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12/12/2019 | FRANCE | N°17PA21666

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 12 décembre 2019, 17PA21666


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Fast Food Océan Indien a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 27 mai 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Louis a accordé à la société Saint-Louisienne Immobilière un permis de construire en vue de la construction d'un local commercial destiné à la restauration rapide comprenant une surface de plancher de 477,80 m², sur un terrain cadastré DH 893 à 905 d'une superficie de 33 046 m², situé au 1 rue de l'Etang dans cette commune, ensemble la d

cision de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1401270 du 23 févri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Fast Food Océan Indien a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 27 mai 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Louis a accordé à la société Saint-Louisienne Immobilière un permis de construire en vue de la construction d'un local commercial destiné à la restauration rapide comprenant une surface de plancher de 477,80 m², sur un terrain cadastré DH 893 à 905 d'une superficie de 33 046 m², situé au 1 rue de l'Etang dans cette commune, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1401270 du 23 février 2017, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du 27 mai 2014 du maire de la commune de Saint-Louis, ensemble la décision de rejet du recours gracieux de la société Fast Food Océan Indien, et mis à la charge de la commune de Saint-Louis la somme de 1 500 euros à verser à la société Fast Food Océan Indien au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une ordonnance du 1er mars 2019, prise sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a attribué à la Cour administrative d'appel de Paris le jugement du dossier d'appel enregistré à la Cour administrative d'appel de Bordeaux.

Par une requête et des mémoires enregistrés le 26 mai 2017, le 8 novembre 2019 et le 15 novembre 2019, la société Saint-Louisienne Immobilière, représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401270 du 23 février 2017 du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) de rejeter la demande de la société Fast Food Océan Indien ;

3°) de mettre à la charge de la société Fast Food Océan Indien la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Saint-Louisienne Immobilière soutient que :

- la demande de première instance était tardive ;

- la société Fast Food Océan Indien n'avait pas intérêt à agir ;

- le moyen tiré du vice d'incompétence retenu par le tribunal manque en fait ;

- l'arrêté ne méconnaît pas l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- la hauteur du bâtiment est conforme aux prescriptions du plan local d'urbanisme ;

- la décision de non-opposition à déclaration préalable du 18 octobre 2013 étant définitive, le moyen tiré de l'illégalité du lotissement, retenu par le tribunal, était inopérant ;

- la construction projetée ne nécessite pas de permis d'aménager ;

- le service instructeur disposait des pièces nécessaires pour l'examen de la demande.

Par des mémoires en défense enregistrés le 14 septembre 2017 et le 15 novembre 2019, la société Fast Food Océan Indien, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la société Saint-Louisienne Immobilière sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Fast Food Océan Indien soutient que :

- sa demande de première instance n'était pas tardive ;

- elle a intérêt à agir ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

- l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme a été méconnu ;

- les plans joints à la demande n'ont pas permis au service instructeur de s'assurer du respect des articles 7, 9 et 13 du règlement du plan local d'urbanisme en zone US ;

- le projet ne respecte pas les articles 11.4, 15 et 12 du règlement du plan local d'urbanisme en zone US ;

- le pétitionnaire n'a pas justifié d'une servitude de passage.

La requête a été communiquée à la commune de Saint-Louis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G... ;

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public ;

- et les observations de Me B..., pour la société Saint-Louisienne Immobilière, et de Me A... pour la société Fast Food Océan Indien.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 27 mai 2014, le maire de la commune de Saint-Louis a accordé à la société Saint-Louisienne Immobilière un permis de construire en vue de la construction d'un local commercial destiné à la restauration rapide à l'enseigne " Mac Donald's ", comprenant une surface de plancher de 477,80 m², sur un terrain cadastré DH 893 à 905 d'une superficie de 33 046 m², au 1 rue de l'Etang dans cette commune. La société Saint-Louisienne Immobilière fait appel du jugement du 23 février 2017 par lequel le tribunal administratif de La Réunion, saisi par la société Fast Food Océan Indien, a annulé cet arrêté, ensemble la décision de rejet du recours gracieux présenté par cette société.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

3. Il ressort des pièces du dossier que si la société Fast Food Océan Indien exploite un restaurant à l'enseigne Quick implanté en vis-à-vis du terrain d'assiette de la construction projetée, consistant en un restaurant à l'enseigne Mac Donald's, l'entrée de la voie d'accès au service de " drive " prévu par le projet se fait en sens unique par la rue de l'Etang et la sortie par la même voie en aval, et non au droit du terrain d'assiette de l'établissement exploité par l'intimée, les voies situées à proximité immédiate, la rue précitée et l'avenue de la Résistance, qui desservent une zone à vocation économique et commerciale, étant déjà très fréquentées. Par ailleurs, le terrain d'assiette du projet est en friche et s'inscrit dans une vaste zone destinée à accueillir des activités économiques et commerciales et à être aménagée, qui comprend déjà des établissements commerciaux sur lesquels porte la vue depuis l'établissement exploité par la société Fast Food Océan Indien. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la réalisation du projet aurait, sur les flux de circulation dans cette zone commerciale et sur la vue dont bénéficie l'établissement de la société Fast Food Océan Indien, des effets tels qu'ils seraient de nature à affecter par eux-mêmes les conditions d'exploitation de cet établissement. Par suite, cette société n'a pas intérêt à demander l'annulation de l'arrêté contesté.

