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16/03/2023 | FRANCE | N°21TL03651

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 16 mars 2023, 21TL03651


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 23 janvier 2019 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Aigues-Vives a adopté le plan local d'urbanisme communal en ce qu'il prescrit les emplacements réservés nos 7 et 14, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux qu'elle a formé contre cette délibération.

Par un jugement n°1902243 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :<

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Par une requête enregistrée le 23 août 2021 au greffe de la cour administrative de Marse...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 23 janvier 2019 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Aigues-Vives a adopté le plan local d'urbanisme communal en ce qu'il prescrit les emplacements réservés nos 7 et 14, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux qu'elle a formé contre cette délibération.

Par un jugement n°1902243 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 août 2021 au greffe de la cour administrative de Marseille sous le numéro 21MA03651, puis au greffe de la cour administrative de Toulouse sous le numéro 21TL03651, Mme B..., représentée par la SCP Rey Galtier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la délibération du 23 janvier 2019 approuvant le plan local d'urbanisme en ce qu'il prescrit les emplacements réservés n° 7 et n° 14 ainsi que la décision rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aigues-Vives une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la délibération n'a pas fait l'objet d'une concertation préalable à l'élaboration du plan local d'urbanisme, faute pour la commune de justifier que les administrés ont pu disposer du projet de zonage règlementaire, du règlement applicable, ainsi que de la liste et des motifs des emplacements réservés ;

- il n'est pas démontré que la délibération a été prise conformément aux articles L. 2121-10 à L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, en l'absence d'information suffisante des conseillers municipaux à l'occasion de leur convocation en vue de l'approbation du plan local d'urbanisme ;

- la commune a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle a institué l'emplacement réservé n° 7 pour la création de stationnements sur une surface de près de 2 000 m² ;

- la commune a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle a créé l'emplacement réservé n° 14 pour l'élargissement d'une partie du chemin de Mus.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2021, la commune d'Aigues-Vives, représentée par la SCP Courrech et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute de formuler une critique du jugement attaqué ;

- aucun des moyens soulevés n'est fondé.

La clôture d'instruction a été fixée au 5 décembre 2022 par une ordonnance du 21 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Niang, représentant la commune intimée.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 23 janvier 2019, le conseil municipal de la commune d'Aigues-Vives a adopté la révision générale du plan local d'urbanisme communal. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cette délibération en tant qu'elle crée les emplacements réservés n° 7 pour le stationnement au chemin de Mus et n° 14 pour l'élargissement du chemin du Mus, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux qu'elle a formé contre cette délibération le 23 février 2019. Mme B... relève appel du jugement n°1902243 du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le respect des modalités de la concertation :

2. Aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme alors applicable : " Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées : / 1° L'élaboration (...) du plan local d'urbanisme ; (...) ". Aux termes de l'article L. 600-11 du même code : " Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux articles L. 103-2 et L. 300-2 ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies aux articles L. 103-1 à L. 103-6 et par la décision ou la délibération prévue à l'article L. 103-3 ont été respectées. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la légalité d'une délibération approuvant un plan local d'urbanisme ne saurait être contestée au regard des modalités de la procédure de concertation qui l'a précédée dès lors que celles-ci ont respecté les modalités définies par la délibération prescrivant l'élaboration de ce document d'urbanisme.

3. Si l'appelante fait valoir que le public n'a pas eu accès au projet de zonage, au projet de règlement et à la liste et la teneur des emplacements réservés, un tel moyen ne saurait être utilement invoqué dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que la concertation a été menée selon les modalités fixées par la délibération en date du 28 juillet 2014 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme. En l'absence d'élément nouveau en appel, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 du jugement attaqué.

En ce qui concerne la convocation et l'information des membres du conseil municipal :

4. Aux termes des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales alors en vigueur : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ". Aux termes des dispositions de l'article L. 2121-11 du même code : " Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire, sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. Le maire en rend compte dès l'ouverture de la séance au conseil municipal qui se prononce sur l'urgence et peut décider le renvoi de la discussion, pour tout ou partie, à l'ordre du jour d'une séance ultérieure ". Selon l'article L. 2121-13 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".

5. Il ressort des pièces du dossier que la convocation à la séance du 23 janvier 2019, par courrier du 14 janvier 2019 remis en mains propres ou envoyé en recommandé avec accusé de réception, a été adressée aux conseillers municipaux et qu'elle comportait dans son ordre du jour l'approbation de la révision générale du plan local d'urbanisme avec en pièces jointes le dossier de révision du document d'urbanisme et le projet de délibération. Si la requérante soutient que la commune n'établit avoir respecté le droit à l'information des élus, elle n'assortit ses allégations d'aucun élément circonstancié. Ainsi, les membres du conseil municipal de la commune d'Aigues-Vives ont été mis en mesure d'appréhender l'objet et la portée du projet de révision du plan local d'urbanisme qui leur était soumis et, par suite, d'exercer utilement leur mandat à l'occasion de la séance du 23 janvier 2019. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 2121-10, L. 2121-11 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales doit être écarté. Par ailleurs, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 2121-12 du code général des collectivités territoriales, applicable uniquement aux communes d'au moins 3 500 habitants, doit être écarté comme inopérant dès lors que la population de la commune d'Aigues-Vives est inférieure à ce seuil.

