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11/03/2022 | FRANCE | N°21PA02674

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 11 mars 2022, 21PA02674


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 2010373, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 8 juin 2020 par laquelle le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2010373 du 16 mars

2021, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du préfet de police de Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 2010373, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 8 juin 2020 par laquelle le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2010373 du 16 mars 2021, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du préfet de police de Paris en date du 8 juin 2020 et enjoint au préfet de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la " mention vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés respectivement les 17 mai et 4 novembre 2021, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2010373 du 16 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Melun a fait droit à la demande de M. A... en annulant son arrêté du 8 juin 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, et en lui enjoignant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a fait droit au moyen tiré des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aux dispositions du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense et des pièces complémentaires, enregistrés le 24 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Abdel Salam, conclut au rejet au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de procéder au renouvellement de son titre de séjour ou, à défaut, de procéder à un réexamen de sa situation, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Il soutient que c'est à bon droit que le Tribunal a annulé l'arrêté attaqué pour méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, subsidiairement il maintient les autres moyens de première instance tirés de l'insuffisance de motivation, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14, de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot,

- et les observations de Me Abdel Salam pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 29 mai 1991, entré en France selon ses déclarations le 21 juillet 1991, a sollicité et obtenu la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " qui a été renouvelé, en dernier lieu, le 29 septembre 2017. Fin 2019, il a demandé au préfet de police la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La commission du titre de séjour, consultée le 7 novembre 2019, a émis un avis favorable. Par un arrêté du 8 juin 2020, le préfet de police a rejeté la demande de M. A.... Le préfet de police de Paris fait appel du jugement du 16 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

3. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis émis par la commission du titre de séjour le 7 novembre 2019 que si M. A... a fait l'objet entre janvier 2014 et avril 2017 de quatre condamnations pour différents chefs d'accusation dont le plus grave est celui de trafic de stupéfiants pour des faits commis entre octobre 2015 et mai 2016 pour lequel il a été condamné, le 21 avril 2017, à quatre ans de prison ferme et incarcéré du 20 mai 2016 au mois de juin 2017 puis a bénéficié pour cette peine d'un aménagement avec une obligation de soins dont un suivi tous les quinze jours par un psychologue pour addiction, l'intéressé est entré en France en 1991, à l'âge de quarante-cinq jours où il a été scolarisé jusqu'à l'obtention d'un baccalauréat professionnel. A l'issue de ses études, M. A... a travaillé dans le bâtiment avec son père. Par ailleurs, il a été mis en possession d'un document de circulation pour mineur entre juillet 2001 et juillet 2009 puis a été titulaire d'une carte de séjour régulièrement renouvelée entre les mois de juin 2010 et septembre 2017. De plus, en dépit du fait, qu'il soit célibataire et sans enfant, les attaches familiales de M. A... se situent sur le territoire français. L'intéressé demeure chez ses parents qui sont titulaires d'une carte de résident avec ses deux plus jeunes frères de nationalité française. Enfin, il est titulaire depuis le 14 octobre 2019 d'un contrat de travail à durée indéterminée au sein de la société HB rénovation en qualité d'électricien. Au regard de ces circonstances particulières, et compte tenu notamment de l'âge auquel M. A... est entré sur le territoire national, de la durée de son séjour et de ses attaches familiales en France, c'est à bon droit que le Tribunal a jugé que le préfet de police, en refusant de délivrer à M. A... le titre de séjour qu'il sollicitait, au motif que son comportement constituait une menace à l'ordre public, avait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excédant ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public et qu'il avait, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de

M. A..., une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 février 2022 , à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- Mme Boizot, première conseillère,

- Mme Fullana, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 11 mars 2022.

La rapporteure,

S. BOIZOTLe président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA02674


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02674
Date de la décision : 11/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Autorisation de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : ABDEL SALAM

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-11;21pa02674 ?
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