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10/07/2020 | FRANCE | N°17PA23812

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 10 juillet 2020, 17PA23812


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... E... et Mme K... F... épouse E... ont demandé au tribunal administratif de la Réunion, à titre principal, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune des Avirons a rejeté leur demande du 26 juin 2012 tendant à ce qu'il prenne les mesures propres à faire cesser les nuisances sonores et olfactives relatives au fonctionnement de la cuisine centrale de la commune, d'autre part, d'enjoindre à la commune des Avirons de mettre en conformité les installations techniques

de cette cuisine avec les règlements nationaux et locaux, dans un délai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... E... et Mme K... F... épouse E... ont demandé au tribunal administratif de la Réunion, à titre principal, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune des Avirons a rejeté leur demande du 26 juin 2012 tendant à ce qu'il prenne les mesures propres à faire cesser les nuisances sonores et olfactives relatives au fonctionnement de la cuisine centrale de la commune, d'autre part, d'enjoindre à la commune des Avirons de mettre en conformité les installations techniques de cette cuisine avec les règlements nationaux et locaux, dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, et enfin, de condamner la commune des Avirons à leur verser la somme de 440 328 euros en réparation des préjudices causés par l'existence et le fonctionnement de sa cuisine centrale, et à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise pour déterminer la nature des préjudices subis, leur ampleur, les solutions techniques pour y remédier, le montant des réparations.

Par un jugement n° 1200709 du 24 août 2017, le tribunal administratif de la Réunion a :

1. annulé la décision implicite du 29 août 2012 du maire de la commune des Avirons en tant qu'elle refuse de faire cesser les nuisances sonores liées au fonctionnement de la cuisine centrale de la commune des Avirons ;

2. enjoint au maire de la commune des Avirons : - de faire réaliser, dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, un hangar à l'intérieur duquel les opérations de chargement et de déchargement des camions se dérouleront et dans lequel les camions arrêteront leur moteur et mettrons leur unité de climatisation embarquée en connexion filaire, le temps de réaliser ces opérations de chargement et de déchargement ; - de prescrire sans délai aux agents de la cuisine centrale que le nettoyage des poubelles au moyen d'un nettoyeur haute pression n'intervienne pas avant 9 heures du matin, et qu'il n'excède pas une durée d'une demi-heure, sauf nécessité de service exceptionnelle ; - de faire installer un silencieux sur le tube d'échappement du groupe électrogène dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement ;

3. condamné la commune des Avirons à verser à M. et Mme E... la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi ;

4. mis à la charge définitive de la commune des Avirons les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 23 675,65 euros ;

5. rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme E... ;

6. rejeté les conclusions d'appel de garanties formées par la commune des Avirons et la société Socotec.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire complémentaire et des nouveaux mémoires, enregistrés respectivement le 6 décembre 2017, le 17 mai 2018 et le 24 janvier 2020, M. et Mme E... , représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1200709 du 24 août 2017 du tribunal administratif de la Réunion en tant que, d'une part, par l'article 3 de son dispositif, il a limité à 30 000 euros l'indemnité que la commune des Avirons a été condamnée à leur verser à titre d'indemnisation des dommages subis et, d'autre part, par son article 6, il a rejeté le surplus des conclusions de leur demande concernant l'existence d'un trouble au titre des nuisances olfactives et la demande d'injonction de faire pour réduire ces nuisances olfactives, et le préjudice lié à la perte vénale des deux villas leur appartenant ;

2°) de compléter l'article 2 du dispositif du jugement attaqué par lequel il a, entre autres, été enjoint au maire de la commune des Avirons de faire réaliser, dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, un hangar à l'intérieur duquel les opérations de chargement et de déchargement des camions se dérouleront et dans lequel les camions arrêteront leur moteur et mettrons leur unité de climatisation embarquée en connexion filaire, le temps de réaliser ces opérations de chargement et de déchargement, par l'injonction à la commune des Avirons que ce hangar soit insonorisé sur les façades, la toiture et les portes d'accès, les travaux ordonnés afin de mettre fin aux nuisances sonores, incluant l'insonorisation du groupe électrogène, devant être réalisés dans le délai de six mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, et que ces travaux donnent lieu à un rapport d'analyse, après travaux, établi par un organisme extérieur ;

3°) d'enjoindre à la commune des Avirons d'effectuer les travaux d'équipements préconisés par l'expert judiciaire sapiteur M. J... afin réduire les nuisances olfactives, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner la commune des Avirons à les indemniser du préjudice matériel lié à la perte effective de la valeur vénale de leurs deux villas (n° 7 et 9 rue Margueritte Maunier), estimée par un expert à la somme de 290 328 euros ;

