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23/03/2021 | FRANCE | N°19PA03569

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 23 mars 2021, 19PA03569


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 mai 2019 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1912596 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 novembre 2019, et des pièces n

ouvelles enregistrées le 24 février 2021 M. C... D..., représenté par Me B..., demande à la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 mai 2019 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1912596 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 novembre 2019, et des pièces nouvelles enregistrées le 24 février 2021 M. C... D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 15 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. D... soutient que :

- le jugement est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- les premiers juges, qui ont mal apprécié la réalité de sa vie commune avec sa compagne, ont entaché leur jugement d'erreurs de fait et de contradictions ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- sa situation personnelle n'a pas été examinée ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le renvoi en Côte d'Ivoire porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

La requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les observations de M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... de nationalité ivoirienne, entré en France le 15 avril 2013, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de celles de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 mai 2019, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. D... relève appel du jugement du 26 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. D... soutient que le jugement est entaché d'une insuffisance de motivation concernant sa communauté de vie avec sa compagne, il résulte du point 5 du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré que les pièces versées par l'intéressé ne permettaient pas d'établir avec certitude l'ancienneté de ce concubinage et ont ainsi suffisamment motivé leur jugement. Par ailleurs, la contestation de la réponse apportée par le tribunal à ce moyen ainsi qu'à celui tiré de l'erreur d'appréciation relative à sa situation professionnelle relève du bien-fondé et non de la régularité du jugement. Les moyens tirés de l'irrégularité du jugement doivent, dès lors, être écartés.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, la motivation de la décision contestée reprend des éléments relatifs à la situation personnelle de M. D..., notamment sa date d'arrivée en France et les informations concernant sa situation professionnelle. Elle expose les considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de la décision contestée. Le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation et de son caractère stéréotypé doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la motivation de la décision contestée, que la situation personnelle de l'intéressé n'aurait pas fait l'objet d'un examen sérieux.

5. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article

L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut- être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, doit conduire l'autorité administrative à vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

7. D'une part, M. D... fait valoir qu'il réside en France depuis 2013 et qu'il est engagé dans une procédure de procréation médicalement assistée avec sa compagne. Toutefois, ni la durée de sa résidence en France, ni la présence en France de sa compagne et leur démarche procréative depuis un peu plus d'un an à la date de l'arrêté contesté, ne constituent des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. D'autre part, il ressort de l'avis défavorable émis par la direction régionale des entreprises de la concurrence et de la consommation du travail et de l'emploi qu'il existe un doute sérieux quant à l'existence de la société à l'origine de la promesse d'embauche dont se prévaut le requérant. S'il fait état de son activité d'agent de sécurité au cours de l'année 2016 et de son activité de peintre entre janvier 2014 et avril 2015 puis de janvier à mars 2017, ainsi que de son engagement comme bénévole auprès de l'association Emmaüs défi, ces éléments, appréciés au regard de la durée de sa résidence habituelle en France, sont insuffisants et ne peuvent à eux seuls être regardés comme des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

9. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".

10. M. D... se prévaut de son projet familial et de sa communauté de vie avec une compatriote, tous deux résidant chez l'oncle de cette dernière. Il n'est toutefois pas contesté que la compagne de l'intéressé est également en situation irrégulière sur le territoire français. La circonstance que le couple serait engagé dans une procédure de procréation médicalement assistée depuis le 16 mars 2018 ne fait pas obstacle à ce que leur vie commune et leurs démarches procréatives se poursuivent ailleurs qu'en France, et notamment en Côte d'Ivoire. Il n'est pas établi que le suivi de l'état de santé de M. D... ne pourrait pas se poursuivre dans son pays d'origine. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'il s'est maintenu en France en dépit de la décision du 5 avril 2016 lui faisant obligation de quitter le territoire et qu'il ne justifie pas à la date de l'arrêté contesté d'une intégration professionnelle particulière. Par ailleurs, il n'est pas établi que l'intéressé serait dépourvu d'attache en Côte d'Ivoire où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente et un an. Dans ces conditions, et en dépit de l'engagement associatif de M. D..., ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard aux buts poursuivis, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

11. Pour les motifs exposés au point 10 du présent arrêt, le préfet de police a pu, sans méconnaître les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, fixer la Côte d'Ivoire, pays dont l'intéressé à la nationalité, comme pays de renvoi.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'annulation du jugement et de l'arrêté du 15 mai 2019 doivent être rejetées. Ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte doivent l'être par voie de conséquence. Les conclusions de son conseil présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 11 juillet 1991doivent l'être également.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au ministre de l'intérieur et à

Me A... B.... Copie en sera transmise au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. E..., président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Jayer, premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2021.

L'assesseur le plus ancien,

M-D. JAYER Le président de la formation de jugement,

président-rapporteur,

Ch. E... Le rapporteur,

Ch. E...Le président,

M. E...

Le greffier,

A. DUCHER

Le greffier,

A. DUCHER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 19PA03569


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03569
Date de la décision : 23/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SIMON

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-03-23;19pa03569 ?
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