La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2022 | FRANCE | N°21PA04112

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 03 février 2022, 21PA04112


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) El Alamein a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire émis le 1er février 2019 par la directrice générale et l'agent comptable de l'établissement public Port autonome de Paris pour un montant de 25 066,92 euros.

Par un jugement n° 1906765/4-2 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés les 20

juillet, 12 et 27 décembre 2021, la SARL El Alamein, représentée par Me Bodin, demande à la Cour, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) El Alamein a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire émis le 1er février 2019 par la directrice générale et l'agent comptable de l'établissement public Port autonome de Paris pour un montant de 25 066,92 euros.

Par un jugement n° 1906765/4-2 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés les 20 juillet, 12 et 27 décembre 2021, la SARL El Alamein, représentée par Me Bodin, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'infirmer le jugement n° 1906765/4-2 du 20 mai 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler le titre exécutoire émis le 1er février 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement public Grand port fluvio-maritime de l'axe Seine la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement ne respecte pas les formalités de signature prévues par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le jugement n'est pas motivé s'agissant du moyen tiré de ce que les refacturations liées aux charges d'exploitation ne correspondent à aucun service rendu ;

- le titre exécutoire n'est pas suffisamment motivé dès lors que les bases de liquidation ne sont pas mentionnées " et/ou " que les calculs sont erronés, que le mode de calcul retenu pour la facturation de la redevance saisonnière du domaine public, qui est fondé sur un nombre d'unités de m2 indivisibles et qui ne correspond pas au tarif de la convention n° 3190 pour l'année 2018, augmente artificiellement le montant exigé ;

- la composante " redevance complémentaire " et la composante " refacturation des charges de site " constituent une double facturation des mêmes prestations ce qui a une influence sur le montant total de la redevance dès lors que celle-ci forme un tout ;

- la composante " redevance complémentaire ", qui ne correspond à aucun aménagement spécial qui lui est destiné, est déjà couverte par la redevance d'occupation domaniale du fait que cette dernière est calculée selon les avantages de toutes natures ;

- la " redevance complémentaire " ne peut pas plus se fonder sur les articles 5 et 6 de la convention ;

- cette même redevance fait doublon avec les charges ou redevances pour service rendu ;

- la composante " refacturation pour charges " ne correspond à aucun service rendu, qu'elles concernent le gardiennage et les barrières mobiles, l'assainissement, les ordures ménagères ou les cabinets d'aisance ;

- la convention d'occupation du domaine public qu'elle a signée aurait dû être fondée sur le cahier des charges adopté en 2012 et non sur celui adopté en 1997 ;

- la décision méconnait le principe d'égalité devant les charges publiques.

Par des mémoires en défense enregistrés les 26 novembre et 27 décembre 2021, l'établissement public Grand port fluvio-maritime de l'axe Seine, représenté par Me Vandepoorter, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SARL El Alamein la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteure publique,

- les observations de Me Bodin, représentant la SARL El Alamein,

- et les observations de Me Goachet substituant Me Vandepoorter, représentant le Grand port fluvio-maritime de l'axe Seine.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL El Alamein exploite une péniche, comportant une salle de concert et un jardin flottant, amarrée dans l'emprise du port de la Gare, au pied de la Bibliothèque Nationale de France, depuis 1997 et bénéficie depuis cette date d'une convention temporaire d'occupation du domaine public, la dernière ayant été conclue à compter du 1er janvier 2012 pour une durée de 5 ans renouvelable par tacite reconduction d'année en année sans pouvoir excéder une durée de 10 ans. Dans le cadre de l'exécution de cette convention, un titre exécutoire a été émis le 1er février 2019 pour le paiement des redevances annuelle et complémentaire d'occupation du domaine public au titre de l'année 2018 et de la redevance pour la terrasse terre-plein pour la période du 3 mai 2018 au 30 septembre 2018, pour un montant total de 25 066,92 euros. La société El Alamein relève appel du jugement du 20 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête dirigée contre ce titre exécutoire.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Dans son mémoire du 12 décembre 2021, la société requérante déclare renoncer au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative.

