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26/11/2021 | FRANCE | N°19PA04209

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 26 novembre 2021, 19PA04209


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée sous le n° 1814944, M. F... a demandé au tribunal administratif de D..., d'une part, avant-dire-droit, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de saisir la commission consultative du secret de la défense nationale afin qu'elle se prononce sur la déclassification de l'avis de sécurité établi sur sa demande d'habilitation et de la note remise à M. A... B. par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) en février 2018, et, d'autre part, d'annuler la décision du

11 avril 2018 par laquelle la secrétaire générale de la défense et de la sécuri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée sous le n° 1814944, M. F... a demandé au tribunal administratif de D..., d'une part, avant-dire-droit, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de saisir la commission consultative du secret de la défense nationale afin qu'elle se prononce sur la déclassification de l'avis de sécurité établi sur sa demande d'habilitation et de la note remise à M. A... B. par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) en février 2018, et, d'autre part, d'annuler la décision du 11 avril 2018 par laquelle la secrétaire générale de la défense et de la sécurité nationale lui a refusé l'habilitation aux informations classifiées " Très secret défense ", ensemble la décision du 12 juin 2018 rejetant son recours administratif, enfin, d'enjoindre à la secrétaire générale de la défense et de la sécurité nationale de lui délivrer l'habilitation sollicitée dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1814944 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de D... a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 26 décembre 2019 et 12 octobre 2021, M. F... représenté par Me Gaschignard, avocat au Conseil d'Etat, demande à la Cour :

1°) avant-dire-droit, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de saisir la commission consultative du secret de la défense nationale afin qu'elle se prononce sur la déclassification de l'avis de sécurité établi sur sa demande d'habilitation et de la note remise à M. A... B. par la DGSI en février 2018 ;

2°) d'annuler le jugement n° 1814944 du 24 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de D... a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 11 avril 2018 de la secrétaire générale de la défense et de la sécurité nationale refusant son habilitation aux informations classifiées "Très secret défense ", ensemble la décision du 12 juin 2018 rejetant son recours administratif ;

3°) d'annuler ces décisions ;

4°) de rejeter la demande de suppression de propos prétendument outrageants, injurieux ou diffamatoires ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le Tribunal a méconnu les exigences du principe du contradictoire, reconnu notamment par la jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme, en s'abstenant de lui communiquer le mémoire produit le 28 mai 2019 par le secrétaire général de la défense nationale ; il n'a pas été en mesure de savoir si celui-ci contenait des éléments nouveaux sur lesquels il aurait ou non souhaité répliquer ;

- le jugement du Tribunal est insuffisamment motivé ;

- les décisions attaquées ont été signées par une autorité incompétente ;

- elles sont entachées d'une erreur d'appréciation ;

- la décision de refus d'habilitation aux informations classifiés " Très secret défense " est une sanction déguisée ;

- le droit à un procès équitable étant garanti par l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et en présence d'éléments de nature à laisser penser à une possible discrimination prohibée par l'article 14 de cette même convention et son protocole n°12, il convient de solliciter la déclassification des informations contenues dans l'avis de sécurité émis au sujet de sa demande et de la note remise en février 2018 à M. A... B..

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 février 2021, le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de procéder à la suppression de certains passages des écritures de M. F... en application des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le décret n° 97-464 du 9 mai 1997 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif à la création et à l'organisation des services à compétence nationale ;

- l'arrêté du 30 novembre 2011 portant approbation de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gaschignard pour M. F....

Considérant ce qui suit :

1. M. F... occupait les fonctions de chef de l'analyse stratégique et de la prospective au sein de la sous-direction des affaires internationales et de la stratégie du ministère de l'intérieur. Par décision du 11 avril 2018, la secrétaire générale de la défense et de la sécurité nationale a refusé de lui délivrer une autorisation d'accès à des informations et supports classifiés de niveau " Très secret défense " et a, par une décision du 12 juin 2018, rejeté son recours gracieux. M. F... a demandé devant le tribunal administratif de D..., d'une part, la déclassification de l'avis de sécurité établi sur sa demande d'habilitation et de la note remise à M. A... G... par la DGSI en février 2018 et, d'autre part, l'annulation des décisions mentionnées des 11 avril et 12 juin 2018. Par un jugement n° 1814944 du 24 octobre 2019, contre lequel M. F... forme régulièrement appel, le tribunal administratif de D... a rejeté ses demandes.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) la requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...) /. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

3. Le requérant soutient que le tribunal administratif de D... a méconnu les exigences du principe du contradictoire reconnu notamment par la jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme en s'abstenant de lui communiquer le mémoire produit le 28 mai 2019 par le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale. Il fait valoir qu'il n'a pas été en mesure de savoir si celui-ci contenait des éléments nouveaux sur lesquels il aurait ou non souhaité répliquer.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande présentée devant eux par M. F..., les premiers juges ne se sont pas fondés sur des faits ou moyens qui n'auraient été contenus que dans ce mémoire, lequel au demeurant ne contenait aucun élément nouveau qui n'aurait pas été précédemment mis en avant par le défendeur, et que M. F... n'a dès lors pas été privé de la possibilité d'en discuter utilement. Il suit de là que le moyen soulevé doit être écarté.

