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25/01/2024 | FRANCE | N°23TL01092

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 25 janvier 2024, 23TL01092


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 août 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2200634 du 12 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

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Par une requête, enregistrée le 10 mai 2023, M. A..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :



1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 août 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2200634 du 12 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2023, M. A..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 30 août 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la décision de la cour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce versement emportant renonciation à l'indemnité accordée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le jugement attaqué ne répond pas au moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation par le préfet de l'Hérault et est insuffisamment motivé sur ce point ;

- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire enregistré le 8 août 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Barthez a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 25 février 1982 indiquant être entré sur le territoire français en 2013 muni d'un visa court séjour délivré par les autorités espagnoles, a sollicité un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " le 27 avril 2021. Par un arrêté du 30 août 2021, le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. A... fait appel du jugement du 12 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". En retenant au point 2 du jugement attaqué que la décision contestée du préfet de l'Hérault faisait état de la situation personnelle et familiale de l'intéressé, le tribunal administratif de Montpellier a répondu, de manière suffisante, au moyen tiré de l'absence d'examen sérieux de la situation de M. A.... Celui-ci n'est donc pas fondé à soutenir que le tribunal administratif aurait omis de répondre à ce moyen ou que le jugement serait ainsi entaché d'un défaut de motivation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation de l'arrêté du 30 août 2021, que le préfet de l'Hérault a pris en compte la situation irrégulière de l'épouse de M. A... ainsi que l'existence de deux précédentes mesures d'éloignement qui n'ont pas été exécutées, malgré le rejet des recours contentieux. Il a ainsi procédé à un examen réel et sérieux de la situation de M. A... avant de prendre l'arrêté contesté, bien que celui-ci ne fasse pas état de l'existence de son second enfant ni de la présence régulière de ses parents et sa fratrie sur le territoire français. Par suite, ce moyen doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

5. Il ressort des pièces du dossier que les parents et les frères et sœurs de M. A... résident sur le territoire français de manière régulière, l'une de ses sœurs étant française. Toutefois, à supposer même qu'il réside habituellement en France depuis 2013, il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de trente-et-un ans. Il a refusé d'exécuter les deux précédentes décisions d'éloignement dont il a fait l'objet, datées du 19 octobre 2014 et du 29 décembre 2017, et les recours contre ces décisions ont été rejetés, en dernier lieu, par deux arrêts de la cour administrative d'appel de Marseille du 20 juin 2016 et du 21 novembre 2018. Son épouse de nationalité marocaine est également en situation irrégulière et leurs deux enfants nés en France ne sont pas scolarisés à la date de l'arrêté contesté. Enfin, aucune insertion sociale ou professionnelle particulière ne ressort des pièces du dossier, les photographies versées au soutien de la requête étant insuffisantes pour justifier de l'exercice d'une activité professionnelle en France par l'intéressé, qui n'a d'ailleurs déclaré aucun revenu au titre des années 2019 et 2020 et ne démontre au surplus aucune qualification professionnelle particulière. Par suite, dès lors que la vie de famille peut se reconstituer dans le pays d'origine, les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de la vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

6. En troisième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que la vie familiale de M. A... avec son épouse et leurs deux enfants nés le 24 juillet 2019 et le 14 septembre 2020 peut se reconstituer au Maroc. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'intérêt supérieur de ses enfants n'aurait pas été suffisamment pris en compte.

7. En dernier lieu, pour les mêmes circonstances de fait que celles mentionnées aux points précédents, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions contestées du préfet de l'Hérault sur la situation personnelle de M. A... doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 août 2021 du préfet de l'Hérault. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... sur ce fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Christophe Ruffel et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Barthez, président,

M. Lafon, président assesseur,

Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2024.

Le président rapporteur,

A. Barthez

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

N. Lafon

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL01092 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01092
Date de la décision : 25/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: M. CLEN
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-25;23tl01092 ?
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