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04/11/2011 | FRANCE | N°10VE00839

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 04 novembre 2011, 10VE00839


Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. et Mme Christian A, demeurant ..., par Me Fargues, avocat à la Cour ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902519 en date du 11 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 23 octobre 2008 par laquelle le préfet de l'Essonne a refusé de leur délivrer une autorisation de défricher un terrain cadastré section B n° 931 situé sur le territoire de l

a commune d'Orveau, ensemble la décision du 14 janvier 2009 rejetant le...

Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. et Mme Christian A, demeurant ..., par Me Fargues, avocat à la Cour ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902519 en date du 11 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 23 octobre 2008 par laquelle le préfet de l'Essonne a refusé de leur délivrer une autorisation de défricher un terrain cadastré section B n° 931 situé sur le territoire de la commune d'Orveau, ensemble la décision du 14 janvier 2009 rejetant le recours gracieux formé contre cette décision ;

2°) de prononcer l'annulation des décisions contestées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de leur délivrer, à titre principal, l'autorisation de défrichement demandée et, à titre subsidiaire, de leur délivrer cette autorisation sous réserve qu'ils s'abstiennent d'abattre ou de dessoucher un quelconque arbre en application des dispositions du 1° de l'article L. 311-4 du code forestier ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme A soutiennent que l'arrêté de refus du 23 octobre 2008, dont la motivation est stéréotypée, contrevient aux prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 ; que l'autorisation de défrichement contestée ne se justifiait pas dès lors que la parcelle litigieuse ne correspond pas à un terrain boisé ; qu'en l'absence de définition légale de la notion d'état boisé, l'imprécision du procès-verbal du 25 août 2008 auquel a donné lieu la reconnaissance sur place, les photographies, les vues aériennes, la notice d'impact du 7 avril 2008 et l'attestation du géomètre expert du 2 mars 2010, aussi bien que la surface de la parcelle elle-même, ne permettaient pas au tribunal de conclure au caractère boisé du terrain litigieux ; que, nonobstant son absence de caractère réglementaire, la notice d'information (formulaire Cerfa n° 51240#01) diffusée par l'administration lui est opposable ; que cette notice définit l'état boisé d'une surface comme un sol occupé par des arbres couvrant au moins 10 % de celle-ci, représentant au moins 5 ares avec une largeur moyenne en cime de 15 mètres au moins ; qu'en l'espèce, la surface boisée de la parcelle n° 931 occupe moins de 10 % du total de cette aire et que la surface de parcelle destinée à la construction (480 m²) est inférieure à 5 ares ; qu'aucune autorisation de défrichement n'était donc nécessaire et qu'elle a uniquement été demandée au motif que le certificat d'urbanisme l'exigeait à tort ; que, par suite, le refus d'autorisation du préfet de l'Essonne est surabondant, dès lors qu'une autorisation de défrichement n'était ni requise, ni nécessaire ; que ce refus est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur de fait en ce que le préfet s'est prononcé au vu de documents qui ne correspondaient plus à la configuration actuelle des lieux ; que leur parcelle se situe dans la continuité d'une zone urbanisée et que toutes les parcelles situées entre la leur et le centre historique du village sont le siège de constructions ; qu'elle ne saurait ainsi être regardée comme ancrée dans le massif forestier d'Orveau et de Bouville ; que, dès lors qu'un défrichement avait été autorisé pour une parcelle voisine appartenant au même massif boisé, le préfet de l'Essonne ne pouvait se prononcer différemment quant à la leur ; que la circonstance qu'une parcelle appartienne à une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) ne constitue pas nécessairement un motif d'opposition à une demande d'autorisation de défrichement ; que l'absence de nécessité de couper ou dessoucher un arbre, pour défricher puis construire, aurait dû conduire l'administration à délivrer l'autorisation demandée ; que le motif d'opposition retenu, constitué par le critère de l'équilibre biologique prévu au 8° de l'article L. 311-3 du code forestier n'est pas pertinent dès lors que des parcelles voisines appartenant au même massif ont obtenu ces autorisations de défrichement ; qu'à cet égard, l'autorisation délivrée pour la parcelle n° 923 mentionne qu'aucun des motifs d'opposition prévus à l'article L. 311-3 du code forestier n'est susceptible de s'appliquer au bois objet de la demande alors même que cette parcelle est tout autant incluse dans le périmètre de la ZNIEFF que la leur ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en prenant sa décision de refus ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code forestier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2011 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- et les observations de Me Fargues, pour M. et Mme A ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-1 du code forestier : Est un défrichement toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière (...) Nul ne peut user du droit de défricher ses bois sans avoir préalablement obtenu une autorisation (...) ; qu'aux termes de l'article L. 311-2 du même code : Sont exceptés des dispositions de l'article L. 311-1 : 1° Les bois de superficie inférieure à un seuil compris entre 0,5 et 4 hectares, fixé par département ou partie de département par le représentant de l'Etat dans le département, sauf s'ils font partie d'un autre bois dont la superficie, ajoutée à la leur, atteint ou dépasse le seuil fixé selon les modalités précitées (...) et qu'aux termes de l'article L. 311-3 dudit code : L'autorisation de défrichement peut être refusée lorsque la conservation des bois ou des massifs qu'ils complètent, ou le maintien de la destination forestière des sols, est reconnu nécessaire : (...) 8° A l'équilibre biologique d'une région ou d'un territoire présentant un intérêt remarquable et motivé du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l'écosystème ou au bien-être de la population ;