5°) de porter à 187 200 euros la somme de 30 000 que le jugement attaqué a condamné la commune des Avirons à leur verser à titre d'indemnisation des troubles dans leurs conditions d'existence ;

6°) de mettre à la charge de la commune des Avirons le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que le jugement attaqué, dans ses considérants 2, 3, 4 et 5, a retenu que la commune des Avirons n'aurait pas commis d'illégalité ; en effet, en premier lieu, des fautes contractuelles ont été commises par les entreprises qui ont réalisé le bâtiment en cause au regard de sa conception, de son insertion dans le site et surtout en raison du fonctionnement non conforme aux règles en vigueur (environnement, bruit, odeurs, nuisances de toute nature etc...) ; en deuxième lieu la cuisine centrale, placée à 50 m d'un lotissement résidentiel, aurait dû faire l'objet d'une attention particulière quant à son insertion dans son environnement urbain et résidentiel ; en troisième lieu, le maire des Avirons a délivré à la commune, c'est-à-dire à lui-même, un permis de construire et un certificat de conformité alors qu'il était juge et partie ; en quatrième lieu, la mairie des Avirons a été alertée dès 2008 sur toutes les nuisances occasionnées par la cuisine centrale à son environnement immédiat et elle n'a pas réagi, faisant preuve de mauvaise foi ; en cinquième lieu, si le jugement attaqué a retenu que de nouveaux travaux étaient nécessaires pour faire respecter les normes en vigueur, s'agissant pour l'essentiel du bruit, il a négligé le problème des nuisances olfactives alors qu'un rapport d'expertise, ordonnée par la juridiction administrative elle-même, avait confirmé l'existence de ces troubles anormaux ;

- c'est à tort que la perte de la valeur vénale des deux maisons leur appartenant n'a pas été indemnisée ;

- ils ont subi des préjudices personnels du fait de l'existence et du fonctionnement de la cuisine centrale qui doivent être indemnisés.

Par des mémoires, enregistrés le 14 mars 2018 et le 21 janvier 2020, la société Socotec Réunion, représentée par Me D..., conclut, à titre liminaire, à ce qu'il soit constaté que la requête aux fins d'appel de M. et Mme E... n'est aucunement dirigée à son encontre, et qu'elle soit ainsi mise hors de cause ; à titre subsidiaire, à ce que la commune des Avirons soit déclarée irrecevable en ses éventuelles demandes dirigées à son encontre, sur la base d'un rapport d'expertise établi hors son contradictoire et qui ne lui est donc pas opposable, et qu'elle soit ainsi mise hors de cause ; de dire que la commune des Avirons est infondée à rechercher la responsabilité décennale, notamment de la société Socotec Réunion, pour un litige relevant du trouble anormal de voisinage et en l'absence de dommages matériels qui affecteraient la solidité ou la destination de la cuisine centrale ; en tout état de cause, de juger que sa responsabilité est insusceptible d'être retenue au regard de la nature et des limites de sa mission qui ne portait pas, en terme acoustique, sur les atteintes à l'environnement extérieur, non plus que sur les émergences sonores liées aux activités extérieures au bâtiment et notamment aux allées et venues de camions de livraison et au nettoyage de poubelles, alors et surtout qu'aucune prescription contractuelle n'a été communiquée par le maître d'ouvrage à la société Socotec Réunion pour lui permettre d'exercer sa mission relative à l'isolement acoustique du bâtiment, et de la mettre ainsi hors de cause, en confirmant le jugement dont il est relevé appel ; à titre infiniment subsidiaire, à ce que la société Valero Cossec Architectes, la société Austral Fluides Ingénieries dite AFI, la société Aliséa Développement Océan Indien, la société Décibel France, la société Agora soient condamnées solidairement ou in solidum à la relever et la garantir indemne de toute éventuelle condamnation qui serait mise à sa charge en principal, intérêts, frais et dépens ; à ce qu'il soit jugé que la commune des Avirons devra conserver la charge d'une quote part de responsabilité pour s'être dispensée de s'adjoindre le concours d'un bureau d'études acoustique dont elle a fait l'économie ; à ce que M. et Mme E... soient déboutés de leurs demandes indemnitaires en termes de préjudices et de troubles personnels qui ne sont justifiés ni dans leur principe, ni dans leur montant ; à ce que le versement de la somme de 8 000 euros soit mis à la charge des époux E... et de tous succombants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; à ce que les époux E... et tous succombants soient condamnés aux dépens.

Elle soutient que l'appel incident formé par la commune des Avirons à son encontre est irrecevable et subsidiairement mal fondé et que les moyens présentés par les époux E... ne sont pas fondés.

