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27/11/2008 | FRANCE | N°08VE00316

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 27 novembre 2008, 08VE00316


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2008 par télécopie et le 12 mars 2008 en original au greffe de la cour, par laquelle le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712142 du 27 décembre 2007 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé son arrêté du 24 décembre 2007 ordonnant la reconduite à la frontière et le placement en rétention administrative de M. Lahoucine A et, d'autre part, enjoint au préfet de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour et de réex

aminer sa situation ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le T...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2008 par télécopie et le 12 mars 2008 en original au greffe de la cour, par laquelle le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712142 du 27 décembre 2007 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé son arrêté du 24 décembre 2007 ordonnant la reconduite à la frontière et le placement en rétention administrative de M. Lahoucine A et, d'autre part, enjoint au préfet de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE soutient qu'une erreur manifeste d'appréciation a été commise par le magistrat délégué ; que la décision attaquée n'est pas un arrêté de reconduite à la frontière mais un arrêté portant placement en rétention qui ne vise pas expressément le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais son I, relatif à l'obligation de quitter le territoire français ; qu'il est également fait référence au 6° de l'article L. 551-1 de ce code, relatif au placement en rétention d'un étranger qui, faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise en application du I de l'article L. 511-1 moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai d'un mois pour quitter volontairement le territoire est expiré, ne peut quitter immédiatement ce territoire ; que l'arrêté a été pris pour assurer l'exécution d'une décision de refus de séjour en date du 3 janvier 2007, dès lors que l'intéressé disposait d'un délai d'un mois à compter de cette date pour quitter le territoire national ; qu'en ce qui concerne les moyens présentés devant le tribunal, sur la légalité externe, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'acte attaqué manque en fait ; que les faits propres à l'espèce ont été mentionnés ; que, sur la légalité interne, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été respecté ; que M. A est célibataire sans enfant et n'établit pas la réalité de son concubinage avec une ressortissante française, alors que celle-ci réside à Alençon dans le département de l'Orne ; qu'il ne justifie pas non plus d'attaches fortes en France et n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine où résident ses soeurs ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2008 :

- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 20 novembre 2007 : I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l' existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) / L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration. / Les dispositions du titre V du présent livre peuvent être appliquées à l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès l'expiration du délai prévu à l'alinéa précédent (...) / II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire prise depuis au moins un an (...) ; qu'aux termes de l'article L. 551-1 du même code : Le placement en rétention d'un étranger dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : (...) 6° (...) faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise en application du I de l'article L. 511-1 moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai d'un mois pour quitter volontairement le territoire est expiré, ne peut quitter immédiatement ce territoire ;

Considérant qu'il résulte des dispositions du troisième alinéa du I de l'article L. 511-1 précité qu'à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la notification d'une décision de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration et que, si l'étranger n'a pas quitté le territoire, il peut, par application du 6° de l'article L. 511-1, être placé en rétention en vue de son éloignement ; que si les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 prévoient que l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire depuis plus d'un an peut faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, ces dispositions ne font pas obstacle, en droit, à ce que l'autorité administrative prenne également un arrêté de reconduite à la frontière à l'égard des étrangers faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise en application du I de l'article L. 511-1 moins d'un an auparavant ;

Considérant que, par arrêté en date du 3 janvier 2007 devenu définitif, le préfet de la Vendée a refusé à M. A un titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français ; que, par arrêté du 24 décembre 2007, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a ordonné la reconduite à la frontière de l'intéressé et l'a placé en rétention administrative ; que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 24 décembre 2007 au motif que, la décision de refus de titre de séjour assortie de l'obligation de quitter le territoire français datant de moins d'un an, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ne pouvait ordonner la reconduite à la frontière de l'intéressé ; qu'en estimant que les étrangers faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise en application du I de l'article L. 511-1 moins d'un an auparavant ne pouvaient pas faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, le magistrat délégué a commis une erreur de droit ; que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué a annulé, pour ce motif, l'arrêté attaqué ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Versailles ;

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, et nonobstant l'utilisation d'un formulaire, le moyen tiré de sa motivation insuffisante doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que si M. A soutient que sa situation n'a pas fait l'objet d'un réexamen et qu'ainsi, il aurait été privé d'une garantie procédurale, il ressort toutefois des termes mêmes de l'arrêté attaqué que la situation personnelle de l'intéressé a fait l'objet d'un examen particulier ; que, par suite, le moyen invoqué doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que M. A, qui est entré en France en 2001 à l'âge de 18 ans, soutient qu'il est pris en charge par ses parents chez qui il vit, avec son frère de nationalité française, et qu'il a une relation depuis cinq ans avec une ressortissante française ; que, toutefois, le requérant est célibataire sans enfant et que la production d'une attestation de concubinage en date du 25 décembre 2007, émanant de sa compagne, ne suffit pas, à elle seule, à établir la réalité de la durée et de la stabilité des liens du couple ; qu'en outre, en se bornant à se prévaloir de ce que son père vit en France depuis 1968, M. A n'établit pas l'intensité de ses liens familiaux en France ; que, dans ces conditions, l'arrêté préfectoral attaqué n'a pas porté en l'espèce au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A, qui n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses deux soeurs, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet acte a été pris ; que, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ; que, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ne peut être accueilli ;

Considérant, en second lieu, que la circonstance que M. A soit titulaire d'une promesse d'embauche est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 24 décembre 2007 décidant la reconduite à la frontière de M. A et le plaçant en rétention administrative et lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. A ainsi que de réexaminer la situation de ce dernier dans un délai de trois mois ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui annule le jugement du Tribunal administratif de Versailles susvisé, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions présentées par M. A tendant à ce que la cour enjoigne au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0712142 en date du 27 décembre 2007 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Versailles et ses conclusions présentées devant la Cour administrative d'appel sont rejetées.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 08VE00316
Date de la décision : 27/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : MOKADEM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-11-27;08ve00316 ?
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