Considérant que, par la décision attaquée du 23 octobre 2008, le préfet de l'Essonne a refusé à M. et Mme A l'autorisation de défricher une parcelle sise sur le territoire de la commune d'Orveau ;

Considérant, en premier lieu, qu'en estimant qu'il résulte de l'instruction que la conservation de l'ensemble du massif forestier dont fait partie la parcelle boisée qui a fait l'objet de la demande susvisée est nécessaire à l'équilibre biologique d'un territoire présentant un intérêt remarquable et motivé du point de vue de la préservation des espèces animales et végétales et de l'écosystème ou au bien-être de la population au sens de l'article L. 311-3 8° du code forestier , le préfet de l'Essonne a apporté, eu égard à la précision des dispositions législatives applicables, une motivation suffisante à sa décision ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de reconnaissance des bois à défricher du 25 août 2008, d'ailleurs signé par les époux A le 6 octobre suivant, et de l'avis du directeur régional de l'environnement du 16 octobre 2008, que la parcelle pour laquelle une autorisation de défrichement a été demandée est enclavée dans un massif boisé et abrite un peuplement de chênes d'une hauteur moyenne d'environ douze mètres, un tilleul et un pin ; qu'ainsi, elle constitue, et alors même qu'elle ne comporterait qu'un nombre limité d'arbres, un bois au sens des dispositions précitées de l'article L. 311-1 du code forestier ; que la circonstance que le préfet de l'Essonne aurait méconnu les termes d'une notice d'information diffusée par l'administration relative à la notion d'état boisé ne saurait, en tout état de cause, être utilement invoquée, une telle notice étant dépourvue de tout caractère réglementaire ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le défrichement de la parcelle en cause devait être soumis à une autorisation administrative préalable, laquelle n'avait donc pas de caractère surabondant, dès lors que le massif boisé dont elle fait partie, constitué par les boisements des coteaux d'Orveau et de Bouville, représente une superficie d'une centaine d'hectares qui excède manifestement le seuil mentionné aux dispositions dérogatoires du 1° de l'article L. 311-2 du code forestier précité ;

Considérant, en troisième lieu, que cette parcelle apparaît dans le schéma directeur d'Ile-de-France en espace boisé à protéger et s'inscrit à l'intérieur de la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type I dénommée Coteau de Bouville et Orveau ; qu'ainsi, et bien que le projet de construction d'une maison individuelle sur une partie seulement de celle-ci ne nécessiterait, selon l'avis du géomètre expert mandaté par les époux A, l'abattage ou le dessouchement d'aucun arbre, le défrichement de ce terrain, s'il était autorisé, n'en constituerait pas moins une encoche dans le massif boisé, en décalage par rapport à la rangée des autres constructions existantes, accentuant un phénomène de retrait des lisières du coteau boisé ; que, dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que le projet de défrichement n'aurait porté que sur une superficie de 480 m², peu importante au regard du boisement du coteau de Bouville et d'Orveau, il résulte de l'ensemble de ces éléments que le préfet de l'Essonne, qui ne s'est pas prononcé au vu d'éléments matériellement inexacts ou erronés, n'a pas, en refusant aux intéressés l'autorisation de défricher qu'ils demandaient, commis d'erreur de droit ou d'appréciation quant au risque d'altération de l'environnement à protéger lié au défrichement ;

Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que des constructions existeraient dans le voisinage est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse ; qu'il en est de même du moyen tiré de la rupture d'égalité entre, d'une part, les administrés contraints de demander une autorisation préalable de défrichement et ceux qui n'y sont pas contraints et ceux, d'autre part, qui, bien que tous titulaires d'une autorisation de construire sur un terrain constructible, peuvent réaliser ou ne pas réaliser leur projet de construction dès lors que ces situations, différentes, sont soit fondées sur des dispositions législatives et réglementaires d'urbanisme distinctes de la réglementation relative aux opérations de défrichement, soit résultent d'une différence de situation objective tenant à la plus ou moins grande superficie de l'espace à protéger à laquelle se rattache le terrain à défricher, et dont le seuil, compris entre 0,5 et 4 hectares, a été fixé par le législateur à l'article L. 311-2 du code forestier ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'au vu des éléments de fait évoqués ci-dessus, les époux A ne sont pas davantage fondés à demander, à titre subsidiaire, qu'une autorisation de défrichement leur soit délivrée sous réserve qu'ils s'abstiennent d'abattre ou de dessoucher un quelconque arbre ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 23 octobre 2008 du préfet de l'Essonne, ainsi que celle du 14 janvier 2009 rejetant leur recours gracieux formé contre cette décision ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme A demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

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N° 10VE00839 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00839
Date de la décision : 04/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Agriculture - chasse et pêche - Bois et forêts - Protection des bois et forêts.

Agriculture - chasse et pêche - Bois et forêts - Protection des bois et forêts - Autorisation de défrichement.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : FARGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-11-04;10ve00839 ?
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