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16/10/2012 | FRANCE | N°11VE00916

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 16 octobre 2012, 11VE00916


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Steve A, demeurant chez M. Joseph B, ..., par Me Gassoch-Dujoncquoy, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001756 du 8 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 janvier 2010 refusant de renouveler son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destinati

on duquel il pourra être éloigné ;

2°) d'annuler, pour excès de pouv...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Steve A, demeurant chez M. Joseph B, ..., par Me Gassoch-Dujoncquoy, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001756 du 8 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 janvier 2010 refusant de renouveler son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10 de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, faute pour le préfet d'avoir saisi la commission du titre de séjour avant de prendre l'arrêté attaqué, alors que son cas relève des dispositions tant du 7 que du 11 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de forme ; qu'il est toujours atteint d'un lymphome anaplasique à grandes cellules dont la prise en charge nécessite sa présence sur le sol français, dès lors qu'il doit faire l'objet d'une surveillance spécialisée dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité; qu'il ne peut être pris en charge au Cameroun ; que l'avis du médecin inspecteur de santé publique, qui est en contradiction avec son précédent avis, est erroné ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que cet arrêté n'a pas été précédé d'un examen complet de sa situation médicale ; que le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de santé publique et a ainsi entaché l'arrêté d'une erreur de droit ; que l'avis litigieux n'a pas donné au préfet les éléments, relatifs à la gravité de sa pathologie et à la nature des traitements qu'il doit suivre, nécessaires pour éclairer la décision de celui-ci ; que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cet arrêté méconnaît les dispositions du 7 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, il est entré en France au cours de l'année 2001, à l'âge de quinze ans ; que sa mère réside régulièrement en France et s'y trouve également depuis l'année 2001 ; qu'il est parfaitement intégré en France, du fait de ses études et de son emploi en contrat à durée indéterminée ; qu'en raison de son état de santé, il doit être assisté moralement et physiquement par sa mère ; que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et familiale ; qu'il doit être régularisé sur le fondement des dispositions de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007 ; qu'en effet il remplit les critères de la circulaire du 24 novembre 2009 ; que son admission au séjour, du fait de son état de santé et de sa situation familiale, répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels ; que l'arrêté est entaché d'un abus de droit et d'un excès de pouvoir ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2012 :

- le rapport de M. Tar, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Locatelli, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant camerounais né le 25 septembre 1985, fait appel du jugement du 8 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 janvier 2010 refusant de renouveler son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra être éloigné ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré en France au mois d'avril 2001 soit à l'âge de quinze ans, et y a séjourné régulièrement en qualité d'étranger malade, accompagné de sa mère, qui était titulaire d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " valable du 26 octobre 2007 au 25 octobre 2008 et dont il n'est pas contesté qu'elle résidait régulièrement en France à la date de l'arrêté attaqué ; que les pièces versées au dossier établissent que le requérant a poursuivi en France sa scolarité, malgré la gravité de son état de santé et les soins qui lui étaient dispensés, et qu'il est professionnellement inséré dans ce pays où il résidait depuis près de neuf ans à la date de l'arrêté en litige ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, et alors même que son père vit encore au Cameroun, l'arrêté attaqué doit être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été édicté ; qu'il a donc été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;

Considérant qu'eu égard au motif d'annulation énoncé ci-dessus et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'administration oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet délivre à M. A un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer ce titre à M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1001756 du 8 février 2011 du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 janvier 2010 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. A, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à M. A.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00916
Date de la décision : 16/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Prescription.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gabriel TAR
Rapporteur public ?: M. LOCATELLI
Avocat(s) : GASSOCH-DUJONCQUOY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-10-16;11ve00916 ?
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