Par des mémoires, enregistrés le 30 mai 2018, le 2 janvier 2020 et le 23 janvier 2020, la SELARL Valero Cossec, représentée par Me H..., conclut à titre principal à la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a rejeté l'intégralité des demandes dirigées contre elle, à titre subsidiaire, de condamner in solidum la société SOCOTEC Réunion, la SELARL HIROU, liquidateur judiciaire de la société Alesia Développement Océan Indien et de la société Austral Fluides Ingénieries, la société DECIBEL France et la société AGORA à la garantir et à la relever indemne des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre et à ce le versement de la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la partie qui succombera sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'appel en garantie formé par la commune des Avirons à son encontre est irrecevable et que les moyens présentés par les époux E... ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 31 décembre 2019, le 23 janvier 2020 et le 7 février 2020, la commune des Avirons, représentée par Me G..., conclut, d'une part, à titre principal, au rejet de la requête ; à cette fin, elle soutient que les moyens soulevés par les époux E... ne sont pas fondés ; à titre subsidiaire, elle conclut à ce que les demandes indemnitaires des époux E... soient limitées à la somme de 15 000 euros, toutes autres causes de préjudice confondues ; d'autre part, par la voie de l'appel incident, elle conclut à ce que le jugement attaqué soit réformé en ce qu'il a rejeté les appels en garantie qu'elle avait formés à l'encontre des entreprises qui ont construit la cuisine centrale et qui l'ont conseillée en sa qualité de maître d'ouvrage ; à cette fin, elle soutient que les causes des nuisances sonores provenant de l'ouvrage public sont dues à une erreur dans le choix de la configuration de l'ouvrage et l'emplacement des quais de livraison, donc une erreur de conception de l'ouvrage et un manquement des intervenants à leurs obligations de conseil et de contrôle, ainsi qu'à des non façons ou des malfaçons, et non aux conditions de fonctionnement de la cuisine centrale, comme l'a retenu à tort le jugement attaqué. La commune des Avirons conclut ainsi :

- à titre principal, à la condamnation solidaire de la SELARL Valero Cossec, de la société AFI, de la société AGORA et de la société SOCOTEC à la garantir du montant des travaux relatifs à l'aire de chargement et de déchargement, déterminés dans l'option 2 de l'expertise judiciaire, soit la somme de 219 000 euros hors taxe ;

- à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire de la SELARL Valero Cossec, de la société AFI, de la société AGORA et de la société SOCOTEC à la garantir du montant des travaux relatifs à l'aire de chargement et de déchargement, déterminés dans l'option 1 de l'expertise judiciaire, soit la somme de 420 000 euros hors taxe,

- à la condamnation solidaire de la SELARL Valero Cossec, de la société AFI, de la société ALISEA Développement Océan Indien, de la société SOCOTEC et de la société DECIBEL France à la garantir du montant des travaux relatifs à l'extracteur de la salle des préparations chaudes, soit la somme de 18 000 euros hors taxe,

- à la condamnation de la société DECIBEL France à la garantir du montant des travaux relatifs aux groupes froid positif et négatif, soit la somme de 5 000 euros hors taxe,

- à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire de la SELARL Valero Cossec, de la société AFI et de la société AGORA à la garantir du montant des travaux nécessaires à la réparation des préjudices de perte de vue, de perte de valeur vénale des biens et de nuisances olfactives demandée par les époux E..., s'ils devaient être retenus par la Cour ;

- à la condamnation de la SELARL Valero Cossec, de la société AFI, de la société ALISEA Développement Océan Indien, de la société SOCOTEC, de la société AGORA et de la société DECIBEL France à la garantir du montant des indemnités allouées aux époux E... du fait des préjudices causés par l'ouvrage public,

- et à ce que le versement de la somme de 10 000 euros soit mise à la charge de la SELARL Valero Cossec, de la société AFI, de la société ALISEA Développement Océan Indien, de la société SOCOTEC, de la société AGORA et de la société DECIBEL France sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 24 janvier 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 février 2020 à 12 heures 00.

Un mémoire a été produit par les époux E... le 21 février 2020, soit après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement du plan local d'urbanisme de la commune des Avirons applicable à la zone 1NAU ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me Pham Hliu, avocat de M. et Mme E..., de Me D..., avocat de la société SOCOTEC Réunion, et de Me G..., avocat de la commune des Avirons.

