La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/03/2024 | FRANCE | N°23PA03566

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 06 mars 2024, 23PA03566


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 24 février 2021 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité d'apatride.



Par un jugement n° 2119358/4-3 du 10 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enreg

istrée le 4 août 2023, M. D..., représenté par Me David, demande à la Cour :



1°) d'annuler le jugement 2119358/4-3 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 24 février 2021 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité d'apatride.

Par un jugement n° 2119358/4-3 du 10 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 août 2023, M. D..., représenté par Me David, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement 2119358/4-3 du 10 février 2023 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 24 février 2021 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

3°) d'enjoindre au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de lui reconnaître la qualité d'apatride dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance et sa requête d'appel ne sont pas tardives ;

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il ne comporte aucune signature ;

- la décision du 24 février 2021 a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que les garanties procédurales prévues à l'article R. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été respectées ;

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 812-1 du même code ;

- elle est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 novembre 2023, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides représenté par Me Lewy, conclut au rejet de la requête de M. D....

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de New-York du 28 septembre 1954 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique,

- le rapport de Mme Zeudmi Sahraoui ;

- les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique ;

- et les observations de Me David, représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., né le 7 mars 1951 en République socialiste de Croatie, est entré en France en 1972 et s'est vu reconnaitre la qualité de réfugié par une décision du 29 novembre 1972 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Par une décision du 7 juillet 2015, l'office a mis fin à ce statut. Le 28 janvier 2019, M. D... a saisi l'OFPRA d'une demande de reconnaissance de la qualité d'apatride. Par une décision du 24 février 2021, le directeur général de l'OFPRA a rejeté cette demande. M. D... relève appel du jugement du 10 février 2023 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, l'absence de ces signatures sur l'ampliation adressée à M. D... par le Tribunal étant sans incidence sur la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement du 10 février 2023 du Tribunal administratif de Paris serait irrégulier pour méconnaître l'article R. 741-7 du code de justice administrative doit être écarté.

Sur la légalité de la décision du 24 février 2021 :

4. En premier lieu, par une décision du 15 février 2021, régulièrement publiée sur le site internet de l'OFPRA, son directeur général a donné délégation à M. C... B..., attaché d'administration de l'Etat, chef de division, pour signer notamment tous les actes individuels pris en application de l'article L. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tels que la décision attaquée. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable à la date de la décision attaquée : " L'office peut convoquer le demandeur à un entretien personnel dans les conditions prévues au I de l'article R. 723-19. / Le demandeur est entendu dans la langue de son choix, sauf s'il existe une autre langue qu'il comprend et dans laquelle il est à même de communiquer clairement. / Lorsque l'entretien du demandeur nécessite l'assistance d'un interprète, sa rétribution est prise en charge par l'office. / L'office peut procéder à un entretien en ayant recours à un moyen de communication audiovisuelle, dans les conditions prévues par l'article R. 723-9. / L'office peut autoriser le demandeur à se présenter accompagné soit d'un avocat, soit d'un représentant d'une association, dans les conditions prévues aux huitième et neuvième alinéas de l'article L. 723-6. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a été convoqué, par un courrier du 2 septembre 2019 à un entretien fixé au 22 octobre 2019. Ce courrier précisait que la langue dans laquelle l'intéressé sera entendu sera le français et qu'il pouvait être accompagné d'un avocat ou d'un représentant d'une association. Il ressort également des termes de la décision attaquée que M. D... a effectivement été entendu par l'OFPRA le 22 octobre 2019 en langue française, sans que l'intéressé ait déclaré ne pas comprendre le français. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision du 24 février 2021 aurait été prise en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 1er de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 : " Aux fins de la présente Convention, le terme " apatride " désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation (...) ". Aux termes de l'article L. 821-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La qualité d'apatride est reconnue à toute personne qui répond à la définition de l'article 1er de la convention de New York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux apatrides en vertu de cette convention. ". La reconnaissance de la qualité d'apatride implique d'établir que l'Etat susceptible de regarder une personne comme son ressortissant par application de sa législation ne le considère pas comme tel.

8. Pour rejeter la demande de reconnaissance de la qualité d'apatride présentée par M. D..., le directeur général de l'OFPRA a relevé que l'intéressé qui n'a présenté aucun document d'identité ou d'état civil, n'établissait pas son identité et qu'à supposer même son identité établie, il pourrait se prévaloir de la nationalité croate sur le fondement de l'article 11 de la loi sur la citoyenneté croate du 26 juin 1991 modifiée en tant qu'émigrant originaire du territoire croate.

9. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a déclaré devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides être né le 7 mars 1951 à Rijeka, en République socialiste de Croatie, de deux parents citoyens yougoslaves d'origine serbe et avoir quitté le territoire de la Yougoslavie en 1971. S'il soutient qu'il ne peut se prévaloir des lois sur la nationalité croate et se prévaut, à l'appui de ses allégations, d'un courrier des services consulaires de l'ambassade de Croatie en France indiquant qu'il n'a pas été trouvé dans les registres de l'état civil ni dans les registres de citoyenneté croates, il ne justifie pas, par ce seul document, avoir déposé une demande de reconnaissance de la nationalité croate et s'être heurté à un refus des autorités croates, ni qu'il ne pourrait se prévaloir de l'article 11 de la loi sur la citoyenneté croate du 26 juin 1991 modifiée en tant qu'émigrant originaire du territoire croate ainsi que l'a relevé l'OFPRA dans la décision attaquée du 24 février 2021. En se bornant à se prévaloir de ce courrier, ainsi que de deux courriers établis respectivement par les ambassades de Bosnie-Herzégovine et de la République de Serbie en France, qui se bornent à indiquer qu'il ne possède pas la nationalité de l'un de ces Etats, le requérant n'établit pas qu'il aurait accompli auprès des autorités de Croatie, comme de Serbie et de Bosnie-Herzégovine, des démarches répétées et assidues tendant à ce que celles-ci le reconnaissent comme étant, en application de leurs lois nationales, l'un de leurs ressortissants. Par suite et s'il ne pouvait opposer à M. D... l'absence de preuve de son identité, pour ce seul motif le directeur général de l'OFPRA a pu, sans méconnaitre les dispositions précitées de l'article L. 821-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, rejeter la demande de reconnaissance de la qualité d'apatride présentée par M. D....

10. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 février 2021 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande de reconnaissance de la qualité d'apatride. Ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Délibéré après l'audience du 20 février 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon présidente,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

- Mme Zeudmi Sahraoui, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mars 2024.

La rapporteure,

N. ZEUDMI-SAHRAOUILa présidente,

P. HAMON

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA03566 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03566
Date de la décision : 06/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: Mme Nadia ZEUDMI-SAHRAOUI
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : DAVID

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-06;23pa03566 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award