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16/02/2023 | FRANCE | N°20TL22593

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 16 février 2023, 20TL22593


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel du 21 juin 2018 par lequel le maire de la commune de Soula, agissant au nom de l'Etat, a déclaré non réalisable l'opération de rénovation d'un bâtiment agricole et la décision du 18 octobre 2018 par laquelle la préfète de l'Ariège a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1806038 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure deva

nt la cour :

Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel du 21 juin 2018 par lequel le maire de la commune de Soula, agissant au nom de l'Etat, a déclaré non réalisable l'opération de rénovation d'un bâtiment agricole et la décision du 18 octobre 2018 par laquelle la préfète de l'Ariège a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1806038 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le numéro 20BX02593 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le numéro 20TL22593 le 10 août 2020, M. A..., représenté par Me Herrmann, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme négatif du 21 juin 2018 délivré par le maire de Soula et la décision du 18 octobre 2018 de la préfète de l'Ariège rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement méconnaît le principe du contradictoire dès lors que l'instruction n'a pas été rouverte à la suite de la communication du mémoire de la préfète de l'Ariège, le jour même de sa clôture et que la note en délibéré, qui contenait un moyen nouveau, n'a pas été communiquée à la préfète ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le jugement a omis de statuer sur les moyens tirés de ce que l'avis de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège n'était pas requis et a été émis dans des conditions irrégulières ;

- le jugement a statué " ultra petita " ;

- le jugement méconnaît les stipulations de l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions attaquées sont entachées d'un vice d'incompétence négative dès lors que le maire de Soula au nom de l'Etat et la préfète de l'Ariège se sont estimés en situation de compétence liée au regard de l'avis émis dans le cadre de l'instruction de sa demande par la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège ;

- les décisions attaquées sont entachées d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article R. 410-10 du code de l'urbanisme dès lors que l'avis de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège doit être réputé comme n'ayant jamais existé ; alors qu'un tel avis n'était pas requis, il a eu une influence sur le sens des décisions prises par le maire et la préfète ;

- l'avis de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège est irrégulier dès lors qu'il est insuffisamment motivé et que la signature de son président est illisible en méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de l'Ariège devait être saisie sur le fondement des dispositions de l'article R. 410-10 du code de l'urbanisme ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme, en ce que ces dispositions ne sont pas applicables aux bâtiments agricoles et la desserte est largement suffisante pour les besoins de l'exploitation agricole qui n'abritera ni personne ni bétail ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation en méconnaissance de l'article R. 111-2 du code précité en l'absence de menace pour la sécurité publique liée à la présence de falaises fracturées, aucun plan de prévention des risques naturels n'ayant été édicté ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur de droit en ce qu'il a été fait application des dispositions de l'article R. 111-9 du code de l'urbanisme, non applicable à un projet de construction agricole et non à usage d'habitation ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 122-10 et L. 122-11 du code de l'urbanisme, dès lors que la nécessité de l'opération se déduit du besoin explicitement exprimé par l'exploitant agricole, M. C..., et dans l'optique de contribuer au maintien et au développement de son activité ;

- les décisions attaquées sont entachées d'un détournement de pouvoir, lié à la démission de M. C..., exploitant agricole au bénéfice duquel l'opération est envisagée, étant précisé que celui-ci a donné sa démission en juin 2017 du conseil municipal de Soula au sein duquel il était premier-adjoint au maire depuis 1983.

Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. A....

Par un mémoire enregistré le 16 mai 2022, le ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. A... n'est fondé.