Considérant ce qui suit :

1. En 2004 et 2005, M. et Mme E... ont fait l'acquisition de deux lots du lotissement " Pierre Cadet ", situés rue Marguerite Maunier, dans la commune des Avirons, et sur chacun desquels ils ont fait construire une villa, la première, au n° 7 de la rue, pour en faire leur résidence principale, et la seconde, au n° 9 de la rue, destinée à la location. Par un arrêté n° 203/07 du 21 décembre 2006, le maire des Avirons a délivré à sa commune un permis de construire pour l'édification d'une cuisine centrale implantée sur la parcelle cadastrée AS 956 située en partie haute des terrains de l'ancienne ferme acquis par la commune en 1999, à environ 50 mètres des lots acquis par les époux E.... Par des courriers des 12 juin 2008, 5 décembre 2008 et 2 février 2009, des propriétaires du lotissement " Pierre Cadet ", dont les époux E..., ont alerté le maire des Avirons sur le préjudice de vue lié à la réalisation de la cuisine au regard de sa hauteur et de l'implantation de divers équipements en toiture terrasse. Par lettres des 1er juillet 2008 et 4 mars 2009, le maire des Avirons les a assurés de la stricte conformité des travaux réalisés au regard du permis de construire délivré, ainsi qu'aux règles d'urbanisme applicables. A la suite de la réception des travaux le 10 août 2009, la cuisine centrale est entrée en service à la rentrée scolaire 2009-2010 ; elle élabore et fournit 1 500 repas par jour en un seul service pour les six écoles de la commune et sert également de restaurant administratif pour les fonctionnaires de la commune. Par un courrier du 9 février 2011, M. et Mme E... ont demandé au maire des Avirons de prendre les mesures propres à faire cesser les nuisances sonores générées par le fonctionnement de la cuisine, et notamment celles liées à l'usage des extracteurs d'air et du groupe électrogène. Par une lettre du 25 février 2011, le maire des Avirons a répondu que la commune allait faire procéder à une campagne de mesure acoustique, et qu'elle rechercherait les solutions techniques appropriées en cas de dépassement des normes. L'étude acoustique demandée par la commune ayant été réalisée,

M. et Mme E... ont demandé au maire des Avirons, le 24 octobre 2011, de leur faire connaître les dispositions prises pour atténuer les nuisances sonores provenant de l'activité de la cuisine centrale ; le 30 octobre 2011, le maire des Avirons leur a communiqué le rapport de l'étude réalisée et les a informés qu'il avait demandé une étude complémentaire pour déterminer les solutions techniques propres à diminuer les bruits provenant de l'activité de la cuisine, au vu de laquelle les mesures adéquates seraient arrêtées. Par des courriers des 24 novembre 2011 et 6 février 2012, les époux E... se sont de nouveau plaints auprès du maire des Avirons de la persistance des nuisances sonores liées au fonctionnement de la cuisine centrale. En l'absence de réponse de la commune, les époux E... ont alors demandé au maire des Avirons, par une lettre du 26 juin 2012, reçue le 28 juin suivant, de faire cesser les nuisances sonores et olfactives liées au fonctionnement de la cuisine centrale, en l'informant qu'à défaut ils saisiraient le juge administratif pour obtenir la réalisation des travaux nécessaires ; dans le même courrier, ils demandaient que la commune des Avirons leur verse la somme de 310 000 euros en réparation des préjudices qu'ils subissaient depuis de nombreuses années du fait de ces nuisances. Du silence gardé par la commune des Avirons sur ces demandes est née une décision implicite de rejet le 29 août 2012.

