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29/11/2012 | FRANCE | N°10VE03813

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 29 novembre 2012, 10VE03813


Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Me Béatrice A en qualité de mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de l'entreprise France Tuyauterie d'Europe, domiciliée ..., par Me Mouhou, avocat à la Cour ;

Me A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0510165 du 17 septembre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande de condamnation solidaire de la société Aéroports de Paris (ADP) et de la société Chauffage et Entretien (C et E) à lui verser

la somme de 130 000 euros au titre de travaux supplémentaires exécutés par l...

Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Me Béatrice A en qualité de mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de l'entreprise France Tuyauterie d'Europe, domiciliée ..., par Me Mouhou, avocat à la Cour ;

Me A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0510165 du 17 septembre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise rejetant sa demande de condamnation solidaire de la société Aéroports de Paris (ADP) et de la société Chauffage et Entretien (C et E) à lui verser la somme de 130 000 euros au titre de travaux supplémentaires exécutés par l'entreprise France Tuyauterie d'Europe ;

2°) de condamner solidairement la société Aéroports de Paris et la société Chauffage et Entretien au paiement de la somme de 130 000 euros précitée, ainsi qu'au paiement des frais d'expertise ;

3°) de mettre à la charge, solidairement, de la société Aéroports de Paris et de la société Chauffage et Entretien la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'exécution correcte du marché n'a été rendue possible que par la réalisation de travaux supplémentaires, lesquels ont été rendus nécessaires en raison de l'établissement de plans erronés par l'entreprise titulaire du marché ; que la société France Tuyauterie d'Europe (FTE) a passé 6 505 heures de plus pour exécuter ce marché par rapport à ce qui était initialement prévu ; que les travaux supplémentaires nécessaires à l'exécution du marché ont fait l'objet d'un avenant entre la société Aéroports de Paris (ADP) et la société C et E ; que ces travaux supplémentaires, évalués à la somme de 130 000 euros n'ont jamais fait l'objet d'un paiement alors que la société FTE a été admise au paiement direct ; que le tribunal administratif est compétent pour juger de la demande d'un sous-traitant à l'encontre du maître de l'ouvrage ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 octobre 2012 :

- le rapport de M. Pilven, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Courault , rapporteur public,

- et les observations de Me Geoffrion pour la société C et E ;

Considérant que, par un acte d'engagement signé le 24 juillet 2000, l'établissement public Aéroports de Paris (ADP), transformé par l'article 1er de la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports en une société anonyme, a confié le lot n° 4 " climatisation, plomberie et protection incendie " d'un marché de travaux publics ayant pour objet l'extension de l'aérogare T9 de l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, à la société Chauffage et Entretien (C et E) pour un montant global et forfaitaire de 2 669 364,05 euros TTC ; que la société C et E a sous-traité l'exécution des travaux de tuyauterie à l'entreprise France Tuyauterie d'Europe (FTE) dans les zones CBS, bureaux nord et sud et salle d'embarquement, par un contrat signé le 20 février 2001 pour un montant de 129 453,61 euros TTC ; que ce sous-traitant a fait l'objet d'un agrément par la société ADP au titre du paiement direct par un acte spécial du 3 avril 2001 ; que la société C et E a adressé à compter du mois de mai 2001 plusieurs courriers à la société FTE relatifs à des manquements de cette société à ses obligations contractuelles ainsi que trois mises en demeure de reprendre les travaux par lettres des 3, 4 et 5 octobre 2001 ; que la société FTE ayant été mise en liquidation judiciaire le 22 janvier 2002, la société C et E a eu recours à deux autres sociétés pour achever les travaux prévus et n'a autorisé le paiement direct à la société FTE qu'à hauteur de 95 839,06 euros TTC ; que, Me A, liquidateur judiciaire de la société FTE, a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, suite au rapport rendu le 15 juin 2005 par l'expert désigné par le président de ce tribunal, le paiement des travaux supplémentaires effectués sur le chantier pour un montant de 130 000 euros ; que Me A relève régulièrement appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 17 septembre 2010, qui a rejeté sa demande ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société C et E :

