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25/01/2022 | FRANCE | N°21PA04367

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 25 janvier 2022, 21PA04367


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F... et Mme H... D... épouse F... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les arrêtés du 23 juin 2020 par lesquels le préfet du Val-de-Marne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français B... le délai d'un mois et a fixé le pays destination, et d'enjoindre au préfet de leur délivrer un titre de séjour valable un an.

Par un jugement n° 2005721-2005856 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté les d

emandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 30 juillet 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F... et Mme H... D... épouse F... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les arrêtés du 23 juin 2020 par lesquels le préfet du Val-de-Marne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français B... le délai d'un mois et a fixé le pays destination, et d'enjoindre au préfet de leur délivrer un titre de séjour valable un an.

Par un jugement n° 2005721-2005856 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté les demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 30 juillet 2021 sous le n° 21PA04367, M. F..., représenté par Me Lasbeur, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 23 juin 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges ont joint sa demande et celle de son épouse, alors que les deux situations auraient dû être examinées de manière indépendante ;

- ce jugement n'est pas suffisamment motivé ; les premiers juges n'ont pas mentionné les certificats médicaux relatifs à l'état de santé de son enfant ;

- l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne lui a pas été transmis, ce qui ne lui a pas permis de le contester ;

- l'état de santé de son enfant requiert des soins qui ne peuvent être dispensés en Algérie, ce qui justifie que lui soit délivré un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le préfet a violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

II. Par une requête enregistrée le 30 juillet 2021 sous le n° 21PA04368, Mme D... épouse F..., représentée par Me Lasbeur, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er juillet 2021 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 23 juin 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges ont joint sa demande et celle de son époux, alors que les deux situations auraient dû être examinées de manière indépendante ;

- ce jugement n'est pas suffisamment motivé ; les premiers juges n'ont pas mentionné les certificats médicaux relatifs à l'état de santé de son enfant ;

- l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne lui a pas été transmis, ce qui ne lui a pas permis de le contester ;

- l'état de santé de son enfant requiert des soins qui ne peuvent être dispensés en Algérie, ce qui justifie que lui soit délivré un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le préfet a violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme G... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F..., ressortissants algériens, sont entrés en France respectivement le 1er février 2019 et le 20 mars 2018, munis d'un visa de court séjour. Ils ont sollicité la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, afin d'accompagner leur enfant malade. Par deux arrêtés du

23 juin 2020, le préfet du Val-de-Marne a refusé de leur délivrer le titre de séjour sollicité, les a obligés à quitter le territoire français B... le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. et Mme F... demandent à la cour d'annuler le jugement du 1er juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées de M. et Mme F... sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions semblables. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. D'une part, B... l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif dispose, sans jamais y être tenu, de la faculté de joindre deux ou plusieurs affaires. Cette jonction est, par elle-même, insusceptible d'avoir un effet sur la régularité de la décision rendue et ne peut, par suite, être contestée en tant que telle devant le juge d'appel. Par ailleurs, il ne résulte pas des termes du jugement attaqué que la jonction à laquelle ont procédé les premiers juges aurait eu des effets sur l'examen, par ces derniers, de chacune des demandes.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Il ressort des motifs du jugement attaqué qu'ils exposent, de manière suffisamment précise, les raisons pour lesquelles les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de reprendre explicitement chacun des arguments des requérants et de mentionner toutes les pièces produites, ont estimé que les moyens soulevés devant eux n'étaient pas fondés. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni aucune autre disposition ou principe, n'impose au préfet qui envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour au vu, notamment, d'un avis émis par l'OFII sur l'état de santé du demandeur ou d'un membre de sa famille, de communiquer cet avis préalablement à l'édiction de sa décision. Au demeurant, en l'espèce, l'avis émis par l'OFII le 21 octobre 2019 sur l'état de santé du fils des requérants a été produit devant les premiers juges, ce qui a donc permis à M. et Mme F... A... le discuter.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas B... les catégories précédentes ou B... celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

7. Pour refuser la délivrance d'un certificat de résidence à M. et Mme F... sur le fondement des stipulations précitées, le préfet du Val-de-Marne a notamment estimé que si l'état de santé de leur enfant C... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que cet état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que C... F..., né le 3 juillet 2014, souffre de troubles autistiques. Toutefois, si les certificats médicaux produits par les requérants indiquent que leur fils bénéficie d'un suivi pédiatrique en France, ils sont rédigés en termes généraux et ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation du préfet du Val-de-Marne, portée au vu de l'avis émis par les trois médecins du collège de l'OFII, quant à l'absence d'exceptionnelle gravité des conséquences d'un défaut de cette prise en charge. Un certificat médical daté du 20 mars 2019, produit par les requérants, décrit ainsi le suivi de l'enfant, et s'il indique qu'un défaut de prise en charge " pourrait " avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il n'en précise pas la nature. M. et Mme F... ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le préfet a méconnu les stipulations précitées de l'accord franco-algérien en refusant de leur délivrer un certificat de résidence en qualité d'accompagnants de leur enfant malade.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique B... l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, B... une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. M. et Mme F... soutiennent que l'état de santé de leur fils nécessite des soins en France ; ils se prévalent en outre de leur intégration professionnelle sur le territoire français, M. F... exerçant une activité de chauffeur déménageur, et Mme F... de vendeuse. Toutefois, comme il a été dit au point 7 du présent arrêt, ils n'établissent pas que le défaut de la prise en charge dont leur enfant bénéficie en France aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par ailleurs, leur entrée sur le territoire français est très récente, alors qu'ils n'établissent pas être dépourvus d'attaches familiales en Algérie, où ils ont vécu jusqu'à l'âge, respectivement, de quarante-six et quarante-trois ans, et alors en outre qu'il ressort des pièces du dossier que C... est le dernier enfant d'une fratrie de trois enfants. B... ces conditions, le préfet du Val-de-Marne n'a pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris les arrêtés contestés ; pour les mêmes motifs, il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de M. et Mme F....

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande. Leurs conclusions à fin d'annulation, ainsi par voie de conséquence que leurs conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative, doivent donc être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme F... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F..., à Mme H... D... épouse F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2022.

La rapporteure,

G. G...Le président,

I. LUBENLe greffier,

É. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA04367, 21PA04368 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04367
Date de la décision : 25/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : LASBEUR

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-01-25;21pa04367 ?
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