2. Par le jugement attaqué du 24 août 2017, le tribunal administratif de la Réunion a annulé la décision implicite du 29 août 2012 du maire de la commune des Avirons en tant qu'elle refuse de faire cesser les nuisances sonores liées au fonctionnement de la cuisine centrale de la commune des Avirons, a enjoint au maire de la commune des Avirons de faire réaliser, dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, un hangar à l'intérieur duquel les opérations de chargement et de déchargement des camions se dérouleront et dans lequel les camions arrêteront leur moteur et mettrons leur unité de climatisation embarquée en connexion filaire, le temps de réaliser ces opérations de chargement et de déchargement, de prescrire sans délai aux agents de la cuisine centrale que le nettoyage des poubelles au moyen d'un nettoyeur haute pression n'intervienne pas avant 9 heures du matin, et qu'il n'excède pas une durée d'une demi-heure, sauf nécessité de service exceptionnelle et de faire installer un silencieux sur le tube d'échappement du groupe électrogène dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, a condamné la commune des Avirons à verser à M. et Mme E... la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice subi, a mis à la charge définitive de la commune des Avirons les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 23 675,65 euros, a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. et Mme E... et a rejeté les conclusions d'appel de garanties formées par la commune des Avirons et la société Socotec. M. et Mme E... demandent la réformation de ce jugement en tant que, d'une part, par l'article 3 de son dispositif, il a limité à 30 000 euros l'indemnité que la commune des Avirons a été condamnée à leur verser à titre d'indemnisation des dommages subis et, d'autre part, par son article 6, il a rejeté le surplus des conclusions de leur demande concernant l'existence d'un trouble au titre des nuisances olfactives et la demande d'injonction de faire pour réduire ces nuisances olfactives, et le préjudice lié à la perte vénale des deux villas leur appartenant, et enfin en tant que les injonctions de l'article 2 du dispositif du jugement sont incomplètes.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, le jugement attaqué, après avoir rappelé " qu'en vertu des dispositions des articles R. 1334-31 et suivants du code de la santé publique, dans leur rédaction en vigueur à la date de la décision de refus attaquée, sont interdits les bruits dont l'émergence globale, égale à la différence entre le niveau de bruit ambiant, comportant le bruit particulier en cause, et le niveau du bruit résiduel constitué par l'ensemble des bruits habituels, extérieurs et intérieurs, correspondant à l'occupation normale des locaux et au fonctionnement habituel des équipements, en l'absence du bruit particulier en cause, dépasse 5 dB(A) en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB (A) en période nocturne (de 22 heures à 7 heures) ", a estimé " qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'étude daté du 14 juin 2011, réalisé par le bureau d'étude AIEE à la demande de la commune des Avirons, et à la suite duquel aucun des travaux n'avaient encore été réalisés, qu'en période diurne, les niveaux sonores en provenance des extracteurs d'air et des groupes froids atteignent 13 dB(A), sans même prendre en compte les niveaux sonores générés par le groupe électrogène ; qu'il ressort de la même étude que, à la même date, en période nocturne, les niveaux sonores en provenance des groupes froids atteignent 4 dB(A) ; que, dans ces conditions, les époux E... sont fondés à soutenir que le maire de la commune des Avirons n'a pu, sans commettre d'illégalité, rejeter implicitement, le 29 août 2012, leur demande tendant à la réalisation des travaux propres à faire cesser les nuisances sonores générées par le fonctionnement de la cuisine centrale, sans que la commune puisse utilement se prévaloir de la circonstance que le projet de réalisation d'une cuisine centrale aurait été acté par le conseil municipal avant l'achat de leurs terrains par les requérants, de ce que les crédits nécessaires aux travaux d'installation des écrans anti-bruits et des silencieux sur la cuisine centrale ont été prévus au budget 2012 de la commune et de ce que l'acte d'engagement passé pour la réalisation de ces travaux a été signé avant le 12 février 2013 ; ", pour, dans l'article 1er de son dispositif, annuler " la décision implicite du 29 août 2012 du maire de la commune des Avirons en tant qu'elle refuse de faire cesser les nuisances sonores liées au fonctionnement de la cuisine centrale de la commune des Avirons ". Par suite, l'argumentation des époux E..., qui soutiennent que le jugement attaqué aurait retenu que le maire de la commune des Avirons n'aurait pas commis d'illégalité s'agissant de la cessation des nuisances sonores liées au fonctionnement de la cuisine centrale, n'est pas fondée.

4. En second lieu, les époux E... ont également demandé, par leur courrier du 26 juin 2012, rejeté implicitement le 29 août 2012, de faire cesser les nuisances olfactives liées au fonctionnement de la cuisine centrale. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'expert et de celui de son sapiteur, que lors de la réunion sur site du 27 octobre 2015, des odeurs de cuisine en provenance de la cuisine centrale étaient perceptibles depuis la terrasse des époux E.... Toutefois, il ressort du rapport du sapiteur que la perception de ces odeurs de cuisine est fonction du type de repas élaboré, de la force et de l'orientation du vent, tandis que les époux E... n'établissent pas le caractère permanent du préjudice olfactif dont ils se plaignent. Par suite, ces nuisances olfactives n'excédant pas les sujétions normales, imposées dans un but d'intérêt général, que les personnes vivant à proximité d'un équipement public sont tenues de supporter sans contrepartie, les époux E... ne sont pas fondés à soutenir que le rejet implicite, par le maire de la commune des Avirons, de leur demande du 26 juin 2012 tendant à ce qu'il fasse cesser les nuisances olfactives liées au fonctionnement de la cuisine centrale serait entaché d'illégalité.

Sur la responsabilité de la commune des Avirons :

5. En premier lieu, les époux E... ne peuvent directement se prévaloir, pour engager la responsabilité de la commune des Avirons, de fautes contractuelles, qu'au surplus ils n'établissent pas, qui auraient été commises par les entreprises qui ont réalisé le bâtiment de la cuisine centrale, seule la commune des Avirons pouvant, le cas échéant, appeler en garantie ces entreprises.

