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23/06/2021 | FRANCE | N°19PA04273

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 23 juin 2021, 19PA04273


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui octroyer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1908706/1-2 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le

27 décembre 2019 et un mémoire complémentaire enregistré le 31 août 2020, Mme C..., représentée pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui octroyer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n° 1908706/1-2 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2019 et un mémoire complémentaire enregistré le 31 août 2020, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1908706/1-2 du 10 décembre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du préfet de police du 3 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui octroyer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou à défaut, de l'admettre au séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 10 jours et de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve de renonciation à l'aide juridictionnelle, en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet de police et les premiers juges, qui n'ont pas pris en compte l'impossibilité financière qui est la sienne d'accéder aux soins aux Philippines, ont ainsi méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de police n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

- la décision méconnait les dispositions de l'article R. 313-22 du même code ;

- la décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux ;

- elle ne pourra pas accéder aux soins disponibles aux Philippines du fait de son manque de ressources financières, du coût des soins dans ce pays qui ne dispose pas d'une couverture maladie universelle et de l'absence de membres de sa famille pour l'aider ;

- la décision méconnait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;

- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 513-2 du même code ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante philippine née le 3 juin 1970, et titulaire d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " valable du 11 août 2017 au 10 août 2018, a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 avril 2019, le préfet de police a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée. Mme C... relève appel du jugement du 10 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

S'agissant des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; ".

3. Pour prendre la décision contestée, le préfet de police a relevé que si Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut effectivement bénéficier d'un traitement dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce dernier.

4. Il ressort des pièces du dossier que la requérante est atteinte d'une insuffisance rénale stade IV qui nécessite un suivi néphrologique régulier et rapproché, clinique et biologique, et qu'il est hautement probable qu'elle aura besoin d'une épuration extra rénale à un horizon de deux ans. Si elle fait valoir que la prise en charge médicale est certes techniquement possible aux Philippines, et cela ressort au demeurant des mentions des certificats médicaux produits à l'instance, mais qu'elle ne pourra cependant pas en bénéficier effectivement compte tenu de son état de précarité, du coût des soins de la médecine spécialisée aux Philippines et des caractéristiques du système social de ce pays qui ne lui permettraient pas d'accéder à une aide financière, elle ne produit cependant au soutien de ses affirmations que deux certificats médicaux du 14 novembre 2019 et du 21 août 2020, postérieurs à la décision et qui se bornent à relever, sans autre précision, qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'une couverture médicale aux Philippines. Enfin, si elle fait valoir qu'elle serait isolée en cas de retour aux Philippines et qu'elle ne pourrait ainsi bénéficier d'aucun soutien de famille, il ressort de la demande de titre de séjour qu'elle a renseignée qu'y vivent sa mère et deux frères. Dans ces conditions, en prenant les décisions contestées, le préfet de police n'a ni méconnu les dispositions précitées ni commis d'erreur de droit ni méconnu l'étendue de sa compétence ni entaché sa décision d'un défaut d'examen.

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

5. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".

6. Mme C..., qui n'établit pas, ainsi qu'il a été dit au point 4, ne pas pouvoir bénéficier effectivement d'un traitement médical aux Philippines, ne démontre pas qu'elle serait exposée à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. B..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2021.

Le rapporteur,

J.-F. B...

Le président,

J. LAPOUZADELa greffière,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA04273


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04273
Date de la décision : 23/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : GALINDO SOTO

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-23;19pa04273 ?
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