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28/06/2022 | FRANCE | N°20PA03216

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 juin 2022, 20PA03216


Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) Pro Exo Com a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes mis à sa charge pour les périodes d'imposition 2013 à 2015. Par un jugement n° 1809725 du 22 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2020, l

a SARL Pro Exo Com, représentée par Me Planchat, avocat, demande à la ...

Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) Pro Exo Com a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes mis à sa charge pour les périodes d'imposition 2013 à 2015. Par un jugement n° 1809725 du 22 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2020, la SARL Pro Exo Com, représentée par Me Planchat, avocat, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1809725 du 22 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes mis à sa charge pour les périodes d'imposition 2013 à 2015 ; 2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ; - l'administration n'a pas porté à sa connaissance, après sa rencontre avec l'interlocuteur départemental, les dernières conséquences financières du contrôle comme l'y oblige l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ; - eu égard à l'erreur commise par l'interlocutrice départementale dans le compte rendu du 17 octobre 2017, elle doit être déchargée en application de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales des majorations et amendes mises à sa charge ; - la totalité des suppléments d'impôts doit être déchargée pour non-respect des droits de la défense ou des droits consacrés par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, même en cas d'erreur non substantielle ; - la méthode de reconstitution de l'administration était erronée ; la fraction des rehaussements correspondant aux achats mentionnés sur les déclarations d'échange de biens établies par des sociétés tierces n'est pas corroborée par les constatations propres à l'entreprise permettant d'établir que les marchandises en cause lui auraient été livrées pour être ensuite revendues. Par un mémoire en défense, enregistré le 4 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A...,- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. La SARL Pro Exo Com, qui importe et revend des articles de cosmétique, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié, selon la procédure de rectification contradictoire, des rehaussements d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos de 2013 à 2015, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes pour les années 2013 à 2015, ainsi que les majorations et pénalités afférentes. Par courriers des 26 et 29 mars 2018, la société requérante a contesté ces impositions supplémentaires. Par une décision du 16 avril 2018, l'administration a rejeté la réclamation préalable introduite par la société requérante. Par la présente requête, la SARL Pro Exo Com relève appel du jugement du 22 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos de 2013 à 2015, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes pour les années 2013 et 2015. Sur la régularité du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 3. Il ressort du jugement, et notamment de son point 5, que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par la SARL Pro Exo Com, a répondu, avec de suffisantes précisions, au moyen qu'elle avait soulevé, tiré de ce que l'administration fiscale n'avait pas porté à sa connaissance, après sa rencontre avec l'interlocuteur départemental, les dernières conséquences financières du contrôle comme l'y oblige l'article L. 48 du livre des procédures fiscales. Le moyen soulevé doit donc être écarté comme manquant en fait. Sur la régularité de la procédure : 4. La SARL Pro Exo Com soutient que l'interlocutrice départementale qui a maintenu, dans son compte-rendu du 17 octobre 2017, les redressements confirmés, a méconnu les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales en indiquant que les conséquences financières figurant dans la proposition de rectification n° 3924 du 15 décembre 2016 restaient inchangées, alors que celles-ci avaient été modifiées à l'occasion de la réponse aux observations du contribuable du 7 mars 2017. 5. Aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " A l'issue (...) d'une vérification de comptabilité (...), lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai. ( ...) ". 6. Il résulte des dispositions précitées que, lorsque l'administration modifie les rehaussements au cours de la procédure d'imposition, elle doit informer le contribuable par écrit du montant des droits, taxes et pénalités maintenus à sa charge. Lorsque l'administration envisage, à l'issue d'une vérification de comptabilité, de procéder à des rappels de plusieurs impositions et ne modifie en cours de procédure qu'une partie de ces impositions, elle n'est tenue de porter par écrit à la connaissance du contribuable que les nouveaux montants des droits et pénalités des impositions modifiées, sans avoir à reprendre dans ce document le montant des droits et pénalités des impositions pour lesquelles aucune modification n'est intervenue. 7. Il résulte de l'instruction que la notification de redressements datée du 15 décembre 2016 adressée à la société Pro Exo Com précise le montant des droits, majorations et des intérêts de retard encourus en complément résultant du rehaussement des bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos 2013 à 2015. Aux stades ultérieurs de la procédure contradictoire, l'administration a modifié partiellement ces rehaussements et a indiqué à la société, dans la réponse aux observations du contribuable du 7 mars 2017, les nouvelles bases imposables, ainsi que le montant des nouveaux droits et pénalités en découlant. Le supérieur hiérarchique du vérificateur, à l'issue de l'entretien du 13 juin 2017, a indiqué par courrier du 10 août suivant, que les incidences financières restaient inchangées à hauteur des montants notifiés dans la réponse aux observations du contribuable. Après la rencontre avec l'interlocutrice départementale intervenue le 17 octobre 2017, celle-ci a confirmé par lettre du même jour la position du service vérificateur, sans d'ailleurs qu'aucune contestation sur le quantum des redressements en cause ait été portée à son appréciation. Enfin, les montants figurant dans l'avis de mise en recouvrement du 15 février 2018 sont ceux qui ont été indiqués et communiqués à la société, qui ne le conteste pas, par la lettre portant réponse aux observations du contribuable adressée le 7 mars 2017, les sommes mises en recouvrement étant conformes à ces conséquences financières. Dès cette date, la société était en mesure de connaître les conséquences financières actualisées et précises de la vérification. Ainsi, alors même que lecompte-rendu établi le 17 octobre 2017 par l'interlocutrice départementale mentionne par erreur que les conséquences financières figurant dans la proposition de rectification sont inchangées, cette erreur de plume, qui n'a pu introduire de confusion dans l'esprit de son destinataire, n'a pas privé la société de la possibilité de s'assurer de l'incidence financière des impositions supplémentaires, rappels et amendes objet de l'avis de mise en recouvrement, et de les contester utilement en conséquence. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales doit être écarté. 8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SARL Pro Exo Com n'est pas fondée à soutenir que la procédure de rectification serait entachée d'irrégularités substantielles ou non substantielles au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales, et que, par suite, la procédure mise en œuvre aurait violé le principe de non-discrimination mentionné à l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel de cette convention, aucune atteinte à son droit de propriété n'étant en tout état de cause établie.