6. En deuxième lieu, les époux E... soutiennent que le permis de construire de la cuisine centrale, délivré le 21 décembre 2006, serait été entaché d'illégalité. D'une part, la circonstance que le maire de la commune a délivré le permis de construire à la commune des Avirons n'est pas constitutive d'une irrégularité. D'autre part, l'article 1NAU 1 (occupations et utilisations du sol admises) du règlement du plan local d'urbanisme disposant que " II. Sont admis sous condition : (...) 4) Les équipements publics. (...) " et, en tout état de cause, l'article 1NAU 2 du même règlement (occupations et utilisations du sol interdites) disposant que " sont interdits : / 1) Les installations classées pour la protection de l'environnement sauf celle visées à l'article NAU1-II ", les époux E... ne sont pas fondés à soutenir que la construction d'une cuisine centrale pour les écoles de la commune, qui constitue un équipement public, aurait méconnu les dispositions règlementaires précitées. En outre, si l'article 1NAU 11 (aspect extérieur) du même règlement dispose que " toute construction doit s'intégrer dans l'espace qui l'environne. Cet espace est conditionné par le climat, la topographie, la végétation existante, les constructions voisines, la forme de la parcelle. Ces cinq conditions principales influent sur l'implantation de la construction, son orientation, le choix des matériaux et des couleurs. / Le choix du lieu d'implantation et la disposition sur le terrain se feront de façon à privilégier une bonne insertion paysagère en fonction de la topographie. (...) / 1) Il est recommandé d'éviter (...) d'implanter en façade ou toiture, visible depuis l'espace public, les climatiseurs, chauffe-eau solaires, antennes paraboliques (...). / 2) Il est recommandé d'employer - les toitures à 4 pans sur les volumes principaux des constructions isolées : les pentes seront comprises entre 30 et 45° (15 à 45° pour les volumes secondaires) ; - les matériaux de couverture suivants : * tôle peinte ou à peindre, ondulée ou plane ; * bois (bardeaux ou clins) peint. (...) - une composition générale de façade basée sur la symétrie ; le volume du projet fera ressortir au moins un volume principal : le faîtage principal sera parallèle à la voie principale bordant la parcelle. / (...) - les couleurs neutres, claires ou pastel pour les grandes surfaces (...) ", il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de bâtiment à usage de cuisine centrale, dont l'implantation était conditionnée par la forme allongée et relativement étroite de la parcelle d'assiette cadastrée AS 956, par la déclivité du terrain et par le réseau viaire la desservant, aurait méconnu les dispositions précitées quant à ses caractéristiques architecturales et son intégration dans l'espace environnant (un quartier pavillonnaire), quand bien même certaines des " recommandations " précitées, notamment pour ce qui concerne la toiture du bâtiment, n'ont pas été suivies dans le projet. De plus, les époux E..., en se bornant à soutenir, dans leur mémoire enregistré au greffe de la Cour le 24 janvier 2020, que " la hauteur totale du bâtiment ne devait pas dépasser 4,8 mètres par rapport au terrain naturel ", n'établissent ni que les dispositions de l'article 1NAU 10 (hauteur maximum des constructions) du même règlement, dont aucune ne fixe une hauteur maximale de 4,8 mètres par rapport au terrain naturel, auraient été méconnues par le permis de construire délivré le 21 décembre 2006, ni que le bâtiment, tel qu'il a été réalisé, aurait une hauteur supérieure à celle prévue par les plans annexés à ce permis de construire, notamment du fait de l'installation sur la toiture-terrasse de la cuisine centrale de certains équipements techniques, et méconnaîtrait de ce fait les dispositions réglementaires de l'article 1NAU 10. Enfin, la circonstance que la toiture-terrasse du bâtiment projeté ne supportait, sur les plans annexés à ce permis de construire, aucun équipement, alors que ceux-ci (une centrale à climatisation et des extracteurs d'air pollué) y ont été installés une fois le bâtiment construit, est sans incidence sur la légalité du permis de construire délivré le 21 décembre 2006. Par suite, les époux E... n'établissent pas que l'illégalité alléguée du permis de construire délivré le 21 décembre 2006 pour la construction de la cuisine centrale serait à l'origine des préjudices dont ils soutiennent être victimes.

7. En troisième lieu, comme il a été dit ci-dessus, le rejet implicite, par le maire de la commune des Avirons, de la demande du 26 juin 2012 des époux E... tendant à ce qu'il fasse cesser les nuisances sonores liées au fonctionnement de la cuisine centrale étant entaché d'illégalité, et les époux E... supportant, du fait du fonctionnement de cet ouvrage, par rapport auquel ils sont tiers, un dommage excédant les sujétions que les riverains d'un tel ouvrage public sont normalement appelés à supporter dès lors que la commune des Avirons n'a pas pris de mesures suffisantes pour éviter, depuis la mise en service de la cuisine centrale, les nuisances qu'elle est réglementairement tenue de prévenir, ils sont fondés à rechercher la responsabilité de la commune des Avirons au titre des nuisances sonores liées au fonctionnement de la cuisine centrale, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges.

