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09/06/2021 | FRANCE | N°20PA03063

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 09 juin 2021, 20PA03063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 août 2019 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1923595/6-3 du 6 février 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 octobre 2020, M. B

..., représenté par Me A... C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1923595/6-3 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 août 2019 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1923595/6-3 du 6 février 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 octobre 2020, M. B..., représenté par Me A... C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1923595/6-3 du 6 février 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 août 2019 du préfet de police contesté devant ce tribunal ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 6° ou du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'article L. 313-14 du même code dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour :

- cette décision est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, la commission du titre de séjour n'ayant pas été consultée en méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le délai d'instruction de sa demande de renouvellement de titre de séjour de près de quatre ans est déraisonnable et n'est pas justifié pour évaluer la contribution à l'entretien et à l'éducation de son enfant de dix ans ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie sa participation à l'éducation et à l'entretien de son enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; le préfet de police qui n'a pas pris en compte tous les éléments propres à sa situation, n'a pas fait usage de son pouvoir de régularisation ; si le préfet de police estimait qu'il ne pouvait plus prétendre à un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, il pouvait lui délivrer un titre de séjour sur un autre fondement ;

S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

- ces décisions sont illégales du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 avril 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 7 septembre 2020, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par ordonnance du 15 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant sénégalais né le 15 mars 1958, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de police a pris à son encontre, le 5 août 2020, un arrêté par lequel il a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement n° 1923595/6-3 du 6 février 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. La décision en litige vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment, son article L. 511-1. Après avoir mentionné les dispositions du 6° de l'article L. 511-1 de ce code sur le fondement desquelles la demande de renouvellement de séjour de M. B... a été examinée, la décision contestée expose des éléments suffisants sur la situation personnelle et familiale du requérant en relevant qu'il est entré sur le territoire français en 1991, selon ses déclarations, qu'il n'a pas été en mesure de prouver la nationalité française de sa fille et qu'il ne justifie pas contribuer de manière effective à son entretien et à son éducation, qu'il est célibataire, qu'il ne justifie pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger où vivent trois proches parents et où il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans et que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour, qui fait état d'éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé, comporte l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait exigées par les dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de la décision litigieuse qui est suffisamment motivée, ni des autres pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. B.... Ainsi, contrairement à ce que fait valoir le requérant, la fiche de salle établie le 14 janvier 2019, qu'il a signée, porte la mention en en-tête " titre de séjour demandé : vie privée et familiale ". La circonstance qu'ait été mentionnée, dans le cadre réservé à l'activité actuelle, " demande dix ans " n'est pas suffisante à elle seule pour estimer que M. B... avait entendu solliciter la délivrance d'une carte de résident de dix ans. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait dû examiner sa demande sur ce fondement. Le moyen invoqué ne peut donc qu'être écarté.

5. En troisième lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir du délai écoulé entre sa demande de renouvellement de titre et la date de l'arrêté contesté, ce délai n'ayant pas d'influence sur la légalité de la décision attaquée. Au demeurant, il lui était loisible de contester la décision implicite de refus de renouvellement de son titre de séjour née du silence gardé par l'autorité préfectorale pendant plus de quatre mois sur sa demande, l'intéressé ayant d'ailleurs été mis en possession, pendant l'instruction de sa demande, de récépissés l'autorisant à exercer son activité. Par suite, le moyen tiré du caractère déraisonnable du délai d'instruction de la demande de renouvellement de titre de séjour doit être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) ; / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / (...) ".

7. M. B..., qui reprend en appel, à l'appui de nouvelles pièces, le moyen qu'il avait invoqué devant le tribunal tiré de la méconnaissance du 6° l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se prévaut de plusieurs avis de dépôt d'espèces de 100 euros, de virements bancaires effectués sur le compte bancaire de la mère de son enfant de 2015 à 2019, ainsi que de l'achat de billets de train à destination du Havre, où réside sa fille avec sa mère. A supposer qu'il puisse être regardé comme justifiant contribuer financièrement à l'entretien de son enfant, pour un montant au demeurant très modeste, il n'apporte aucun élément pertinent de nature à démontrer qu'il participe effectivement à son éducation. A cet égard, les billets de train qu'il produit en appel ne sont pas suffisamment probants pour justifier des liens avec son enfant alors que certains ont été émis antérieurement à la naissance de l'enfant, ne sont pas nominatifs ou n'ont pas été compostés. Il suit de là, alors même que M. B... a produit l'acte de naissance de son enfant ainsi que la copie de sa carte nationale d'identité, qu'il ne justifie plus remplir les conditions prévues au 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces circonstances, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En cinquième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 7. ci-dessus, que M. B... n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni ne justifiant de la durée de résidence qu'il invoque, le préfet de police n'était pas tenu, ainsi que l'a rappelé le tribunal, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande et n'a pas, dès lors, entaché la décision contestée d'un vice de procédure.

9. En sixième lieu, M. B... soutient qu'il est entré en France en 1991, qu'il est le père d'un enfant de nationalité française dont il contribue à l'éducation et à l'entretien, qu'il justifie résider régulièrement sur le territoire français depuis plus de dix ans, qu'il est inséré professionnellement et qu'il est malade. Toutefois, il n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il serait entré en France en 1991 ni qu'il y résiderait depuis 2009 sous couvert soit de récépissés de titre de séjour soit de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, le préfet de police indiquant que ce n'est que le 12 juillet 2012 qu'il s'est présenté à la préfecture du Val-d'Oise pour solliciter son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, M. B... a déclaré, ainsi que cela ressort de la fiche de salle, établie le 14 janvier 2019, être célibataire et ne pas être dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine. S'il ressort des pièces du dossier que son état de santé nécessite une surveillance, il ne ressort d'aucun élément produit qu'il ne pourrait pas faire l'objet d'une prise en charge appropriée au Sénégal. Par suite, alors même que M. B... a produit des bulletins de salaire établissant qu'il a travaillé, pour la période 2015-2016, en qualité de commis de cuisine, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, dont il ne peut justifier l'ancienneté au 8 juillet 2002, puis en cette qualité ou en qualité d'employé de restauration, de chef de partie ou de cuisinier dans le cadre de missions intérimaires, pour la période de 2017 à juin 2019, cette seule circonstance n'est pas suffisante pour estimer que le préfet de police aurait entaché la décision contestée d'erreur manifeste d'appréciation en n'exerçant pas son pouvoir de régularisation.

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que ces décisions sont illégales du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour.

11. S'il est constant que M. B... est père d'un enfant mineur français,

Néné-Sadoudatou Tall, née en 2009, il ressort du dossier qu'il est séparé de la mère et, ainsi qu'il a été dit au point 7., il n'établit pas contribuer à l'entretien et à l'éducation de son enfant à la date de l'arrêté en litige. En outre, il est célibataire et n'établit pas être dépourvu de toutes attaches privées et familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 33 ans. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait porté une atteinte disproportionnée au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'il poursuit et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

12. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 11. ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

13. Enfin, eu égard à la situation de M. B... telle qu'énoncée au point 9. du présent arrêt, dont il ne ressort pas une insertion réelle ni une vie personnelle durablement établie en France, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête, ensemble les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police

Délibéré après l'audience du 26 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 9 juin 2021.

Le rapporteur,

S. E...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03063
Date de la décision : 09/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : BREMAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-09;20pa03063 ?
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