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14/12/2010 | FRANCE | N°10VE00438

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 14 décembre 2010, 10VE00438


Vu la requête, enregistrée le 12 février 2010 sous le n° 10VE00438 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, pour L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS- REGION PARISIENNE (URSSAF), dont le siège social est 22 - 24 rue de Lagny à Montreuil (93100), par la SCP Barraquand Lapisardi ; l'URSSAF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0812866 en date du 1er décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 30 août 2008 du ministre du travail, des relatio

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Vu la requête, enregistrée le 12 février 2010 sous le n° 10VE00438 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, pour L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS- REGION PARISIENNE (URSSAF), dont le siège social est 22 - 24 rue de Lagny à Montreuil (93100), par la SCP Barraquand Lapisardi ; l'URSSAF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0812866 en date du 1er décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 30 août 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité autorisant le licenciement de Mme Isabelle A ;

2°) de rejeter la demande de Mme A présentée devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de Mme A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs, considérant à la fois que le motif de l'insuffisance professionnelle avait été abordé lors de l'entretien préalable et que toutefois le contenu de l'entretien n'a pas mis Mme A à même de connaître les motifs retenus pour son licenciement ;

- le motif de l'insuffisance professionnelle a été bien abordé lors de l'entretien préalable ; le directeur général adjoint de l'URSSAF a nécessairement abordé le nombre insuffisant d'examens de visites médicales ; le document établi avant la réunion du comité d'entreprise résume notamment l'entretien préalable et confirme que les motifs du licenciement ont bien été abordés lors de cet entretien ; la question de l'insuffisance du nombre de visites a été longuement abordée lors de la séance du comité d'entreprise du 28 février 2005 ;

- en tout état de cause la circonstance que le nombre insuffisant de visites médicales n'ait pas été abordé lors de l'entretien préalable ne constitue pas une irrégularité substantielle ; Mme A a été informée très rapidement de ce motif, qui figure dans la convocation à la séance du comité d'entreprise ; elle a pu en discuter lors de l'enquête contradictoire menée par l'inspection du travail ; elle en a pris connaissance dans le courrier du 13 février 2008 ;

- aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'employeur dans le cas d'une procédure non disciplinaire de mettre le dossier à la disposition du salarié avant l'entretien préalable ;

- elle a disposé de trois jours pour présenter sa défense devant le comité d'entreprise ; les deux motifs de licenciement invoqués n'ont cessé d'être évoqués devant ce salarié de 2005 à 2008 ;

- l'URSSAF a respecté le délai entre la séance du comité d'entreprise et la demande de licenciement en saisissant l'inspection du travail le 27 février 2008, soit 8 jours après la séance ;

- le signataire du recours hiérarchique auprès du ministre du Travail est le directeur adjoint de l'URSSAF, qui a reçu une délégation à cette fin ;

- le ministre saisi sur recours hiérarchique n'a aucune obligation de procéder à une nouvelle enquête contradictoire ; il n'avait pas donc à entendre Mme A ;

- la décision autorisant le licenciement en date du 30 août 2008 est suffisamment motivée, circonstanciée et précise ;

- l'URSSAF a constaté, au regard des seuils plafond fixés par l'article R. 4623-10 du code du travail, une défaillance dans la gestion du temps de travail de Mme A, le nombre de visites effectuées restant très en dessous des exigences légales et les examens périodiques effectués en deçà du nombre réalisé par le deuxième médecin du travail ; ces résultats ne trouvent pas leur explication dans le déménagement du service médical de santé au travail en 2006, dans la nouvelle organisation du service, dans un manque de moyens humains et matériels, dans des dysfonctionnements informatiques ou dans la prise de ses congés ;

- les instructions de la direction en date du 14 septembre 2007 sont sans incidences sur l'activité de Mme A et ne justifient pas le faible nombre de visites effectuées par ce médecin du travail ;

- la décision litigieuse n'est pas fondée sur une réorganisation des services et ne sanctionne pas l'indépendance de Mme A ;

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II) Vu le recours, enregistré le 18 novembre 2010 sous le n° 10VE00545 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté par le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE, DE LA SOLIDARITE ET DE LA VILLE ; le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE, DE LA SOLIDARITE ET DE LA VILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0812866 en date du 1er décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé sa décision du 30 août 2008 autorisant le licenciement de Mme Isabelle A ;

2°) de rejeter la demande de Mme A présentée devant le tribunal administratif ;

Il soutient que :

