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06/10/2020 | FRANCE | N°19PA04211

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 06 octobre 2020, 19PA04211


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1919182/3-1 du 26 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 décembre 2019, et par un m

émoire complémentaire, enregistré le 8 janvier 2020, M. C... B..., représenté par Me D..., demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1919182/3-1 du 26 novembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 décembre 2019, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 8 janvier 2020, M. C... B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 26 novembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- il est entaché d'un vice de procédure puisqu'il a été pris en l'absence d'avis du collège des médecins de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration, alors qu'il avait apporté les pièces relatives à son état de santé aux services de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration ;

- il méconnait les dispositions du 11°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation puisque sa pathologie, l'ostéomyélite chronique, peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa santé et qu'elle ne peut être traitée dans son pays d'origine ;

- l'arrêté, en ce qu'il porte obligation de quitter le territoire français, est entaché d'un défaut de base légale ;

- il méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en ce qu'il fixe le pays à destination duquel il pourra être reconduit, il méconnait l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa vie étant menacée en cas de retour dans son pays d'origine, du fait de l'absence d'accès effectif à des traitements adaptés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... B... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 18 septembre 2020, M. C... B... conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les observations de Me D... pour M. C... B....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B..., ressortissant congolais né le 25 octobre 1972 à Kinshasa, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 19 août 2019, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai. M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler cet arrêté. Il fait appel du jugement du 26 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...)11°A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la même date : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. A défaut de réponse dans le délai de quinze jours, ou si le demandeur ne se présente pas à la convocation qui lui a été fixée, ou s'il n'a pas présenté les documents justifiant de son identité le médecin de l'office établit son rapport au vu des éléments dont il dispose et y indique que le demandeur n'a pas répondu à sa convocation ou n'a pas justifié de son identité. Il transmet son rapport médical au collège de médecins (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016, visé ci-dessus : " Pour l'établissement de son rapport médical, le médecin de l'office peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant renseigné le certificat médical et faire procéder à des examens complémentaires. / Le médecin de l'office, s'il décide, pour l'établissement du rapport médical, de solliciter un complément d'information auprès du médecin qui a renseigné le certificat médical, en informe le demandeur. / Il peut convoquer, le cas échéant, le demandeur auprès du service médical de la délégation territoriale compétente (...) ".

3. Il ressort de l'arrêté attaqué que, pour rejeter la demande de titre de séjour dont il était saisi, le préfet de police s'est fondé sur la circonstance que " le collège de médecins de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration indique le 2 janvier 2019 avoir clôturé le dossier médical de M. E... B... pour défaut de réception des documents médicaux prévue par la procédure de demande d'admission au séjour des étrangers malades ", et a estimé que M. C... B... ne remplit pas les conditions prévues par les dispositions du 11°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En l'absence de tout élément au dossier sur les documents médicaux qu'il se serait abstenu de fournir, et alors que le préfet de police produit, non l'avis que le collège était tenu de rendre sur sa nouvelle demande de titre de séjour même si aucun des documents demandés n'avait été fourni, mais un précédent avis en date du 29 août 2017, d'ailleurs favorable à la demande de M. C... B..., celui-ci est fondé à soutenir que l'arrêté lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est intervenu au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute d'avoir été précédé de l'avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, prévu par ces dispositions.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. C... B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 19 août 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Compte tenu du motif de l'annulation exposé ci-dessus, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la situation de M. C... B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... B... et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1919182/3-1 du Tribunal administratif de Paris du 26 novembre 2019 et l'arrêté du préfet de police du 19 août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation de M. C... B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... B... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugoudeau, président de chambre,

- M. A..., président assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 octobre 2020.

Le rapporteur,

J-C. A...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA04211 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04211
Date de la décision : 06/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : LUBELO-YOKA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-06;19pa04211 ?
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