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20/06/2023 | FRANCE | N°21TL01372

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 20 juin 2023, 21TL01372


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier avant dire-droit, d'enjoindre à l'Etat de produire tous les éléments sur lesquels il s'est fondé pour écarter sa candidature de réserviste civil et notamment l'évaluation effectuée par son ancien service, d'annuler la décision du 16 avril 2019 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a refusé d'agréer sa candidature pour la réserve civile de la police de l'air et des frontières des Pyrénées-Orientales, d'enjoi

ndre au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de réexaminer sa demande, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier avant dire-droit, d'enjoindre à l'Etat de produire tous les éléments sur lesquels il s'est fondé pour écarter sa candidature de réserviste civil et notamment l'évaluation effectuée par son ancien service, d'annuler la décision du 16 avril 2019 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a refusé d'agréer sa candidature pour la réserve civile de la police de l'air et des frontières des Pyrénées-Orientales, d'enjoindre au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1902933 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 avril 2021 sous le n°21MA01372 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL01372, et un mémoire enregistré le 31 août 2022, M. B... A..., représenté par Me Bonnet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1902933 du 12 février 2021 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler la décision du 16 avril 2019 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a refusé d'agréer sa candidature pour la réserve civile de la police de l'air et des frontières des Pyrénées-Orientales ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'adjoint au secrétaire général pour l'administration du ministère de l'intérieur de la zone de défense et de sécurité Sud n'était pas absent ou empêché le 16 avril 2019 ;

- aucune enquête administrative n'a été menée au moment de sa demande dans le cadre du réexamen ;

- les dispositions de l'article L.411-9 du code de la sécurité intérieure ont également été méconnues dès lors qu'il remplit les conditions prévues, qu'il n'entre dans aucun cas d'incompatibilité et que la capacité professionnelle ou les appréciations des anciens chefs de service ne font pas partie des conditions d'accès à la réserve nationale ;

- les griefs qui lui sont reprochés et relatifs à ses états de service ne caractérisent pas des agissements contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs, qui pourraient porter atteinte à la sécurité des personnes, des biens, à la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat ;

- le préfet a méconnu l'autorité de la chose jugée, la première décision comportant déjà des motifs relatifs à sa manière de servir ;

- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation, les deux évaluations ne pouvaient être utilisées dans l'enquête administrative en raison de leur ancienneté et la fiche d'évaluation du 23 septembre 2016 n'est pas représentative de son aptitude actuelle puisqu'elle a été rédigée trois ans après sa mise à la retraite.

Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. A....

Par un mémoire enregistré le 10 août 2022, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud conclut au rejet de la requête et produit son mémoire de première instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 août 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet aux écritures de première instance et fait en outre valoir que :

- aucun élément ne permet de mettre en doute l'absence ou l'empêchement de l'adjoint au secrétaire général pour l'administration du ministère de l'intérieur de la zone de défense et de sécurité Sud ;

- la candidature a été rejetée après réalisation d'une enquête administrative, qui n'a pas à revêtir des caractéristiques particulières ou d'action minimum pour être définie comme telle ;

- le préfet s'est appuyé sur des éléments nouveaux pour prendre une nouvelle décision à la suite du réexamen de la situation de M. A..., de sorte qu'il n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée ;

- en application de l'article L.411-7 du code de la sécurité intérieure, tous comportements considérés comme incompatibles peuvent être utilisés pour évaluer la candidature d'un agent pour le poste de réserviste, alors même qu'ils n'ont pas donné lieu à sanction et ne sont pas contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat ;

- l'incompatibilité du comportement de M. A... avec les missions à exercer est soulignée par les évaluations 2012 et 2013 qui mettent en valeur son insuffisance professionnelle et son comportement inapproprié envers la hiérarchie ; il n'a pas été écarté pour ses seules insuffisances professionnelles mais aussi en raison de son inaptitude à exercer sur la voie publique en raison de sa situation médico administrative qui a amené à son désarmement le 21 mars 2012.

Par une ordonnance du 22 août 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 septembre 2022 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Nivet substituant Me Bonnet pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., gardien de la paix à la retraite depuis le 16 juillet 2013, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande sollicitant l'annulation de la décision du 16 avril 2019 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud, après l'avoir réexaminée, a rejeté sa candidature pour la réserve civile contractuelle de la police nationale.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 411-7 du code de la sécurité intérieure, dans sa version applicable à l'espèce : " La réserve civile de la police nationale est destinée à des missions de soutien aux forces de sécurité intérieure et des missions de solidarité, en France et à l'étranger, à l'exception des missions de maintien et de rétablissement de l'ordre public. Elle est constituée : (...) 3° De volontaires, dans les conditions définies aux articles L. 411-9 à L. 411-11. Les retraités des corps actifs de la police nationale mentionnés au troisième alinéa du présent article peuvent également adhérer à la réserve civile au titre de volontaire. ". Aux termes de l'article L. 411-9 du même code dans sa version applicable jusqu'au 26 janvier 2022 : " Peuvent être admis dans la réserve civile de la police nationale, au titre des 2° et 3° de l'article L. 411-7, les candidats qui satisfont aux conditions suivantes :1° Etre de nationalité française ; 2° Etre âgé de dix-huit à soixante-cinq ans ;3° Ne pas avoir été condamné soit à la perte des droits civiques ou à l'interdiction d'exercer un emploi public, soit à une peine criminelle ou correctionnelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ; 4° Etre en règle au regard des obligations du service national ;5° Posséder l'aptitude physique requise pour exercer une activité dans la réserve, dont les conditions sont prévues par arrêté du ministre de l'intérieur. Nul ne peut être admis dans la réserve s'il résulte de l'enquête administrative, ayant donné lieu le cas échéant à la consultation des traitements de données à caractère personnel mentionnés aux articles 230-6 et 230-19 du code de procédure pénale, que le comportement ou les agissements du candidat sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat (...) ".

3. Le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a refusé d'admettre M. A... dans la réserve civile de la police nationale au regard de ses évaluations portant sur les années 2012 et 2013 et de la fiche d'évaluation du 23 septembre 2016 qui montrent en particulier que l'intéressé a un comportement intolérant envers l'autorité hiérarchique, se place en dehors du collectif et que ses compétences professionnelles sont insuffisantes, étant dans l'incapacité d'occuper pleinement le poste de standardiste sur lequel il a finalement été affecté. Il a d'ailleurs fait l'objet d'une décision de désarmement au mois de mars 2012 et ne pouvait plus exercer ses fonctions sur la voie publique. Ces faits n'ont toutefois pas donné lieu à sanction disciplinaire et ne sont pas contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat. Il est constant que M. A... remplit par ailleurs l'ensemble des autres conditions prévues par les dispositions citées au point 2. Par suite, en refusant de faire droit à la demande de l'intéressé au motif que son comportement est incompatible avec les missions envisagées alors que cette condition n'était pas prévue par les dispositions de l'article L.411-9 du code de la sécurité intérieure dans leur version alors applicable, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a entaché sa décision d'une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".

6. Le présent arrêt, qui annule la décision du 16 avril 2019, implique nécessairement, eu égard aux motifs sur lesquels il se fonde, que le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud procède à un nouvel examen de la demande de M. A.... Il y a lieu d'enjoindre à cette autorité d'y avoir procédé dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu dans les circonstances de l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre des frais qu'il a exposé et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier n°1902933 du 12 février 2021 et la décision du 16 avril 2019 du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de procéder à un nouvel examen de la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21TL01372


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL01372
Date de la décision : 20/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-025 Police. - Personnels de police.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIÉ
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : BONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-06-20;21tl01372 ?
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