Sur les conclusions indemnitaires :

8. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les premiers juges ont fait une juste appréciation du dommage anormal et spécial généré par les nuisances sonores provenant de la cuisine centrale, tant avant la réalisation des travaux d'installation des écrans anti-bruits et des silencieux sur la cuisine en 2013 qu'après la réalisation de ces travaux, contrairement à ce que soutiennent en appel les requérants, en allouant à chacun des époux E... une indemnité de 15 000 euros, soit une indemnité totale de 30 000 euros.

9. En deuxième lieu, les nuisances olfactives constatées n'excédant pas les inconvénients causés par le voisinage normal d'un ouvrage public tel que celui de la cuisine centrale des Avirons, comme il a été dit ci-dessus, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté leur demande indemnitaire présentée à ce titre.

10. En troisième lieu, dès lors que, comme il a été dit ci-dessus, le permis de construire délivré le 21 décembre 2006 pour la construction de la cuisine centrale n'étant pas entaché d'illégalité, la demande indemnitaire des époux E... tendant à ce que soit réparé leur préjudice de vue ne peut qu'être rejetée.

11. En quatrième lieu, si les époux E... font valoir qu'ils ont subi des troubles dépressifs importants les ayant conduits à l'abandon de leur activité professionnelle respective (Mme E... exerçant la profession de chirurgien-dentiste dans cette même commune des Avirons et M. E... étant chef d'entreprise), ils ne démontrent pas que ces troubles dépressifs et leurs conséquences professionnelles seraient imputables aux seules nuisances sonores générées par le fonctionnement de la cuisine centrale, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges.

12. En cinquième lieu, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, si les époux E... demandent, sur la base d'une expertise immobilière réalisée à leur demande, le versement d'une somme de 290 328 euros au titre de la perte de valeur vénale des deux lots qu'ils ont acquis en 2004 et 2005 aux numéros 7 et 9 de la rue Marguerite Maunier, ils n'allèguent pas avoir envisagé de céder ces lots ; dès lors, ce préjudice ne présentant qu'un caractère purement éventuel, il ne saurait ouvrir droit à indemnisation.

Sur les mesures d'injonction :

13. Le jugement attaqué, après avoir notamment considéré, dans son point 8, " qu'il résulte du même rapport d'expertise que les niveaux sonores engendrés en matinée, à partir de 5 heures, tant par les arrivées et départs avec déchargement des véhicules des fournisseurs, que par les arrivées et départs des véhicules de livraison des repas vers les écoles (moteur de leur unité de climatisation embarquée, claquement des portes, conversation à vive voix, utilisation de charriots à roues dures), ainsi que par le nettoyage des poubelles, notamment au moyen d'un nettoyeur à haute pression, sont très supérieurs aux valeurs d'émergence autorisées par les articles R. 1334-31 et suivants du code de la santé publique pour atteindre, ponctuellement, 6 à 18 dB (A) suivant le type de véhicule et son groupe froid intégré et les précautions prises par les chauffeurs et opérateurs de manutention ; que, dans ces conditions, l'exécution du présent jugement implique nécessairement, ainsi que le préconise l'expert, que les opérations de chargement et de déchargement des camions se déroulent sur des quais confinés à l'intérieur d'un hangar fermé dans lequel les camions arrêteront leur moteur et mettront leur unité de climatisation embarquée en connexion filaire ", et, dans son point 9, " qu'il résulte également du rapport rédigé par M. A... que les niveaux sonores en provenance du groupe électrogène, lorsque celui-ci fonctionne, dépassent également les valeurs d'émergence autorisées par les articles R. 1334-31 et suivants du code de la santé publique pour atteindre les 13 d(B) A ; que, par suite, l'exécution du présent jugement implique nécessairement que la commune réalise les travaux préconisés par l'expert pour faire cesser cette situation ", a enjoint au maire de la commune des Avirons, dans l'article 2 de son dispositif, " de faire réaliser, dans un délai de six mois à compter de la notification du présent jugement, un hangar à l'intérieur duquel les opérations de chargement et de déchargement des camions se dérouleront et dans lequel les camions arrêteront leur moteur et mettront leur unité de climatisation embarquée en connexion filaire, le temps de réaliser ces opérations de chargement et de déchargement " et " de faire installer un silencieux sur le tube d'échappement du groupe électrogène dans un délai de six mois à compter de la notification du présent jugement ".

