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23/03/2023 | FRANCE | N°20TL23774

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 23 mars 2023, 20TL23774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2018 par lequel le maire de Labarthe Rivière a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis d'aménager pour la création de deux terrains à bâtir sur une parcelle cadastrée section C n° 20 située chemin du Souc et de condamner la commune de Labarthe-Rivière à lui verser une somme de 50 000 euros, tous préjudices confondus.

Par un jugement n° 1803380 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif

de Toulouse a annulé cet arrêté, a enjoint au maire de Labarthe-Rivière de procéder à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 22 janvier 2018 par lequel le maire de Labarthe Rivière a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis d'aménager pour la création de deux terrains à bâtir sur une parcelle cadastrée section C n° 20 située chemin du Souc et de condamner la commune de Labarthe-Rivière à lui verser une somme de 50 000 euros, tous préjudices confondus.

Par un jugement n° 1803380 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté, a enjoint au maire de Labarthe-Rivière de procéder à un nouvel examen de la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, a mis à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions indemnitaires de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 2020 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le n° 20BX03774, et ensuite au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°20TL23774, et un mémoire en réplique enregistré le 1er octobre 2021, la commune de Labarthe-Rivière, représentée par Me Clamens, demande à la cour :

1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de rejeter la demande de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de M. B... était irrecevable, le recours gracieux ayant été formé postérieurement au 22 mars 2018 ;

- le certificat d'urbanisme délivré le 13 mars 2017 mentionnant la possibilité pour la commune d'opposer un sursis à statuer, M. B... n'est pas fondé à demander à ce que la situation de sa parcelle, jusqu'ici classée en zone constructible, soit appréciée selon les anciennes règles d'urbanisme, dès lors qu'un nouveau plan local d'urbanisme classe sa parcelle en zone non constructible ;

- les conditions du sursis à statuer au regard de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme étaient réunies, dès lors que le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables a eu lieu le 19 février 2016 et que le zonage du futur plan local d'urbanisme a été établi concernant la parcelle en litige ;

- la motivation du sursis à statuer est suffisante et a été comprise par l'intéressé au vu des termes de son recours gracieux ;

- les conclusions indemnitaires en responsabilité quasi-délictuelle sont irrecevables en l'absence de liaison du contentieux et non fondées en l'absence d'illégalité fautive et de préjudice.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Furet, demande à la cour de rejeter la requête et de de mettre à la charge de la commune appelante une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable faute d'avoir été notifiée dans les formes et délais prévus par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- sa demande introductive devant le tribunal administratif est recevable en l'absence de mention des voies et délais du recours gracieux ;

- le sursis à statuer en litige n'étant pas suffisamment motivé, le motif d'annulation des premiers juges doit être confirmé.

La clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 25 octobre 2022 par une ordonnance en date du même jour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., propriétaire d'une parcelle cadastrée ..., située au lieu-dit " Tourraque " sur la commune de Labarthe-Rivière (Haute-Garonne), s'est vu délivrer le 13 mars 2017 un certificat d'urbanisme opérationnel précisant que le terrain concerné pouvait être utilisé pour la réalisation de l'opération envisagée de division de cette parcelle en deux lots pour la construction d'une habitation sur chaque lot. Le 21 septembre 2017, M. B... a déposé une demande de permis d'aménager pour la création de deux terrains à bâtir sur cette parcelle. Par un arrêté du 22 janvier 2018, le maire de Labarthe-Rivière a opposé un sursis à statuer à sa demande. Par une lettre recommandée du 19 mai 2018, M. B... a formé un recours gracieux contre cet arrêté. Par un jugement n°1803380 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 22 janvier 2018, a ordonné au maire de Labarthe-Rivière de procéder à un nouvel examen de la demande du pétitionnaire et a mis à la charge de la commune une somme de 1 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par la présente requête, la commune de Labarthe-Rivière relève appel de ce jugement du 8 février 2022 du tribunal administratif de Toulouse et doit être regardée comme demandant l'annulation des articles 1, 2 et 3 du jugement attaqué.

