La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/06/2023 | FRANCE | N°22PA03301

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 21 juin 2023, 22PA03301


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2021 en tant que par cette décision, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français, et d'autre part, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n°2201856 du 14 avril 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et u

n mémoire, enregistrés les 19 juillet 2022 et 30 mars 2023, M. E..., représenté par Me Fournier, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2021 en tant que par cette décision, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français, et d'autre part, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n°2201856 du 14 avril 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 juillet 2022 et 30 mars 2023, M. E..., représenté par Me Fournier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 14 avril 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2021 du préfet de police en tant qu'il lui refuse un titre de séjour et lui enjoint de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter du jour de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa demande de titre dans le même délai et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de séjour est entaché d'un défaut de motivation et d'une absence d'examen sérieux de sa situation personnelle ;

- le préfet de police s'est estimé lié par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en date du 25 juin 2021 ;

- il méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 611-3, 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B... E... a été rejetée par une décision du 8 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C....

- et les observations de Me Fournier pour M. E....

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant géorgien, né le 18 décembre 1964, est entré sur le territoire français le 3 octobre 2019. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 février 2020, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 21 décembre 2021. A partir de février 2020, il a entamé des démarches en vue d'obtenir un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Il relève appel du jugement en date du 14 avril 2022 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2021 du préfet de police en tant qu'il lui refuse un titre de séjour et lui enjoint de quitter le territoire français.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. E... est atteint de diabète de type 2, d'insuffisance respiratoire et d'une insuffisance rénale chronique d'origine diabétique depuis de nombreuses années. Il a commencé à être traité par hémodialyse en Géorgie à partir de l'année 2017. Après avoir subi en 2018 une néphrectomie pour une tumeur maligne dans un établissement hospitalier géorgien, il a poursuivi ce traitement à raison de trois séances de quatre heures par semaine. Après son arrivée en France, il a poursuivi ce traitement et a été soigné en outre pour des complications liées à son diabète, telles que l'hypertension artérielle et la rétinopathie diabétique. Le 23 juin 2020, la maison des personnes handicapées de Paris lui a délivré une carte d'invalidité avec un taux d'incapacité supérieur à 80 % et a décidé de lui verser l'allocation aux adultes handicapées avec effet rétroactif au 1er février 2020. Le 8 juin 2021, à la demande des médecins du service de néphrologie-dialyse-transplantation de l'hôpital Bicêtre, l'Agence de biomédecine l'a inscrit sur la liste nationale des malades en attente de greffe. Contrairement aux affirmations du préfet de police, il ressort des pièces du dossier et notamment d'une attestation du Dr A... F..., directrice de l'Union géorgienne de néphrologie, que la législation géorgienne n'autorise que les transplantations rénales à partir de donneurs vivants membres de la famille du malade. Par ailleurs, les certificats médicaux produits par

M. E... font état de ce qu'une greffe de rein ne peut être pratiquée sur sa personne en Géorgie dès lors que les membres de sa famille, composée de son père, sa mère et son frère, sont eux-mêmes diabétiques et ne sont pas en mesure, compte tenu de leur état de santé, d'avoir la qualité de donneurs. Par suite, dans les conditions très particulières de l'espèce, eu égard à l'impossibilité absolue dans laquelle se trouve M. E... de pouvoir bénéficier d'une greffe en Géorgie alors que sa seule chance d'amélioration de son état de santé et de ses conditions de vie est de bénéficier d'une greffe d'un donneur cadavérique en France, l'arrêté du préfet de police doit être regardé comme étant entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

3. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2021 en tant qu'il lui refuse un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Il est enjoint au préfet de police de délivrer une carte de séjour à M. E... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 2201856 en date du 14 avril 2022 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 29 juillet 2021 du préfet de police, en tant qu'il refuse de délivrer à M. E... un titre de séjour et lui enjoint de quitter le territoire français, est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer une carte de séjour à M. E... dans un délai de de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Marianne Julliard, présidente,

- Mme Isabelle Marion, première conseillère,

- Mme Gaelle Dégardin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juin 2023.

La rapporteure,

I. C...La présidente,

M. D...Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03301
Date de la décision : 21/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JULLIARD
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : FOURNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-21;22pa03301 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award