5. En second lieu, M. F... soutient que le jugement entrepris est insuffisamment motivé, les premiers juges n'ayant pas clairement pris position sur la question de savoir si la circonstance qu'il avait fréquenté un Américain spécialiste de géopolitique et proche des services secrets américains constituait un élément de sa vulnérabilité. Toutefois, contrairement à ce que soutient le requérant qui, d'ailleurs, n'a pas assorti son moyen d'une argumentation étayée, il ressort des termes du point 5 du jugement que les premiers juges ont répondu aux moyens soulevés, tirés de l'erreur de droit et de l'erreur de manifestation, après avoir cité les dispositions légales applicables et en avoir synthétisé la portée, en précisant les éléments de fait de l'espèce qui les conduisaient à qualifier le comportement du requérant au regard de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 1° (...) les directeurs d'administration centrale (...) ".

7. M. F... soutient que M. E... C..., directeur de la protection et de la sécurité de l'Etat au sein du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), n'était pas compétent pour signer les décisions attaquées au motif que, le SGDSN n'étant pas une direction d'administration centrale d'un ministère, il ne peut être regardé, ni comme un directeur d'administration centrale en application des dispositions de l'article 1er du décret 2005-850 du 27 juillet 2005, ni comme un chef de service à compétence nationale au sens de l'article 2 du décret n° 97-464 du 9 mai 1997.

8. L'administration centrale est constituée par l'ensemble des services d'un ministère disposant de compétences nationales. En application des dispositions de l'article R. 1132-1 du code de la défense, le SGDSN constitue un service du Premier ministre et est, par voie de conséquence, une administration centrale dont le poste de directeur de la protection et de la sécurité de l'Etat est assuré par un directeur d'administration centrale.

9. M. E... C... a été nommé à compter du 21 mars 2016 directeur de la protection et de la sécurité de l'Etat au sein du SGDSN par un décret du 3 mars 2016 publié au Journal officiel le 4 mars 2016. Ainsi, M. C... ayant qualité pour signer les décisions attaquées du 11 avril 2018 et du 12 juin 2018, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des actes manque en fait et doit être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 2311-7 du code de la défense : " Nul n'est qualifié pour connaître des informations et supports classifiés s'il n'a fait au préalable l'objet d'une décision d'habilitation et s'il n'a besoin, selon l'appréciation de l'autorité d'emploi sous laquelle il a placé, au regard notamment du catalogue des emplois justifiant une habilitation établie par cette autorité, de les connaître pour l'exercice de sa fonction ou l'accomplissement de sa mission ". Aux termes de l'article 23 de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale approuvée par l'arrêté du Premier ministre du 30 novembre 2011 et se trouvant en annexe à cet arrêté : " L'autorité hiérarchique doit veiller à l'habilitation du personnel placé sous sa responsabilité et, à ce titre, initier, par la constitution d'un dossier, la procédure d'habilitation au niveau requis par le catalogue des emplois. / La demande d'habilitation déclenche une procédure destinée à vérifier qu'une personne peut, sans risque pour la défense et la sécurité nationale ou pour sa propre sécurité, connaître des informations ou supports classifiés dans l'exercice de ses fonctions. La procédure comprend une enquête de sécurité permettant à l'autorité d'habilitation de prendre sa décision en toute connaissance de cause. / Les informations ou supports classifiés ne peuvent être portés à la connaissance de personnes non habilitées (...) ". Aux termes de l'article 24 de l'instruction précitée : " L'enquête de sécurité menée dans le cadre de la procédure d'habilitation est une enquête administrative permettant de déceler chez le candidat d'éventuelles vulnérabilités (...). L'enquête administrative est fondée sur des critères objectifs permettant de déterminer si l'intéressé, par son comportement ou par son environnement proche, présente une vulnérabilité, soit parce qu'il constitue lui-même une menace pour le secret, soit parce qu'il se trouve exposé à un risque de chantage ou de pressions pouvant mettre en péril les intérêts de l'Etat, chantage ou pressions exercés par un service étranger de renseignement, un groupe terroriste, une organisation ou une personne se livrant à des activités subversives. ". Aux termes de l'article 25 de cette instruction : " L'intéressé est informé de la décision défavorable prise à son endroit. Un refus d'habilitation n'a pas à être motivé lorsqu'il repose sur des informations qui ont été classifiées. ". Enfin, aux termes de l'article 26 de cette instruction : " (...) L'enquête administrative menée dans le cadre de l'habilitation s'achève par l'émission d'un avis de sécurité, par lequel le service enquêteur fait connaître ses conclusions techniques à la seule autorité compétente pour prendre la décision d'habilitation. / Cet avis est une évaluation des vulnérabilités éventuellement détectées lors de l'enquête et permet à l'autorité décisionnaire d'apprécier l'opportunité de l'habilitation de l'intéressé, au regard des éléments communiqués et des garanties qu'il présente pour le niveau d'habilitation requis. /(...)/ Si le candidat sollicite, par l'exercice d'un recours, une explication du rejet de la demande d'habilitation, il obtient communication des motifs lorsqu'ils ne sont pas classifiés. Lorsqu'ils le sont, le candidat se voit opposer les règles applicables aux informations protégées par le secret ".

11. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il statue sur une demande d'annulation d'une décision portant refus d'une habilitation " Très secret défense ", de contrôler, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, la légalité des motifs sur lesquels l'administration s'est fondée. Il lui est loisible de prendre, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux de direction de l'instruction, toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, sans porter atteinte au secret de la défense nationale. Il lui revient, au vu des pièces du dossier, de s'assurer que la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

12. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à M. F... le renouvellement de son habilitation " Très Secret-Défense ", la secrétaire générale de la défense et de la sécurité nationale s'est fondée, à la suite d'un avis émis par une enquête de sécurité, d'une part, sur le fait que celui-ci s'est connecté à internet en insérant une puce de son téléphone professionnel dans un téléphone portable non sécurisé appartenant à un tiers et, d'autre part, sur le fait qu'il a échangé, au moyen d'une adresse mail démarquée, non déclarée à son service, et sans en avertir sa hiérarchie, avec un ressortissant étranger qui s'était proposé de le recommander pour appuyer sa candidature auprès du secrétaire général de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) à un emploi important au sein de cette organisation.

13. S'agissant du premier grief, M. F... a reconnu avoir utilisé un boîtier de téléphone personnel fourni par l'une de ses connaissances pour y insérer sa puce professionnelle et s'être ainsi connecté à internet en méconnaissance des préconisations de la charte professionnelle du service au sein duquel il travaillait à la date des faits. Si le requérant fait valoir qu'un tel comportement est constitutif d'une simple imprudence, il apparaît, au regard de la sensibilité des données pouvant être contenues dans la carte SIM professionnelle de l'intéressé, et du risque que les informations contenues dans ladite carte puisse être transférées sans que l'usager du téléphone s'en rende compte, que l'intéressé a adopté un comportement l'exposant à une éventuelle vulnérabilité.

14. S'agissant du deuxième grief, M. F... fait valoir qu'au regard des fonctions qu'il occupait au sein de la sous-direction de la stratégie et des relations internationales, chargé à ce titre, de la supervision et de l'élaboration d'analyses stratégiques à long terme, il était amené à entrer régulièrement en contact avec de nombreux représentants d'Etats étrangers, incluant des agents de services de renseignement, ainsi que des membres d'institutions académiques étrangères. Il précise que son correspondant, consultant de nationalité américaine spécialisé dans le domaine de la sécurité internationale et avec lequel il a entretenu des relations épisodiques, n'est pas, à sa connaissance, un membre d'un service de renseignement étranger. Toutefois, si, au regard de ses fonctions, M. F... était amené à entrer en contact avec des partenaires étrangers exerçant dans le domaine de la sécurité internationale, il lui appartenait d'informer son service de la proposition de son correspondant de soutenir sa candidature auprès du secrétaire général adjoint de l'OTAN pour l'attribution de l'emploi pour lequel il souhaitait postuler, une telle proposition l'exposant au risque de se trouver en situation de pression ou de vulnérabilité. Par ailleurs, M. F... a, à cette occasion, omis de respecter les règles prévues au titre de la procédure d'habilitation en échangeant avec son correspondant sur une messagerie personnelle avec une adressé démarquée et non sur sa boîte professionnelle. En outre, si M. F... précise que son contact ne faisait pas partie de son environnement proche, faisant ainsi référence aux dispositions du point 24 de l'instruction ministérielle sur la délivrance des autorisations " Très secret Défense ", annexée à l'arrêté du Premier ministre du 30 novembre 2011 précité, qui définit le périmètre des obligations d'information des autorités par le titulaire de l'habilitation, il ressort, toutefois, des pièces du dossier et, sans que cela soit contesté par le requérant, que M. F... et son contact, M. D..., consultant en relations internationales de nationalité américaine, étaient en relation depuis de nombreuses années et se rencontraient en moyenne tous les deux ans, soit de manière régulière. Au regard de cette circonstance et de la nature du dernier échange entre les deux hommes sur la carrière professionnelle personnelle du requérant, M. F... aurait dû, au regard des termes de l'instruction précitée, informer les autorités compétentes de la proposition qui lui avait été faite. Dès lors, en refusant de renouveler son habilitation " Très secret défense ", la secrétaire générale de la défense et de la sécurité nationale n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. La circonstance que les différentes évaluations professionnelles de l'intéressé faisaient mention de ses excellents états de service est sans influence sur la légalité des décisions attaquées.

