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29/03/2018 | FRANCE | N°17PA03469

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 29 mars 2018, 17PA03469


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du préfet de police du 25 août 2016 prononçant son expulsion du territoire français pour menace grave à l'ordre public.

Par un jugement n° 1617058 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 novembre 2017, Mme C...A..., représentée par Me Koraytem, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1617058 d

u 1er juin 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 25 a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du préfet de police du 25 août 2016 prononçant son expulsion du territoire français pour menace grave à l'ordre public.

Par un jugement n° 1617058 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 novembre 2017, Mme C...A..., représentée par Me Koraytem, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1617058 du 1er juin 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 25 août 2016 prononçant son expulsion du territoire français pour menace grave à l'ordre public ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- la décision litigieuse a été signée par une personne incompétente ;

- elle méconnait les dispositions de l'article entachée d'erreur d'appréciation au regard, tant de la gravité des faits qui lui sont reprochés que sur la menace à l'ordre public qui résulterait de son comportement ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 janvier 2018, le préfet de police, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- la Convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- les observations de Me Koraytem, avocat de MmeA....

Une note en délibéré a été présentée le 19 mars 2018 pour Mme C...A....

1. Considérant que Mme C...A..., née le 26 juin 1984, de nationalité chinoise, déclare être entrée en France en 2007 ; que, par un arrêté du 25 août 2016, le préfet de police a prononcé à son encontre une mesure d'expulsion pour menace grave à l'ordre public ; que Mme A...ayant demandé au Tribunal administratif de paris l'annulation de cet arrêté, ce Tribunal a rejeté sa demande par un jugement du 1er juin 2017 dont l'intéressée relève appel devant la Cour ;

Sur la légalité interne de la décision litigieuse :

2. Considérant que, devant la Cour, Mme A...n'apporte aucun argument ou élément de nature à remettre en cause l'appréciation portée à bon droit par le tribunal administratif sur l'unique moyen de légalité externe articulé à l'encontre de l'arrêté litigieux, et tiré de ce que le signataire n'aurait pas reçu du préfet de police une délégation de signature à cette fin ; qu'il y a donc lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter ce moyen ;

Sur la légalité interne de la décision litigieuse :

- En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur d'appréciation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2,

L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. " ;

4. Considérant que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public ; que lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision ;

5. Considérant qu'il ressort de la lecture de l'arrêté contesté du 25 août 2016 que le préfet de police a décidé qu'en raison de l'ensemble de son comportement, la présence de Mme A...sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public ; qu'il a notamment rappelé qu'elle avait été condamnée, le 5 octobre 2015, par la cour d'appel de Paris, pour des faits de proxénétisme, proxénétisme aggravé, transport non autorisé de stupéfiants, détention non autorisée de stupéfiants, offre ou cession non autorisée de stupéfiants, acquisition non autorisée de stupéfiants et participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le tribunal correctionnel de Paris a, par un jugement du 6 janvier 2015, relaxé Mme A...pour les faits d'opération de banque effectuée à titre habituel par personne autre qu'un établissement de crédit, participation en bande organisée à la tenue d'une maison de jeux de hasard où le public est librement admis et participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni d'au moins trois ans d'emprisonnement ; que la requérante a été toutefois condamnée à titre principal à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement dont six mois avec sursis ainsi qu'à une amende de 30 000 euros pour des faits de transport, détention, offre ou cession et acquisition non autorisés de stupéfiants, de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement, de proxénétisme par aide, assistance ou protection de la prostitution d'autrui et proxénétisme aggravé par pluralité de victimes ; que ces faits ont été commis courant 2012 et 2013 jusqu'au 27 mai 2013 ; qu'il ressort d'un arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 5 octobre 2015 que le mari de l'intéressée a été condamné à une peine de quatre ans d'emprisonnement à raison des mêmes faits, la requérante reconnaissant dans ses écritures qu'elle était l'associée de fait avec son mari du restaurant-karaoké où se sont déroulés les faits et où elle était employée comme femme de ménage et vendeuse de cigarettes ; que, si la commission d'expulsion a émis, le 14 juin 2016, un avis défavorable à l'expulsion de Mme A...en raison de ses efforts visant à sa réinsertion, il ne ressort d'aucun élément du dossier que l'intéressée ne constituerait plus une menace grave contre l'ordre public ; qu'ainsi, eu égard à la nature et à la gravité des faits qui se sont poursuivis sur une période de deux ans, quand bien même ils n'auraient fait l'objet que d'une condamnation pénale, Mme A...n'est pas fondée à soutenir, en l'absence de toute démonstration probante de réinsertion, et alors que les faits qui lui ont été reprochés ont été commis dans l'exercice de son activité professionnelle, que l'arrêté d'expulsion contesté a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'il serait entaché d'une erreur d'appréciation ;

- En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. " ;

8. Considérant que Mme A...fait valoir qu'elle est entrée en France en 2007 à l'âge de 22 ans et qu'elle y réside depuis lors, qu'elle vit dans un appartement loué dans le XIIIème arrondissement de Paris et qu'elle est la mère de trois enfants, dont deux sont nés à Paris, respectivement le 10 août 2008 et le 10 novembre 2009 ; que, toutefois, en situation irrégulière depuis son entrée en France, elle ne peut être regardée comme bien intégrée en France eu égard à son comportement et à l'absence de toute manifestation de réinsertion ; qu'il n'est pas contesté que son époux, également de nationalité chinoise, a fait l'objet d'un arrêté préfectoral d'expulsion en date du 28 mars 2014 et notifié le 4 avril suivant et a été condamné, pour les mêmes faits, à une peine complémentaire d'interdiction du territoire français pendant cinq ans ; que, dès lors, Mme A...n'établit pas qu'elle serait dépourvue de toute attache dans son pays d'origine ; que, par suite, et alors qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, son comportement constitue une menace grave pour l'ordre public eu égard à la nature et à la gravité des faits commis, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté ;

- En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le père des enfants de Mme A... a été condamné à une peine d'interdiction du territoire pendant une durée de cinq ans qui implique nécessairement son départ du territoire français ; que si les enfants de Mme A... sont scolarisés en France, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment eu égard à leur jeune âge, que la cellule familiale ne puisse pas être reconstituée dans le pays d'origine de la requérante, dont l'époux a également la nationalité ; que, dans les circonstances de l'espèce, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté d'expulsion pris à son encontre méconnaîtrait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant ; que le moyen doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme A...doit être rejetée, en ce comprises, dès lors que l'intéressées est la partie perdante dans la présente instance, ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative et sur l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- M. Legeai, premier conseiller,

- Mme Nguyên-Duy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 mars 2018.

L'assesseur le plus ancien,

A. LEGEAILe président,

S. DIÉMERT Le greffier,

M. B...La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03469
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : KORAYTEM

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-03-29;17pa03469 ?
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