4. En second lieu, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier (...) Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". Selon l'article A. 424-16 de ce code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le panneau prévu à l'article A. 424-1 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté (...) ".

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment de procès-verbaux de constat établis par huissier les 8 juin et 20 août 2014, que le permis de construire en litige a fait l'objet d'un affichage à compter de la première de ces dates, le caractère continu de cet affichage n'étant pas contesté. Alors que ces procès-verbaux mentionnent que le panneau d'affichage était visible depuis la voie publique et présent sur la parcelle de terrain cadastrée DH 893 à 905, la société Fast Food Océan Indien n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles le panneau n'aurait pas été affiché sur le terrain d'assiette, alors qu'il ressort des photographies annexées aux constats d'huissier que le panneau d'affichage a été déposé sur la partie non construite de la parcelle, le surplus étant déjà construit.

6. D'autre part, en imposant que figurent sur le panneau d'affichage du permis de construire diverses informations sur les caractéristiques de la construction projetée, les dispositions citées au point 4 ont pour objet de permettre aux tiers, à la seule lecture de ce panneau, d'apprécier l'importance et la consistance du projet, le délai de recours contentieux ne commençant à courir qu'à la date d'un affichage complet et régulier. Il s'ensuit que si les mentions prévues par l'article A. 424-16 doivent, en principe, obligatoirement figurer sur le panneau d'affichage, une erreur affectant l'une d'entre elles ne conduit à faire obstacle au déclenchement du délai de recours que dans le cas où cette erreur est de nature à empêcher les tiers d'apprécier l'importance et la consistance du projet. La circonstance qu'une telle erreur puisse affecter l'appréciation par les tiers de la légalité du permis de construire est, en revanche, dépourvue d'incidence à cet égard, dans la mesure où l'objet de l'affichage n'est pas de permettre par lui-même d'apprécier la légalité de l'autorisation de construire. En l'espèce, à supposer que le panneau d'affichage soit erroné s'agissant de la mention relative à la superficie du terrain d'assiette, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des autres mentions permettaient aux tiers d'apprécier la portée et la consistance du projet.

7. Enfin, si le panneau d'affichage mentionnait que le dossier de permis de construire pouvait être consulté à la mairie de Saint-Louis, la mention relative à l'adresse où pouvait s'effectuer cette consultation était erronée. Toutefois, compte tenu de la taille de la commune et de la circonstance que les tiers pouvaient aisément identifier le permis de construire et en consulter le dossier auprès des services municipaux, alors d'ailleurs que la société Fast Food Océan Indien n'allègue pas avoir eu des difficultés pour ce faire, cette erreur dans l'adresse est en l'espèce sans incidence sur le déclenchement du délai de recours.

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 que l'affichage réalisé le 8 juin 2014 était suffisant pour déclencher le délai de recours, qui expirait le 9 août 2014. Le recours gracieux de la société Fast Food Océan Indien, exercé le mardi 12 août 2014, était tardif et n'a pas prorogé le délai de recours contentieux. La demande de première instance était ainsi tardive et irrecevable.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Saint-Louisienne Immobilière est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du 27 mai 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Louis lui a accordé un permis de construire en vue de la construction d'un local commercial destiné à la restauration rapide au 1 rue de l'Etang. Ce jugement doit ainsi être annulé et la demande de première instance de la société Fast Food Océan Indien rejetée pour irrecevabilité.

Sur les frais liés au litige :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

11. Les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Saint-Louisienne Immobilière, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Fast Food Océan Indien demande au titre des frais qu'elle a exposés en appel. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la société Fast Food Océan Indien, qui est la partie perdante, la somme de 1 500 euros, au titre des frais que la société Saint-Louisienne Immobilière a exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1401270 du 23 février 2017 du tribunal administratif de La Réunion est annulé.

Article 2 : La demande de la société Fast Food Océan Indien tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mai 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Louis a accordé à la société Saint-Louisienne Immobilière un permis de construire et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : La société Fast Food Océan Indien versera à la société Saint-Louisienne Immobilière la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Saint-Louisienne Immobilière, à la société Fast Food Océan Indien et à la commune de Saint-Louis.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme F..., présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- M. G..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2019.

Le rapporteur,

F. G...La présidente,

S. F...Le greffier,

M. C...La République mande et ordonne au préfet de la région Réunion, préfet de La Réunion en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA21666


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA21666
Date de la décision : 12/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : SELARL SOLER-COUTEAUX / LLORENS

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-12-12;17pa21666 ?
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