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20/12/2019 | FRANCE | N°18PA02264

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 20 décembre 2019, 18PA02264


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Antinéa, représentée par M. D... A..., mandataire désigné par le Tribunal de commerce de Paris, a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1622756/2-1 du 22 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure dev

ant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 juillet 2018 et le 27 mai 2019, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Antinéa, représentée par M. D... A..., mandataire désigné par le Tribunal de commerce de Paris, a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1622756/2-1 du 22 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 juillet 2018 et le 27 mai 2019, la société Antinéa, représentée par M. A..., ayant pour avocat Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1622756/2-1 du 22 mai 2018 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés contestées, en droits et pénalités ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens de l'instance ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- dès lors qu'elle avait été radiée du registre du commerce et des sociétés le 23 janvier 2013 et que ce n'est qu'à compter du 30 juillet suivant que le Tribunal de commerce de Paris a désigné M. A... comme mandataire ad hoc, le service ne pouvait régulièrement lui adresser un avis de mise en recouvrement en date du 26 mars 2013 ;

- cet avis de mise en recouvrement, irrégulièrement notifié, n'a donc pu interrompre la prescription des exercices clos en 2008 et 2009, objets des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été réclamées ;

- en raison de l'irrégularité de la procédure suivie, le service ne pouvait lui infliger de pénalités.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la société Antinéa, représentée par M. A..., n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de procédure civile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la société Antinéa, représentée par M. A....

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Antinéa, qui exerçait une activité de holding à Paris 3ème, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces de son dossier fiscal portant sur les exercices clos en 2008 et 2009. A l'issue de ce contrôle, par une proposition de rectification en date du 18 mai 2011, le service a rehaussé ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés à concurrence de 411 000 euros en 2008 et de 200 000 euros en 2009, à raison de revenus réputés distribués en provenance de sa filiale, la SCI Les Ranaudes. Le 30 novembre 2011, l'associé unique et dirigeant de droit de la société Antinéa, M. A..., a décidé de la dissoudre. S'étant désigné à cette occasion comme liquidateur amiable, il a approuvé les comptes de liquidation de l'exercice clos en 2011 à l'occasion d'une assemblée qui s'est tenue le 9 janvier 2013, avant que la société ne soit radiée du registre du commerce et des sociétés, le 23 janvier suivant. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés subséquemment mises à la charge de la société Antinéa, assorties d'intérêts et de majorations de retard, ont été mises en recouvrement par un avis du 26 mars 2013 adressé chez M. A..., avant qu'il ne soit désigné mandataire ad hoc, chargé de rouvrir les opérations de liquidation amiable de la SAS Antinéa et de la représenter dans ses relations avec l'administration fiscale, par ordonnance du président du Tribunal de commerce de Paris du 30 juillet 2013. La société Antinéa, représentée par M. A..., relève appel du jugement du 22 mai 2018, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en cause, pour un montant de 244 295 euros en droits et pénalités.

Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance :

2. Aux termes de l'article 875 du code de procédure civile : " Le président peut ordonner sur requête, dans les limites de la compétence du tribunal, toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement ". L'article 495 du même code dispose que : " L'ordonnance sur requête est motivée. / Elle est exécutoire au seul vu de la minute (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'ordonnance du 30 juillet 2013, par laquelle le président du Tribunal de commerce de Paris a désigné M. A... comme mandataire ad hoc de la société Antinéa, a été rendue exécutoire au seul vu de sa minute. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par le service en première instance, tirée de ce que l'ordonnance en cause n'aurait pas été publiée et de ce que M. A... ne pouvait dès lors la représenter en justice, doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. D'une part, aux termes de l'article 1844-7 du code civil : " La société prend fin : (...) 4° Par la dissolution anticipée décidée par les associés (...) ". En vertu de l'article 1844-8 du même code : " La dissolution de la société entraîne sa liquidation (...). Elle n'a d'effet à l'égard des tiers qu'après sa publication. / Le liquidateur est nommé conformément aux dispositions des statuts. Dans le silence de ceux-ci, il est nommé par les associés (...). La nomination et la révocation ne sont opposables aux tiers qu'à compter de leur publication (...). / La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci. / (...) ". L'article L. 237-2 du code de commerce dispose que : " (...) La dissolution d'une société ne produit ses effets à l'égard des tiers qu'à compter de la date à laquelle elle est publiée au registre du commerce et des sociétés ". Aux termes de l'article R. 237-9 du même code : " La société est radiée du registre du commerce et des sociétés sur justification de l'accomplissement des formalités prévues par les articles R. 237-7 et R. 237-8 ".

5. En application de ces dispositions, une société prend fin par la dissolution anticipée décidée par ses associés et le mandat de son liquidateur amiable s'achève lors de la clôture des opérations de liquidation. Si la personnalité morale d'une société commerciale subsiste aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés, la société ne peut plus être représentée postérieurement à la date de clôture de la liquidation que par un administrateur ad hoc désigné par la juridiction compétente. Par suite, lorsque la liquidation de la société a été clôturée et que la mention de cette liquidation a été faite au registre du commerce, l'avis de mise en recouvrement doit être adressé à un administrateur ad hoc de la société désigné en justice, le cas échéant à la demande de l'administration.

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / (...) ". L'article L. 189 du même livre dispose que : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun. / (...) ".

7. Dès lors que la radiation de la société Antinéa du registre du commerce et des sociétés, intervenue le 23 janvier 2013, était opposable à l'administration fiscale, il lui appartenait de faire désigner un mandataire ad hoc par la juridiction compétente, afin de procéder régulièrement à la mise en recouvrement des impositions mises à sa charge, en droits et pénalités. Or, l'avis de mise en recouvrement authentifiant la créance du Trésor a été adressé au domicile de M. A..., 1 336 route de Barri à Aspremont (Alpes-Maritimes), le 26 mars 2013, avant qu'il n'eût été désigné mandataire ad hoc de la société, le 30 juillet suivant. Dans ces conditions, quand bien même M. A... a accusé réception du pli contenant l'avis de mise en recouvrement en cause, le 5 avril 2013, celui-ci doit être regardé comme ayant été irrégulièrement adressé à son domicile. En conséquence, faute de tout avis de mise en recouvrement qui aurait été régulièrement notifié avant le 31 décembre 2014, les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société Antinéa doivent être regardées comme ayant été atteintes par la prescription triennale prévue par l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.

8. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la société Antinéa, représentée par M. A..., est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur les dépens de l'instance :

9. La société Antinéa, représentée par M. A..., n'établit pas avoir engagé de dépens dans la présente instance. Sa demande tendant à ce qu'ils soient mis à la charge de l'Etat ne peut donc, en tout état de cause, qu'être rejetée.

Sur les frais de justice :

10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Antinéa, représentée par M. A..., présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1622756/2-1 du 22 mai 2018 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La société Antinéa, représentée par M. A..., est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Antinéa, représentée par M. A..., est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., mandataire de la société Antinéa, et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle contrôle fiscal et affaires juridiques).

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 20 décembre 2019.

Le rapporteur,

C. B...Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02264


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02264
Date de la décision : 20/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Christelle ORIOL
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : GUIROY

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-12-20;18pa02264 ?
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