15. En troisième lieu, M. F... soutient que l'administration lui a infligé une sanction déguisée. Il estime à ce titre que la déclassification des informations contenues dans l'avis de sécurité mentionné au point 11 du présent arrêt est nécessaire afin de vérifier, notamment, si l'administration a entendu sanctionner des manquements professionnels. Il soutient en outre que des éléments portés à la connaissance de M. A... B., relatifs à son activité de parent d'élève responsable de la sécurité d'une école juive ont été pris en compte dans l'appréciation de sa situation et demande également à titre que soit enjoint à l'administration, par décision avant-dire-droit, de produire la note remise à M. A... B. à cette occasion. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les mérites professionnels de M. F... étaient reconnus par sa hiérarchie à l'occasion de ses évaluations professionnelles, et avaient justifié sa candidature au poste à l'OTAN mentionné au point 11 du présent arrêt, et que les éléments mentionnés aux points 12 et 13 du présent arrêté ont pu valablement être retenus pour fonder la décision de refus attaquée. Par suite, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées constituent une sanction déguisée doit être écarté. En outre, dès lors que ces éléments permettaient de fonder la décision de refus attaquée, sans que celle-ci puisse être regardée comme constituant une sanction, les éléments portés à la connaissance de M. A... B., au demeurant dans le contexte de sa prochaine affectation à l'OTAN, à supposer leur teneur établie, ne peuvent être regardés comme ayant eu une incidence sur les décisions attaquées. Par suite, il n'y a pas lieu de solliciter la communication de l'avis de sécurité mentionné ainsi que de la note adressée à

M. A... B..

16. En dernier lieu, M. F... ne fournit aucune précision à l'appui de ses allégations selon lesquelles les décisions attaquées seraient entachées de discrimination contraire aux dispositions combinées de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 14 de cette convention, ainsi que de son protocole n° 12, ces dispositions ne trouvant au demeurant pas à s'appliquer s'agissant d'une décision qui ne revêt pas un caractère de sanction ainsi qu'il a été dit au point précédent du présent arrêt.

17. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de prescrire avant-dire-droit une mesure d'instruction, que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

Sur la demande du secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale tendant à la suppression de passages diffamatoires :

18. En vertu de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, rappelant les dispositions des alinéas 3 à 5 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, les juges peuvent " prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires " d'écrits produits devant eux.

19. D'une part, s'agissant des passages de la requête de M. F... figurant en page 9, commençant par : " cette jurisprudence " et se terminant par : " imbuvable ", en page 12, en note de bas de page, commençant par : " il serait bon " et se terminant par : " pour le premier ministre. ", en page 27, commençant par : " si, plutôt " et se terminant par : " puérils ", incluant à la même page le membre de phrase : " comme en l'espèce, de cabale. " et la phrase commençant par : " victime d'un montage " et se terminant par " les services ", et enfin, page 31, commençant par : " ce serait " et se terminant par " juge administratif ", ainsi que le membre de phrase : " aucune de ses salades " figurant en note de bas de page, il convient de relever que les termes figurant dans les écritures de M. F..., dont la suppression est demandée par le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, pour regrettables qu'ils soient, n'excèdent pas les limites de la controverse entre parties dans le cadre d'une procédure contentieuse. Dès lors, il n'y a pas lieu d'en prononcer la suppression par application des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative.

20. D'autre part, s'agissant des passages de la requête de M. F... figurant en page 30 commençant par : " le juge ferait bien " et se terminant par " idiot utile ", puis, à la même page, ceux commençant par : " sur la base de ragots nauséabonds " et se terminant par : " extrême droite ", ils excèdent le droit à controverse dans le cadre d'une procédure juridictionnelle et, en tant qu'ils imputent un comportement présupposé à la juridiction administrative ou à l'administration, pris dans leur ensemble, présentent un caractère outrageant et diffamatoire. Dès lors, il y a lieu d'en prononcer la suppression en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. F... est rejetée.

Article 2 : Les passages de la requête de M. F... mentionnés au point 20 du présent arrêt sont supprimés.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale au titre des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... F... et au Premier ministre.

Copie en sera adressée au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 novembre 2021.

La rapporteure,

S. BoizotLe président,

S. Carrère

La greffière,

C. Dabert

La République mande et ordonne au Premier ministre en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA04209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04209
Date de la décision : 26/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

08-10 Armées et défense.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SCP DAVID GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-11-26;19pa04209 ?
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