Sur le bien-fondé des impositions : 9. Lors des vérifications de comptabilité dont la SARL Pro Exo Com a fait l'objet, l'administration a constaté que des factures d'achats de marchandises du fournisseur camerounais Sotradif n'étaient pas comptabilisés. Par ailleurs, suite au droit de communication exercé auprès de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, il est apparu que M. B..., gérant de la société requérante, importait de la marchandise sans la déclarer en douane et sans la soumettre à contrôle sanitaire. Enfin, il a été constaté que les remises d'espèces en banque étaient d'un montant supérieur aux encaissements espèces réels, aboutissant à des soldes de caisses créditeurs de manière répétée. Ainsi, en dépit du caractère régulier en la forme de la comptabilité présentée, les éléments précités permettent de constater que la comptabilité présentait de graves lacunes et d'en contester la valeur sincère et probante ce que ne conteste pas la société requérante. Par suite, l'administration a pu à bon droit écarter cette comptabilité et procéder à une reconstitution de recettes de l'entreprise. 10. Il résulte de l'instruction que, pour reconstituer le chiffre d'affaires réalisé par la SARL Pro Exo Com au cours de la période en litige, l'administration, après avoir écarté la comptabilité de la société comme non probante, s'est fondée sur une méthode ayant consisté à appliquer la marge commerciale de la société aux achats non comptabilisés mis en évidence par le service vérificateur lors des opérations de vérification, en premier lieu auprès d'un fournisseur belge, après exercice de l'assistance administrative, en deuxième lieu auprès d'une société camerounaise, après enquête douanière, et en dernier lieu auprès de sociétés d'Etats membres de l'Union européenne mentionnées dans la base VIES au titre des acquisitions intracommunautaires. Puis le service a appliqué à ces achats le taux de marge commercial tel que pratiqué par la société aux achats non comptabilisés augmentés de leurs frais accessoires incluant notamment le coût de transport pour les achats de marchandises auprès des fournisseurs européens afin de déterminer le chiffre d'affaires éludé. La SARL Pro Exo Com se borne à contester la fraction des rehaussements correspondant aux achats intra-communautaires mentionnés sur les déclarations d'échanges de biens, établies par des sociétés tierces, au motif que ces achats ne seraient pas corroborés par les constatations propres à l'entreprise permettant d'établir que les marchandises lui auraient été livrées pour être ensuite revendues. Toutefois, ces données permettent, sauf élément contraire apporté par l'acquéreur concerné, d'établir l'existence d'acquisitions intracommunautaires réalisées par la société requérante, à raison desquelles la taxe sur la valeur ajoutée est exigible en France à son nom du seul fait de leur réalisation. La SARL Pro Exo Com, qui ne tenait aucune comptabilité probante de ces acquisitions et ne propose pas de méthode de reconstitution alternative, n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'administration, en recourant à ces données, a mis en œuvre une méthode de reconstitution radicalement viciée ou excessivement sommaire. Par suite, c'est sans exagération que les chiffres d'affaires et bénéfices taxables en litige ont été déterminés par le service. 11. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Pro Exo Com n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation et de décharge doivent, par suite, être rejetées, ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :Article 1er : La requête de la SARL Pro Exo Com est rejetée.Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) Pro Exo Com et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Île-de-France.Délibéré après l'audience du 10 juin 2022, à laquelle siégeaient :- M. Carrère, président,- M. Soyez, président assesseur,- Mme Boizot, première conseillère.Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 juin 2022.La rapporteure,S. A...Le président,S. CARRERE La greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.2N° 20PA03216


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03216
Date de la décision : 28/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : CABINET NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-28;20pa03216 ?
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