Par ordonnance du 21 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 14 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le 5 mars 2018, M. A... a sollicité la délivrance d'un certificat d'urbanisme opérationnel pour la rénovation d'un bâtiment agricole situé au lieu-dit Caraybat - Le Couloumié sur le territoire de la commune de Soula (Ariège). Par un certificat d'urbanisme délivré le 21 juin 2018 au nom de l'Etat, le maire de Soula a déclaré l'opération non réalisable. M. A... fait appel du jugement du 12 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce certificat urbanisme négatif et de la décision du 18 octobre 2018 de la préfète de l'Ariège rejetant son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Il ressort des pièces du dossier de première instance que la préfète de l'Ariège a produit un second mémoire en défense enregistré au tribunal administratif de Toulouse le 16 mars 2020 après un premier mémoire en défense enregistré le 27 mai 2019. Ce second mémoire ne contenait aucun élément nouveau sur lequel les premiers juges se seraient fondés pour rendre leur jugement. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en s'abstenant de lui communiquer ce mémoire les premiers juges auraient méconnu le principe du contradictoire.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 731-3 : " A l'issue de l'audience, toute partie à l'instance peut adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré. ". Lorsqu'il est saisi d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.

4. Si M. A... a produit une note en délibéré devant le tribunal administratif enregistrée le 2 juin 2020, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle contenait l'exposé d'une circonstance de fait dont le requérant n'aurait pas été en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts ou d'une circonstance de droit nouvelle justifiant que le tribunal administratif procède à la réouverture de l'instruction. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en s'abstenant de communiquer cette note en délibéré les premiers juges auraient méconnu le principe du contradictoire.

5. En troisième lieu, il ressort de la lecture du jugement attaqué que, contrairement à ce qu'affirme M. A..., le tribunal administratif de Toulouse a statué sur les moyens tirés de ce que l'avis de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège n'était pas requis et a été émis dans des conditions irrégulières dans son point 6. Par suite, ce moyen doit être écarté.

6. En quatrième lieu, M. A... soutient, sans plus de précision, que le tribunal administratif de Toulouse n'aurait pas pris en compte l'ensemble de ses moyens et aurait répondu à des moyens non soulevés. Toutefois, en s'abstenant d'indiquer quels sont les moyens concernés, le requérant ne met pas la cour en mesure d'apprécier la portée et le bien-fondé de ce moyen.

7. En dernier lieu, les moyens tirés de ce que le jugement méconnaîtrait les stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement, qui est suffisamment motivé, serait irrégulier.

Sur le bien-fondé du jugement :

9. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique (...). ". Aux termes de l'article R. 410-10 du même code : " L'autorité compétente recueille l'avis des collectivités, établissements publics et services gestionnaires des réseaux mentionnés à l'article L. 111-11 ainsi que les avis prévus par les articles R. 423-52 et R. 423-53 ". Aux termes de l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime relatif aux attributions de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers : " Cette commission peut être consultée sur toute question relative à la réduction des surfaces naturelles, forestières et à vocation ou à usage agricole et sur les moyens de contribuer à la limitation de la consommation des espaces naturels, forestiers et à vocation ou à usage agricole. Elle émet, dans les conditions définies par le code de l'urbanisme, un avis sur l'opportunité, au regard de l'objectif de préservation des terres naturelles, agricoles ou forestières, de certaines procédures ou autorisations d'urbanisme. Elle peut demander à être consultée sur tout autre projet ou document d'aménagement ou d'urbanisme, à l'exception des projets de plans locaux d'urbanisme concernant des communes comprises dans le périmètre d'un schéma de cohérence territoriale approuvé après la promulgation de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt ".

10. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des pièces du dossier que la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège a rendu un avis sur le projet en litige le 7 juin 2018, lequel a, au demeurant, été communiqué à M. A... dans le cadre de l'instance devant le tribunal administratif de Toulouse par mémoire en date du 27 mai 2019. Par suite, le moyen tiré de ce que cet avis doit être réputé ne jamais avoir existé doit être écarté.

11. Si M. A... invoque le caractère irrégulier de cet avis à défaut de comporter la signature de son auteur ainsi que la mention du nom, du prénom et de la qualité de celui-ci en méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, ces dispositions ne sont pas applicables à cet avis qui ne revêt pas le caractère d'une décision.

12. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige porte sur la rénovation d'un bâtiment à usage agricole pour lequel une demande de certificat d'urbanisme opérationnel a été déposée auprès des services de la commune de Soula. L'administration disposait ainsi de la faculté de recueillir l'avis de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers dans le cadre de l'instruction de cette demande sans que cette consultation spontanée ait pour conséquence d'entacher d'un vice de procédure le certificat d'urbanisme en litige délivré à M. A....

13. M. A... soutient que le maire de Soula et la préfète de l'Ariège se seraient considérés comme liés par l'avis rendu par la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège, défavorable au projet " en l'absence de nécessité agricole " et du fait d'un " enjeu de sécurité des personnes lié à l'aléa ". Toutefois, il ressort des termes des décisions attaquées que ces deux autorités se sont fondées sur plusieurs motifs dont certains sont étrangers à l'avis de ladite commission, notamment celui relatif à l'existence d'un risque pour la sécurité publique due aux conditions de desserte du terrain d'assiette. Par suite, ce moyen doit être écarté.

14. Enfin, si le requérant soutient que l'absence de consultation de la chambre d'agriculture de l'Ariège et de la commission départementale de la nature des sites et des paysages est, à l'inverse, constitutive d'un vice de procédure, il ne ressort pas des dispositions de l'article R. 410-10 précité du code de l'urbanisme, qu'une telle saisine serait rendue obligatoire dans le cadre du projet en litige. Par suite, ce moyen doit être écarté.

15. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux constructions, aménagements, installations et travaux faisant l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une déclaration préalable ainsi qu'aux autres utilisations du sol régies par le présent code ". Aux termes de l'article R. 421-17 du même code : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable lorsqu'ils ne sont pas soumis à permis de construire en application des articles R*421-14 à *R. 421-16 les travaux exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires, et les changements de destination des constructions existantes suivants : / a) Les travaux ayant pour effet de modifier l'aspect extérieur d'un bâtiment existant, à l'exception des travaux de ravalement (...) ". Aux termes de l'article R. 111-5 de ce code : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic ".

16. D'une part, il ressort des pièces du dossier, en particulier des photographies versées au débat, que la demande de certificat d'urbanisme porte sur la rénovation d'une construction existante à l'état de ruine pour en faire un bâtiment agricole. Au regard de la nature et de l'importance des travaux projetés, ce projet relève du champ de la déclaration préalable de travaux dès lors qu'il modifiera l'aspect extérieur du bâtiment au sens des dispositions de l'article R. 421-17 précité du code de l'urbanisme. Dans ces conditions, l'administration n'a pas commis d'erreur de droit en s'assurant, au stade de l'examen de cette demande de certificat d'urbanisme, des conditions de desserte du terrain posées par l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme.

17. D'autre part, il ressort des pièces du dossier et notamment d'une capture d'écran du site Géoportail, que le chemin d'accès au projet présente une largeur comprise entre 1, 61 mètre et 1, 97 mètre, sur une longueur de 190 mètres. Si M. A... estime les mesures de largeur du chemin comprises entre 2 mètres et 2, 80 mètres, il ne l'établit pas en se bornant à produire un plan cadastral annoté par lui et la photographie du chemin qu'il considère praticable pour ses engins agricoles. Dans ces conditions, la configuration de ce chemin rend impossible tout accès motorisé aux parcelles d'assiette du projet et ne permet pas davantage le passage des véhicules de secours et de lutte contre l'incendie. Or, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de certificat d'urbanisme opérationnel, que le bâtiment agricole envisagé par le projet a pour vocation, contrairement à ce que soutient le requérant, à stocker du matériel et à abriter des espèces animales bovines rendant indispensable la possibilité de l'approche des engins de secours et de lutte contre l'incendie. Par suite, eu égard à la destination du bâtiment agricole envisagé, les décisions attaquées ne sont entachées ni d'une erreur d'appréciation ni d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme.

18. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme peut aussi, si elle estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel l'autorisation de construire est sollicitée, que les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique le justifient, refuser, sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de délivrer une autorisation d'urbanisme, alors même qu'aucun plan n'aurait pas classé le terrain d'assiette du projet en zone à risques.

