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23/04/2024 | FRANCE | N°23PA04675

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 23 avril 2024, 23PA04675


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 mai 2023 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.



Par un jugement n° 2312967/8 du 31 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



I. Par une requête enregistrée, sous le n° 23PA04675, le 14 novembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 mai 2023 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée.

Par un jugement n° 2312967/8 du 31 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête enregistrée, sous le n° 23PA04675, le 14 novembre 2023 et un mémoire complémentaire enregistré le 20 février 2024, Mme B..., représentée par Me El Haitem, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2312967/8 du 31 octobre 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut de lui enjoindre de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 5 mai 2023 est insuffisamment motivé ;

- il n'a pas été précédé d'un examen particulier de sa situation personnelle ;

- il méconnaît les stipulations du III du protocole annexe à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des articles L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 6-5 de l'accord franco-algérien.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 janvier 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée, sous le n° 23PA04676, le 14 novembre 2023 et un mémoire complémentaire enregistré le 20 février 2024, Mme B..., représentée par Me El Haitem demande à la Cour de surseoir à l'exécution du jugement attaqué.

Elle soutient que :

- les conditions prévues à l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont remplies dès lors que les moyens qu'elle invoque à l'appui de sa requête au fond paraissent sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué et de l'arrêté contesté ;

- les conditions prévues à l'article R. 811-17 du code de justice administrative sont remplies dès lors que l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables, s'agissant notamment de la poursuite de son cursus universitaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, et son protocole ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les observations de Me El Haitem, avocat de Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante algérienne née le 16 juillet 1998 et entrée en France le 18 septembre 2015 munie d'un visa long séjour valant titre de séjour mention " étudiant " a sollicité, le 20 septembre 2022, le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 5 mai 2023, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Par un jugement du 31 octobre 2023, dont Mme B... fait appel et demande, dans l'attente du jugement au fond, qu'il soit sursis à son exécution, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées n° 23PA04675 et n° 23PA04676 présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes des stipulations du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent sur présentation, soit d'une attestation de préinscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou " stagiaire ". Il appartient au préfet, saisi d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour délivré sur le fondement des stipulations du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, d'apprécier, sous le contrôle du juge, le caractère réel et sérieux des études poursuivies par l'intéressé en tenant compte de l'assiduité, de la progression et de la cohérence du cursus suivi.

4. Pour refuser le renouvellement du certificat de résidence de Mme B... portant la mention " étudiant ", le préfet de police s'est fondé sur le fait que l'intéressée s'était inscrite en deuxième année de licence en droit à l'université Paris II pour l'année 2019/2020, qu'elle avait redoublé à deux reprises cette deuxième année sans la valider, qu'elle s'était alors inscrite pour l'année universitaire 2022/2023 en deuxième année de Bachelor carrières judiciaires à l'Institut Supérieur de Droit et que, par suite, en l'absence de progression dans son cursus universitaire, l'intéressée n'établissait pas le caractère réel et sérieux de ses études.

5. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme B..., après avoir obtenu son baccalauréat au lycée français d'Alger, a poursuivi ses études en France. Certes, l'intéressée a redoublé à deux reprises, en 2020/2021 et 2021/2022, sa deuxième année de licence qu'elle n'a finalement pas obtenue. Il ne ressort toutefois d'aucune pièce du dossier que les difficultés ainsi rencontrées seraient dues à un manque d'assiduité et de sérieux. Surtout, Mme B... s'est inscrite à l'Institut Supérieur de Droit pour l'année universitaire 2022/2023, et ce directement en deuxième année du programme " Bachelor 2 Carrières judiciaires " du fait de sa réussite en première année de licence à l'université Paris II. Elle justifie d'ailleurs avoir obtenu une moyenne générale de 14,50 sur 20 à l'issue du premier semestre. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard à la cohérence du parcours de la requérante et à la progression dans son cursus universitaire caractérisé par la poursuite de sa formation à l'Institut Supérieur de Droit, le préfet de police, en refusant de faire droit à la demande de renouvellement de son titre de séjour, a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. La décision par laquelle le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour mention " étudiant " doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions de Mme B... à fin de sursis à exécution du jugement attaqué :

7. La Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de Mme B... tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de la requête n° 23PA04676 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a plus lieu, par suite, d'y statuer.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

8. L'annulation ci-dessus prononcée implique nécessairement que le préfet de police délivre à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Il y a lieu, par suite, sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative de lui enjoindre de procéder à cette délivrance dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme B... d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1 : Le jugement du 31 octobre 2023 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 5 mai 2023 sont annulés.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n 23PA04676 de Mme B....

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B... un certificat de résidence portant la mention " étudiant " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme A... C... B...

Copie en sera adressée au préfet de police et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2024.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEU

La présidente,

J. BONIFACJ La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA04675-23PA04676


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA04675
Date de la décision : 23/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : EL HAITEM

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-23;23pa04675 ?
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