui du Tribunal administratif de Paris le 9 décembre 2015, n'avait soulevé un tel moyen, comme il ressort au demeurant des visas de la requête. Par suite, en annulant la décision attaquée pour ce motif, le tribunal administratif a fait droit à un moyen qui n'avait ni été soulevé par la requérante, ni été soumis au principe de la contradiction et a, ainsi, entaché d'irrégularité le jugement attaqué du 27 janvier 2017 du Tribunal administratif de Paris, qui doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... devant le Tribunal administratif de Paris.

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête n° 17PA01062 :

4. Aux termes de l'article L. 4321-11 du code de la santé publique : " Le masseur-kinésithérapeute, ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, qui est établi et exerce légalement les activités de masseur-kinésithérapeute dans un Etat, membre ou partie, peut exécuter en France des actes professionnels, de manière temporaire et occasionnelle, sans avoir à procéder aux formalités prévues à l'article L. 4321-10. (...) L'exécution de ces actes est subordonnée à une déclaration préalable, qui est accompagnée de pièces justificatives dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé.(...) Les qualifications professionnelles du prestataire sont vérifiées avant la première prestation de services.(...) ". Aux termes de l'article R. 4321-30 du même code : " Les dispositions des articles R. 4311-38 à R. 4311-41-2 sont applicables à la prestation de services des masseurs-kinésithérapeutes dont la déclaration est prévue à l'article L. 4321-11 " et aux termes de l'article R. 4311-38 du même code : " La déclaration prévue à l'article L. 4311-22 est adressée avant la première prestation de services au Conseil national de l'ordre./ Elle comporte des informations relatives à l'état civil, à la nationalité, à la légalité de l'établissement dans l'Etat membre d'origine ou de provenance, à l'absence d'interdiction, même temporaire, d'exercer, aux qualifications professionnelles, à l'assurance professionnelle et au lieu d'exécution de la première prestation de services, ainsi que la liste des pièces justificatives qui l'accompagnent./ Le caractère temporaire et occasionnel de la prestation de services est apprécié au cas par cas, notamment en fonction de sa durée, de sa fréquence, de sa périodicité et de sa continuité. ". Aux termes enfin de l'article R. 4311-38-1 : " I. - Dans un délai d'un mois à compter de la réception de la déclaration, le Conseil national de l'ordre informe le prestataire, au vu de l'examen de son dossier : 1° Soit qu'il peut débuter la prestation de services ; 2° Soit qu'il ne peut pas débuter la prestation de services (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que MmeA..., de nationalité allemande, a déposé le 6 juin 2013 un dossier de déclaration préalable de prestation de service en tant que masseur-kinésithérapeute auprès du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes. Par des courriers et des courriers électroniques des 18 juin 2013, 24 juin 2013, 1er août 2013 et 17 septembre 2013, le Conseil national lui a demandé d'apporter " toute précision utile concernant la durée, la fréquence, la périodicité et la continuité dans le temps des prestations de services que vous souhaiteriez délivrer en France ". Toutefois, MmeA..., tant dans sa demande initiale que dans ses réponses aux différents courriers du Conseil national, a indiqué qu'elle était en France depuis septembre 2012 pour une année sabbatique jusqu'au 31 août 2013, cette date pouvant être repoussée au 6 janvier 2014, qu'il était possible qu'elle fasse une nouvelle demande pour travailler de nouveau quelques semaines ou quelques mois dans les mêmes conditions 1'année suivante, et qu'elle entendait travailler ponctuellement en cabinet et/ou en hôpital durant cette période, de préférence avec des enfants et/ou des adultes atteints de pathologies neurologiques. L'ensemble de ces précisions, qui n'avaient pas à être complétées eu égard au régime de déclaration préalable institué par les dispositions précitées, était suffisant pour permettre au Conseil national d'apprécier " le caractère temporaire et occasionnel de la prestation de services (...), notamment en fonction de sa durée, de sa fréquence, de sa périodicité et de sa continuité. ", en application des dispositions précitées de l'article R. 4311-38 du code de la santé publique. Dès lors, en rejetant la demande de l'intéressée par la décision attaquée du 13 novembre 2013 au motif qu'elle n'avait pas apporté des précisions sur la durée, la fréquence, la périodicité et la continuité dans le temps des prestations de services qu'elle souhaitait délivrer en France et qu'elle n'avait ainsi pas permis au Conseil national de disposer des éléments qui lui étaient nécessaires pour se prononcer sur sa demande, le Conseil national a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 4311-38 du code de la santé publique. Par suite, la décision attaquée en date du 13 novembre 2013 du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes doit être annulée.

Sur la requête n° 17PA01146 :

6. Dès lors que le présent arrêt statue sur les conclusions du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes aux fins d'annulation du jugement attaqué, les conclusions présentées dans la requête n° 17PA01146 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement sont devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeA..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1520137/6-1 du 27 janvier 2017 du Tribunal administratif de Paris et la décision du Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes en date du 13 novembre 2013 sont annulés.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 17PA01146 tendant à ce que soit prononcé le sursis à exécution du jugement attaqué.

Article 3 : Les conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au Conseil national de l'ordre des masseurs kinésithérapeutes et à Mme B...A....

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 octobre 2017.

Le rapporteur,

I. LUBENLe président,

J. LAPOUZADELe greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 17PA01062, 17PA01146


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01062,17PA01146
Date de la décision : 05/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : CABINET ALMA MONCEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-10-05;17pa01062.17pa01146 ?
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