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15/12/2009 | FRANCE | N°08VE01527

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 15 décembre 2009, 08VE01527


Vu la requête, enregistrée en télécopie le 11 mai 2008 et en original le 22 mai 2008, présentée pour M. Ali A, demeurant chez M. Ben B ..., par Me Lemoine ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712912-0705091 du 17 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2006, confirmée le 19 mars 2007, du préfet du Val-d'Oise refusant de lui délivrer un titre de séjour et de l'arrêté du 26 octobre 2007 du préfet du Val-d'Oise portant refus de titre de séjour et obliga

tion de quitter le territoire français à destination du Maroc ;

2°) d'an...

Vu la requête, enregistrée en télécopie le 11 mai 2008 et en original le 22 mai 2008, présentée pour M. Ali A, demeurant chez M. Ben B ..., par Me Lemoine ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712912-0705091 du 17 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2006, confirmée le 19 mars 2007, du préfet du Val-d'Oise refusant de lui délivrer un titre de séjour et de l'arrêté du 26 octobre 2007 du préfet du Val-d'Oise portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à destination du Maroc ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, en premier lieu, que la décision du 26 octobre 2007 portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il est atteint de la maladie de Behcet, qui met en cause son pronostic vital et nécessite une prise en charge médicale ne pouvant être dispensée dans son pays d'origine ; que cette décision a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il réside depuis 2001 en France où il a désormais des attaches privées effectives, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ; que la décision du même jour portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée en droit et a été prise en violation des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ; en deuxième lieu, que la décision du 19 mars 2007 par laquelle le préfet du Val-d'Oise a confirmé sa décision du 22 décembre 2006 refusant de lui délivrer un titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2009 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

- et les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;

Considérant que, par décision du 22 décembre 2006, confirmée le 19 mars 2007, puis par décision du 26 octobre 2007, assortie d'une obligation de quitter le territoire français, le préfet du Val-d'Oise a refusé de délivrer à M. A, ressortissant marocain, une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. A fait appel du jugement du 17 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la légalité des décisions de refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) ;

Considérant que M. A soutient qu'il est atteint d'une pathologie mettant en jeu son pronostic vital et qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; qu'il ressort, toutefois, des pièces versées au dossier que le médecin inspecteur de la santé publique, consulté à trois reprises par le préfet du Val-d'Oise, a émis l'avis, les 12 septembre 2006, 26 février 2007 et 25 juin 2007, que si l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut effectivement recevoir les soins appropriés à son état de santé dans son pays d'origine ; que les certificats médicaux produits par le requérant, et notamment celui du 13 janvier 2007 d'un médecin de l'hôpital provincial de Guelmim au Maroc indiquant que cet hôpital ne dispose pas de médecin pouvant prendre en charge la pathologie dont souffre M. A, ainsi que celui établi le 30 avril 2007 par un médecin généraliste mentionnant que le patient est originaire d'une région isolée du Maroc où les soins semblent peu accessibles ne suffisent pas à infirmer l'appréciation portée par le médecin inspecteur de la santé publique selon laquelle l'intéressé peut effectivement recevoir traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à soutenir que les décisions de refus de séjour qui lui ont été opposées auraient été prises en violation des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infraction pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A fait valoir qu'il réside depuis 2001 en France et qu'il y a désormais des attaches privées effectives ; que, toutefois, le requérant, qui est célibataire et sans enfant, n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvu de toute attache au Maroc où il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans, et n'apporte aucune précision sur les liens qu'il aurait tissés en France ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce et, notamment, à la durée et aux conditions de séjour de M. A, les décisions attaquées n'ont pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont donc pas été méconnues ;

Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise aurait fait une appréciation manifestement erronée de la situation de M. A ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant que l'obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui, à la date de la décision attaquée, devait être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que si la motivation de cette mesure, qui se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement, n'appelle pas d'autre mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, c'est toutefois à la condition que l'autorité préfectorale ait rappelé les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;

Considérant qu'en se bornant en l'espèce à viser le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans rappeler les dispositions législatives qui permettent d'assortir un refus de titre de séjour d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français, le préfet du Val-d'Oise a méconnu cette exigence de motivation ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, M. A est fondé à demander l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 octobre 2007 du préfet du Val-d'Oise portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 0712912-0705091 du 17 mars 2008 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A dirigées contre l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 26 octobre 2007 en ce qu'il porte obligation à M. A de quitter le territoire français.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Val-d'Oise en date du 26 octobre 2007 est annulé en tant qu'il porte obligation à M. A de quitter de territoire français.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

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N° 08VE01527


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 08VE01527
Date de la décision : 15/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: Mme JARREAU
Avocat(s) : LEMOINE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2009-12-15;08ve01527 ?
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