3. Aux termes de l'article L. 9 du code précité : " Les jugements sont motivés. ". La société requérante ne saurait faire grief au jugement attaqué de ne pas être suffisamment motivé et de ne pas avoir répondu au moyen tiré de ce que les refacturations pratiqués au titre des " charges d'exploitation du site " ne correspondent à aucun service rendu dès lors que le point 5 du jugement, qui relève que " la société requérante ne peut utilement contester la refacturation des charges de site qui a été mise à sa charge alors que le titre exécutoire contesté porte uniquement sur la redevance annuelle et la redevance complémentaire au titre de l'année 2018 ainsi que sur la redevance saisonnière pour le terre-plein terrasse du 3 mai au 30 septembre 2018 ", a répondu au moyen et est ainsi suffisamment motivé. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation et de l'omission à statuer du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En application de la convention signée le 3 décembre 2013, le titre exécutoire n° 128754 contesté met à la charge de la société requérante le paiement d'une somme de 25 066,92 euros, soit 7 737,06 euros de redevance au titre de l'occupation saisonnière du terre-plein du 3 mai au 31 juillet 2018, 7 826,98 euros au titre de la redevance pour l'occupation saisonnière du terre-plein du 1er août au 30 septembre 2018 et 9 502,88 euros pour le reste dû au titre de la redevance annuelle et de la redevance complémentaire.

5. En premier lieu, le moyen tiré de ce que le titre exécutoire n'est pas suffisamment motivé, d'une part, en ce que " les bases de liquidation (...) ne sont pas mentionnées et/ou les calculs sont erronés " et, d'autre part, en ce que le mode de calcul retenu pour la facturation de la redevance saisonnière, qui est fondé sur un nombre d'unités de m2 indivisibles et qui ne correspond pas au tarif de la convention n° 3190, augmente artificiellement le montant exigé, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué.

6. En second lieu, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel.

7. Il résulte de l'instruction que la convention d'occupation du domaine public n° 3190 " Port de la Gare " a été signée le 3 décembre 2013 entre le Port autonome de Paris d'une part et, d'autre part, Mme B..., M. A... en leurs noms propres ainsi que Mme B..., gérante de la SARL " El Alamein ". Cette convention prévoit que son titulaire s'acquittera d'une " redevance annuelle de base " pour l'utilisation du quai et du plan d'eau, d'une redevance dite " terre plein terrasse " due au titre de l'activité saisonnière, d'une redevance " complémentaire " en contrepartie de la mise à disposition des aménagements de desserte en réseaux ainsi que d'une redevance pour " charges de site " définies en fonction des services mis en place par Port autonome de Paris pour les amodiataires.

8. En se bornant à contester le fondement de la redevance complémentaire, au motif notamment d'une malfaçon rédactionnelle de la convention et de la double facturation qu'elle constituerait avec la redevance " refacturation des charges de site " et avec la redevance domaniale, et en faisant valoir que la convention signée par elle, qui aurait dû être fondée sur le cahier des charges des conditions générales approuvé le 3 octobre 2012 et non sur le cahier des charges approuvé le 4 avril 1997 s'agissant des conditions générales et le 5 décembre 1997 s'agissant des conditions spécifiques relatives aux installations à caractère d'animation et de loisirs, est de nature à entraîner une rupture du principe d'égalité devant les charges publiques, la SARL El Alamein n'établit ni le caractère illicite du contenu du contrat qu'elle a signé ni que son consentement aurait été affecté d'un vice d'une particulière gravité.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL El Alamein n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. L'établissement public Grand port fluvio-maritime de l'axe Seine n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de la SARL El Alamein tendant à ce qu'une somme soit mise à sa charge au titre des dispositions précitées doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SARL El Alamein le versement à l'établissement public Grand port fluvio-maritime de l'axe Seine d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL El Alamein est rejetée.

Article 2 : La SARL El Alamein versera à l'établissement public Grand port fluvio-maritime de l'axe Seine une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL El Alamein et à l'établissement public Grand port fluvio-maritime de l'axe Seine.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 février 2022.

Le rapporteur,

J.-F. GOBEILL

Le président,

J. LAPOUZADELa greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

2

N° 21PA04112


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04112
Date de la décision : 03/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-02-01 Domaine. - Domaine public. - Régime. - Occupation.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : LAFARGE ASSOCIES SELARL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-03;21pa04112 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award