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26/04/2005 | FRANCE | N°05VE00008

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 26 avril 2005, 05VE00008


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 janvier 2005, présentée par la PREFET DU VAL-D'OISE qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0408065 du 2 décembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 12 octobre 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Nabil X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Nabil X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 5 janvier 2005, présentée par la PREFET DU VAL-D'OISE qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0408065 du 2 décembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 12 octobre 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Nabil X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Nabil X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; que l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 janvier 2005, présenté pour M. X, par Me Guetta ; M. X conclut : 1°) au rejet de l'appel du préfet ; 2°) à ce qu'il n'est enjoint au PREFET DU VAL-D'OISE de lui délivrer un titre de séjour avec mention vie privée et familiale ;

Il soutient qu'il est marié depuis un an à une ressortissante française ; qu'il a droit à l'application à son profit des articles 12 bis 4° et 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué porte à son droit à la vie privée et familiale une atteinte manifestement disproportionnée, contrairement aux prescriptions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire enregistré le 30 mars 2005, présenté par le PREFET DU VAL-D'OISE ; il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu la décision du Président de la Cour administrative d'appel de Versailles, en date du 3 janvier 2005, donnant délégation à M. Bresse pour l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article R. 776-19 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2005 :

- le rapport de M. Bresse, magistrat délégué ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Nabil X, de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 4 juin 2004, de la décision du PREFET DU VAL-D'OISE du 19 mai 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant que pour annuler en ce qu'il porte une atteinte disproportionnée à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'arrêté préfectoral émis contre M. Nabil X, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a relevé uniquement que le requérant initial est entré en France en janvier 2001, qu'il s'est marié avec une ressortissante française le 4 octobre 2003, et qu'existe une communauté de vie entre les époux ; que ces seules circonstances ne sont pas suffisantes, eu égard au caractère irrégulier du séjour en France de M. X, au caractère récent de sa liaison avec son épouse et à l'absence de certitude sur la vie commune des époux, pour caractériser une atteinte disproportionnée au droit de M. X de mener une vie familiale normale ; que le PREFET DU VAL-D'OISE est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté litigieux ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Nabil X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant la Cour ;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 12 bis 4° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée :

Considérant qu'aux terme de l'article 12 bis 4° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée en France ait été régulière, que la communauté de vie n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; que la circonstance que M. Nabil X n'est pas entré régulièrement sur le territoire national fait obstacle à ce qu'il puisse bénéficier de l'application de cet article ; que le moyen doit dès lors être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'atteinte au droit à la vie privée et familiale :

Considérant que M. Nabil X invoque à son profit l'application de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant d'une part qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant d'autre part qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ;

Considérant que si M. Nabil X fait valoir qu'il est marié à une ressortissante française depuis le 4 octobre 2003, soit un an avant l'édiction de la mesure attaquée, et que ses centres d'intérêts sont désormais en France, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions, irrégulières, de l'entrée et du séjour de l'intéressé en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PRÉFET DU VAL-D'OISE en date du 12 octobre 2004 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc méconnu ni les dispositions de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à demander l'annulation du jugement du 2 décembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 8 octobre 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Nabil X ;

Sur les conclusions au fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt rejetant la demande d'annulation de l'arrêté prononçant la reconduite à la frontière de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que dès lors les conclusions de M. X tendant à ce que soit enjoint au PREFET DU VAL-D'OISE de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 0408065 en date du 2 décembre 2004 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise par M. Nabil X et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

N°05VE00008

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE00008
Date de la décision : 26/04/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : GUETTA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-04-26;05ve00008 ?
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