- les deux motifs du licenciement, l'insuffisance professionnelle et les dysfonctionnements du service, ont été évoqués lors de l'entretien préalable ; le représentant du personnel a précisé qu'il y a été procédé à un exposé des faits et à une qualification du licenciement ; le compte-rendu du comité d'entreprise du 28 février 2005 établit l'insuffisance des visites médicales réalisées ;

- rien n'oblige l'employeur, dans le cadre de l'article L. 1232-2 du code du travail, à préciser les raisons envisagées du licenciement dans le cadre de la lettre de convocation à l'entretien préalable ;

- l'insuffisance professionnelle du docteur A est caractérisée par des retards très importants dans la réalisation des visites médicales dont elle a la responsabilité ; les difficultés rencontrées par le service de santé au travail de l'URSSAF ne justifient pas l'ampleur de ces retards ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2010 :

- le rapport de M. Brumeaux, président assesseur,

- les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public,

- et les observations de Me Lapisardi pour l'URSSAF et de Me Tourniquet pour Mme A ;

Vu les deux notes en délibéré, enregistrées le 1er décembre 2010 présentées pour l'URSSAF PARIS REGION PARISIENNE ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 1er décembre 2010, présentée pour Mme A ;

Considérant que la requête et le recours susvisés, qui sont dirigés contre un même jugement, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 4623-4 du code du travail : Tout licenciement d'un médecin du travail envisagé par l'employeur est soumis pour avis, soit au comité d'entreprise, soit au comité interentreprises ou à la commission de contrôle du service interentreprises ; qu'aux termes de l'article L. 4623-5 du même code : le licenciement d'un médecin du travail ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend le service de santé au travail, après avis du médecin inspecteur du travail ; qu'aux termes de l'article L. 1232-2 du même code : L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable ; qu'aux termes enfin de l'article L. 1232-3 de ce code : Au cours de l'entretien préalable, l'employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié ; qu'il résulte de ces dispositions que l'entretien préalable doit permettre au salarié de connaître les motifs du licenciement envisagé et de s'expliquer à leur sujet ;

Considérant que par une décision en date du 30 août 2008, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, saisi d'un recours hiérarchique, a retiré le refus d'autorisation de licencier Mme TALON, médecin du travail, qui a avait été opposé à son employeur, L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS REGION PARISIENNE (URSSAF), par décision du 1er avril 2008 et a autorisé le licenciement de Mme A ;

Considérant qu'il ressort de l'attestation établie par M. Chatenoud, conseiller du salarié ayant assisté Mme A lors de l'entretien préalable qui s'est déroulé le 4 février 2008, que l'employeur avait indiqué à cette dernière plusieurs motifs de licenciement (mésentente, dysfonctionnement, désorganisation du service, perte de confiance et insuffisance professionnelle), ce dernier motif n'ayant pas été explicité ; que cependant le document élaboré par l'employeur avant la saisine du comité d'entreprise le 19 février 2008, et qui a été communiqué à Mme A trois jours avant sa réunion, a fait apparaître qu'il lui était principalement reproché, outre son comportement vis-à-vis du second médecin du travail, une carence dans le nombre d'examens médicaux périodiques effectués auprès des salariés de l'URSSAF et que l'insuffisance professionnelle alléguée était alors justifiée par un tableau dont le salarié n'avait alors pas eu connaissance et qu'il n'a donc pu discuter en temps utile, alors que ce motif fonde exclusivement l'autorisation accordée par le ministre ; que cette lacune, qui ressort du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 19 avril 2008 et qui a été relevée par le médecin inspecteur du travail dans son avis du 28 avril 2008, au terme d'une enquête qu'il avait effectuée en compagnie d'un inspecteur du travail le 25 avril 2008, implique que l'entretien préalable n'a pas porté sur le véritable motif de la décision de licenciement envisagée à l'encontre de Mme A et constitue une irrégularité substantielle ; qu'ainsi la procédure prévue à l'article L. 1232-3 du code du travail a été méconnue ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS REGION PARISIENNE ET LE MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE, DE LA SOLIDARITE ET DE LA VILLE ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'une contradiction de motifs, annulé la décision en date du 30 août 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité autorisant le licenciement de Mme A ;

Sur les conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS REGION PARISIENNE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS REGION PARISIENNE et de l'Etat ( MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE) la somme de 1000 euros chacun ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS REGION PARISIENNE et le recours du MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE, DE LA SOLIDARITE ET DE LA VILLE sont rejetés.

Article 2 : L'UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE PARIS REGION PARISIENNE et l'Etat (MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE) verseront chacun 1 000 euros à Mme A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10VE00438-10VE00545 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00438
Date de la décision : 14/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme JARREAU
Avocat(s) : SCP BARRAQUAND LAPISARDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-12-14;10ve00438 ?
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