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. B... à la requête d'appel :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. "

3. Ces dispositions visent, dans un but de sécurité juridique, à permettre au bénéficiaire d'une autorisation d'urbanisme, ainsi qu'à l'auteur de cette décision, d'être informés à bref délai de l'existence d'un recours contentieux dirigé contre elle et doivent, à cet égard, être regardées comme s'appliquant également à un recours exercé contre une décision juridictionnelle constatant l'existence d'une telle autorisation.

4. L'annulation par le tribunal administratif du sursis à statuer, qui obligeait seulement l'administration à examiner la demande de M. B... au regard des anciennes dispositions du plan local d'urbanisme, ainsi que l'ont enjoint les premiers juges, n'a pas reconnu le droit du pétitionnaire à obtenir l'autorisation d'urbanisme sollicitée, ni ne l'a rendu titulaire d'une telle autorisation. Dès lors, la commune de Labarthe-Rivière n'était pas tenue de notifier sa requête d'appel en application des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la partie intimée doit être écartée.

Sur la recevabilité de la demande de première instance tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2018 :

5. L'article R. 421-1 du code de justice administrative dispose que : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il résulte de ces dispositions que l'administration n'est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais de recours administratifs préalables obligatoires. Il lui est loisible d'y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif.

6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 22 janvier 2018 opposant un sursis à statuer à la demande de permis d'aménager de M. B... mentionne que : " Si vous entendez contester la présente décision, vous pouvez saisir le tribunal administratif compétent d'un recours contentieux dans les délais de deux mois à partir de sa notification. Vous pouvez également saisir d'un recours gracieux l'auteur de la décision ou, lorsque la décision est délivrée au nom de l'Etat, saisir d'un recours hiérarchique le ministre chargé de l'urbanisme. Cette démarche prolonge le délai du recours contentieux qui doit être alors introduit dans les deux mois suivant la réponse (l'absence de réponse au terme d'un délai de deux mois vaut rejet implicite. (...) ". Par ailleurs, il est constant que cet arrêté a été notifié à son destinataire le jour même de son édiction ainsi que cela ressort des termes du recours gracieux formé par le pétitionnaire à son encontre.

7. D'autre part, aucune ambigüité ne ressort de la mention relative aux délais et voies de recours ouverts contre cet arrêté alors qu'au demeurant, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la précision relative à la possibilité d'exercer un recours gracieux facultatif et la mention de son délai n'étaient pas obligatoires au regard de l'article R. 421-5 précité du code de justice administrative. En outre, la circonstance que la décision attaquée ne fasse pas mention du tribunal administratif compétent ne fait pas obstacle à ce que les délais de recours juridictionnels commencent à courir. Dans ces conditions, M. B... ne peut utilement contester l'existence des mentions régulières des voies et délais de recours dans l'arrêté du 22 janvier 2018 ayant permis de faire courir le délai de recours contentieux de deux mois à compter de cette date. Aussi, le recours gracieux exercé le 19 mai 2018 par M. B..., soit plus de deux mois après la notification de l'arrêté en litige, était tardif et n'a pas pu conserver le délai de recours contentieux. Il s'ensuit que la commune de Labarthe-Rivière est fondée à soutenir que la demande d'annulation présentée par l'intéressé devant le tribunal administratif de Toulouse était irrecevable.

8. Il résulte de ce qui précède que commune de Labarthe-Rivière est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a jugé que M. B... avait présenté des conclusions en annulation recevables et a annulé l'arrêté du 22 janvier 2018 par lequel son maire a opposé un sursis à statuer à sa demande de permis d'aménager. Par voie de conséquence, il y a lieu d'annuler les articles 1er, 2 et 3 du jugement attaqué et de rejeter comme irrecevable la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune appelante, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Labarthe-Rivière et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1, 2 et 3 du jugement n°1803380 du tribunal administratif de Toulouse en date du 2 octobre 2020 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. B... présentée devant le tribunal administratif de Toulouse auxquelles il a été fait droit en première instance et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : M. B... versera à la commune de Labarthe-Rivière la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié la commune de Labarthe-Rivière et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

Le greffier,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 20TL23774 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL23774
Date de la décision : 23/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Procédures d'intervention foncière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : CABINET CLAMENS CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-03-23;20tl23774 ?
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