En ce qui concerne la délimitation des emplacements réservés n° 7 et n° 14 :

6. Aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : / 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; (...) ".

7. L'appréciation à laquelle se livrent les auteurs d'un plan local d'urbanisme lorsqu'ils décident de créer des emplacements réservés ne peut être discutée devant le juge de l'excès de pouvoir que si elle repose sur des faits matériellement inexacts, si elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ou si elle procède d'un détournement de pouvoir. En outre, l'intention d'une commune de réaliser un aménagement sur une parcelle suffit à justifier légalement son classement en tant qu'emplacement réservé sans qu'il soit besoin pour la commune de faire état d'un projet précisément défini. Enfin, il n'appartient pas au juge d'apprécier l'opportunité du choix de la localisation d'un emplacement réservé par rapport à d'autres localisations possibles.

8. Il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme approuvé par la délibération en litige délimite un emplacement réservé n° 7 d'une emprise de 1 063,84 m² pour la création de stationnements sur le chemin de Mus. Cet emplacement réservé grève des parcelles dont Mme B... est propriétaire et sur lesquelles se situe le siège de son exploitation agricole. Il ressort du rapport de présentation que la commune compte plusieurs petits parkings aux abords du centre ancien et à proximité des équipements dont certains sont saturés et d'autres sous-occupés malgré leur centralité et qu'il est nécessaire d'optimiser le stationnement par un ensemble d'actions. En outre, le secteur en cause fait état d'une saturation du stationnement et d'un stationnement continu dans la rue de Planas débouchant sur le chemin du Mus. Pour justifier son projet de stationnement, la commune se prévaut également des objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, selon lequel " il s'agira de réaménager les espaces de stationnement existants et d'en aménager de nouveaux en particulier dans le secteur de la cave coopérative, du chemin et de la rue de Mus, du chemin du Poujolas, du chemin de l'Eau Noire et la rue de l'abattoir ". Ainsi, la nécessité d'améliorer la capacité de stationnement figure expressément au nombre des objectifs fixés par le projet d'aménagement et de développement durables. La circonstance qu'un emplacement réservé pour la création d'un parking a déjà été institué en limite du centre ancien du village au sein d'une zone à urbaniser 1AU ne remet pas, par elle-même, en cause l'utilité de créer l'emplacement réservé n° 7, compte tenu de la saturation évoquée des équipements. Enfin, au vu de sa localisation et en l'absence de contestation précise et étayée, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet emplacement réservé porterait atteinte à l'exploitation agricole de la requérante en ce qui concerne l'accès des parcelles en supportant le siège.

9. Par ailleurs, s'agissant de l'emplacement réservé n°14 pour l'élargissement du chemin de Mus sur une superficie de 773,84 m² destiné à sécuriser les déplacements des piétons, cet aménagement de cette voie publique, étroite et bordée par deux murs en pierres, apparaît également nécessaire compte tenu de la volonté affichée d'améliorer la circulation des véhicules dans la commune. Si l'appelante soutient que cet élargissement aurait dû être étendu à la totalité de cette voie, un tel moyen qui n'est assorti de précisions suffisantes et qui tend à contester l'opportunité du choix de la consistance de cet élargissement ne peut être qu'écarté.

10. Enfin, la création des emplacements réservés n° 7 et n° 14 grevant les terrains dont Mme B... est propriétaire n'apparaît pas comme apportant à l'exercice du droit de propriété de l'intéressée des limites qui seraient disproportionnées au regard du but d'intérêt général poursuivi par la délibération approuvant le plan et découlant du parti d'urbanisme retenu. Par ailleurs, les contraintes liées à l'existence d'un emplacement réservé sont prévues par la loi et répondent à un but d'intérêt général et la propriétaire concernée a toujours la possibilité d'exercer le droit de délaissement prévu par les dispositions de l'article L. 123-17 du code de l'urbanisme, en exigeant de la collectivité publique au bénéfice de laquelle le terrain a été réservé qu'elle procède à l'acquisition de ce bien.

11. Dans ces conditions, la délimitation par le plan local d'urbanisme en litige des emplacements n° 7 et n°14 n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de la commune intimée, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme sollicitée par l'appelante au titre des frais non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... la somme que demande la commune d'Aigues-Vives au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Aigues-Vives au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune d'Aigues-Vives.

Délibéré après l'audience du 21 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne à la préfète du Gard en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 21TL03651 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL03651
Date de la décision : 16/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP REY-GALTIER - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-03-16;21tl03651 ?
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