19. A la suite d'une visite sur le terrain de M. A..., la direction départementale des territoires de l'Ariège a émis, le 10 avril 2018, un avis défavorable à la demande dans la mesure où " le projet est situé en dessous de falaises fracturées plus ou moins hautes où l'aléa peut être qualifié de moyen à fort chutes de pierres ". M. A... ne peut utilement se prévaloir de l'absence d'un plan de prévention des risques naturels pour caractériser l'absence d'un tel risque. De plus, s'il se prévaut de la présence d'un chemin de randonnée et d'un banc de repos pour les promeneurs aux alentours du terrain d'assiette de son projet, ces seuls éléments ne sont pas de nature à établir l'absence de ce risque. Par suite, et au vu de l'avis de la direction départementale des territoires de l'Ariège, les décisions attaquées ne sont pas entachées d'une erreur d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

20. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 122-11 du code de l'urbanisme : " peuvent être autorisés dans les espaces définis à l'article L. 122-10 : / 1° Les constructions nécessaires aux activités agricoles, pastorales et forestières ; / 2° Les équipements sportifs liés notamment à la pratique du ski et de la randonnée ; / 3° La restauration ou la reconstruction d'anciens chalets d'alpage ou de bâtiments d'estive ". Selon l'article L. 122-10 du même code visé par les dispositions précédentes : " Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières, en particulier les terres qui se situent dans les fonds de vallée, sont préservées. La nécessité de préserver ces terres s'apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d'exploitation locaux. Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l'exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition ".

21. Par un avis en date du 7 juin 2018, la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de l'Ariège a émis un avis défavorable au projet au motif notamment de l'absence de nécessité agricole, sans plus de précision. Pour remettre en cause la réalité de la nécessité agricole du projet du pétitionnaire, les autorités administratives se sont fondées sur la distance d'environ 400 mètres séparant le siège de l'exploitation agricole et la localisation du projet sur la commune de Soula. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de certificat d'urbanisme opérationnel, que la commune de Soula a cédé à un tiers une parcelle cadastrée A 79 ce qui a privé le bétail du preneur des terres de M. A... de l'accès à un point d'eau. M. A... soutient, sans être contredit, que le projet en litige consistant en la rénovation d'une grange et en la mise en place d'un point d'eau à proximité permettrait de pallier l'absence d'accès au point d'eau par la parcelle A 79. Dans ces conditions, et dès lors que la distance entre le siège de l'exploitation et la localisation du projet est justifiée par le pacage des bovins dans la zone ouest des terres de l'exploitant agricole, le projet en litige doit être regardé comme nécessaire pour l'exploitation agricole du preneur des parcelles concernées. Par suite, les décisions attaquées sont entachées d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 122-10 et L. 122-11 du code de l'urbanisme. Toutefois, il résulte de l'instruction que le maire de Soula et la préfète de l'Ariège auraient pris les mêmes décisions s'ils ne s'étaient fondés que sur les motifs tirés de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme.

22. En cinquième lieu, M. A... reprend en appel le moyen, qu'il avait soulevé en première instance, tiré de ce que les décisions attaquées sont entachées d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article R. 111-9 du code de l'urbanisme. Il n'apporte aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le tribunal administratif de Toulouse sur son argumentation de première instance aux points 12 et 15 du jugement attaqué. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Toulouse.

23. En dernier lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le certificat d'urbanisme opérationnel édicté au nom de l'Etat par le maire de Soula et le rejet du recours gracieux prononcé par la préfète de l'Ariège seraient consécutifs à la démission du preneur des terres de M. A... du conseil municipal de Soula en juin 2017. Par suite, les éléments ainsi invoqués par M. A... ne sont pas de nature à caractériser le détournement de pouvoir allégué.

24. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Ariège et à la commune de Soula.

Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2023.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

D. Chabert

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20TL22593


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL22593
Date de la décision : 16/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. - Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : HERRMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-02-16;20tl22593 ?
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