14. Il ne résulte pas de l'instruction que les injonctions ainsi adressées par le jugement attaqué au maire de la commune des Avirons, qui sont particulièrement précises et détaillées, seraient insuffisantes pour faire cesser les nuisances sonores émanant de la cuisine centrale qui excèdent les inconvénients normaux de voisinage, ni que la mauvaise foi alléguée de la commune des Avirons serait telle qu'elle ferait obstacle à leur force contraignante de sorte qu'il soit nécessaire de prononcer une astreinte. Par suite, les conclusions des époux E... tendant à ce qu'il soit enjoint au maire de la commune des Avirons d'insonoriser de l'intérieur le hangar dont la réalisation a été ordonnée par l'article 2 du jugement attaqué par des pièges à sons, conformes aux normes en vigueur pour des activités bruyantes, tant pour ce qui concerne sa toiture que ses façades et ses portes, et qu'une telle insonorisation soit également réalisée dans les locaux du groupe électrogène, doivent être rejetées.

15. Il résulte de tout ce qui précède que les époux E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 24 août 2017, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté leur demande.

Sur l'appel incident de la commune des Avirons, et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité :

16. La commune des Avirons soutient que les causes des nuisances sonores provenant de l'ouvrage public constituée par la cuisine centrale sont dues à une erreur dans le choix de la configuration de l'ouvrage et l'emplacement des quais de livraison, c'est-à-dire une erreur de conception de l'ouvrage et un manquement des intervenants à leurs obligations de conseil et de contrôle, ainsi qu'à des non façons ou des malfaçons, et qu'ainsi le jugement attaqué a estimé à tort, s'agissant des appels en garantie formés par la commune, " que le dommage subi par M. et Mme E..., du fait des nuisances sonores générées par la cuisine centrale, est essentiellement imputable aux conditions de fonctionnement de la cuisine liées au chargement et déchargement des camions de livraisons et au nettoyage des poubelles, qu'il ne trouve pas directement son origine dans des désordres affectant l'ouvrage et qui seraient de nature à entraîner la mise en jeu de la responsabilité des constructeurs envers le maître d'ouvrage sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, et que les désordres relatifs à ces nuisances ne présentant pas de caractère décennal, les appels en garantie formés par la commune à l'encontre des constructeurs doivent être rejetés ". Il résulte toutefois de l'instruction que, d'une part, comme il a été dit, l'implantation du bâtiment de la cuisine centrale et des quais de chargement et de déchargement était conditionnée par la forme allongée et relativement étroite de la parcelle d'assiette du projet, par la déclivité du terrain et par le réseau viaire permettant d'y accéder, que, d'autre part, le choix fait par la commune des Avirons, maître d'ouvrage, d'implanter une cuisine centrale de cette importance dans un quartier pavillonnaire assez densément peuplé était de nature à créer des nuisances pour les personnes résidant à proximité de cet équipement public, et enfin que les nuisances sonores générées par cette cuisine centrale sont imputables à ses conditions de fonctionnement, à l'exclusion de désordres affectant l'ouvrage. Par suite, comme l'ont à bon droit relevé les premiers juges, les appels en garantie formés par la commune des Avirons à l'encontre des constructeurs devaient être rejetés. Il suit de là que les conclusions aux fins d'appel incident de la commune des Avirons doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

17. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance ; dès lors, les conclusions présentées à ce titre par les époux E... doivent être rejetées.

18. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de de la SELARL Valero Cossec et de la société Socotec Réunion les frais liés à l'instance.

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Selarl Valero Cossec, de la société AFI, de la société ALISEA Développement Océan Indien, de la société SOCOTEC, de la société AGORA et de la société DECIBEL France, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme de 10 000 euros que demande la commune des Avirons au titre des frais liés à l'instance et exposés par elle.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de la commune des Avirons est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune des Avirons, la SELARL Valero Cossec et la société Socotec Réunion, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... E... et Mme K... F... épouse E..., à la commune des Avirons, à la SELARL Hirou, en qualité de mandataire liquidateur des sociétés Aliséa Développement Océan Indien et Austral Fluides Ingénieries, aux sociétés Valero Cossec, Décibel, Agora et Socotec Réunion.

Copie en sera adressée au préfet de la Réunion.

Délibéré après l'audience du 27 février 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. B..., président assesseur,

- Mme Collet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 juillet 2020.

Le président de la 8ème Chambre,

J. LAPOUZADE

La République mande et ordonne au préfet de la Réunion en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

12

N° 17PA23812


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA23812
Date de la décision : 10/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

60-01-02-01-03-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité encourue du fait de l'exécution, de l'existence ou du fonctionnement de travaux ou d'ouvrages publics. Victimes autres que les usagers de l'ouvrage public. Tiers.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : CABINET MONTALESCOT - AILY - LACAZE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-07-10;17pa23812 ?
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