Considérant que la société FTE avait la qualité de sous-traitant vis-à-vis de la société C et E ; que les litiges opposant le titulaire d'un marché à son sous-traitant portent sur des contrats de droit privé et échappent à la compétence de la juridiction administrative, alors même qu'il s'agit de l'exécution d'un travail public ; que dès lors, et ainsi que l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, la juridiction administrative n'est pas compétente pour connaître des conclusions de Me A, mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société FTE, tendant au paiement d'une somme représentative de travaux supplémentaires en tant qu'elles sont dirigées contre la société C et E ; que, par voie de conséquence, Me A n'est pas davantage fondé à demander une condamnation solidaire à l'encontre de la société C et E et de la société ADP ;

Sur le bien-fondé des conclusions de la requête en tant qu'elles sont dirigées contre la société ADP :

Considérant qu'aux termes de l'article 275 du code des marchés publics, alors en vigueur : " les prix des prestations faisant l'objet d'un marché sont soit des prix unitaires appliqués aux quantités réellement livrées ou exécutées, soit des prix forfaitaires appliqués à tout ou partie du marché quelques soient les quantités. Les marchés sont conclus à prix initial définitif " ;

Considérant, en premier lieu, que Me A soutient que la société FTE aurait consacré 14 459 heures de travail pour exécuter les travaux prévus par le contrat de sous-traitance, soit 6 505 heures de plus que ce qui était prévu initialement et s'appuie sur le rapport déposé le 15 juin 2005 de l'expert judiciaire, désigné à sa demande par le tribunal administratif, lequel estime que ce surplus d'heures travaillées correspond à la mise en place d'une longueur de tuyaux plus importante que celle prévue initialement ; que, toutefois, l'indemnisation de la fourniture supplémentaire de matériaux est exclue par le caractère global et forfaitaire du prix du marché dès lors qu'aucune clause contractuelle ne prévoit une rémunération fondée sur un décompte horaire des travaux ; qu'il ressort en outre des constatations faites par l'expert que l'évaluation des heures de travail supplémentaires alléguées par la société FTE a varié, au cours des opérations d'expertise, de 950 a 6505 heures ;

Considérant, en second lieu, que si la requérante soutient que la société FTE aurait réalisé des prestations excédant la masse initiale prévue par le contrat de sous-traitance en raison des erreurs commises par le titulaire du marché dans l'établissement des plans des travaux, il ressort toutefois du rapport d'expertise que le chiffrage de la commande initiale de la société C et E à la société FTE s'avère incertain, que le détail des prestations commandées ne figure au dossier que sous une forme à la lisibilité limitée qui rend le document peu exploitable et que les différences alléguées ne sont pas quantifiées ; que si l'expert relève, d'une part, que la bonne foi de la société FTE ne semble pas devoir être mise en doute, et d'autre part, que l'approvisionnement du chantier en matériel aurait été sans cohérence, que les contraintes du travail auraient excédé les prévisions de la société FTE, qui n'aurait pas toujours bénéficié de plans au bon indice et que ces erreurs sont confirmées par cinq attestations établies par des salariés de la société FTE, ces éléments ne sont pas de nature par eux-mêmes et à eux-seuls à établir la réalité de l'augmentation de la masse des travaux alléguée ; que, par ailleurs, si la société C et E reconnaît avoir commis des erreurs de nature technique et financière ayant eu pour conséquence des retards dans l'exécution du chantier, il n'est pas contesté que les travaux supplémentaires en découlant ont donné lieu, pour un montant de 30 489,80 euros HT, à une commande supplémentaire à la société FTE, laquelle a émis un devis, en date du 12 juillet 2001, pour ces prestations qui sont distinctes des travaux supplémentaires en litige ;

Considérant, en troisième lieu, que si Me A soutient que les travaux supplémentaires demandés par la société ADP à la société C et E, et figurant dans le projet d'avenant n° 1 en date de novembre 2002, ont nécessairement eu pour conséquence la réalisation de travaux supplémentaires par les sociétés sous-traitantes, dont la société FTE, le rapport d'expertise estime que la société FTE n'a, sur ce point, pas produit les pièces demandées par l'expert ; que la corrélation entre ledit avenant et les travaux supplémentaires allégués n'est pas établie par les pièces produites au dossier ; qu'au surplus, il n'est pas contesté qu'à la date de la mise en liquidation judiciaire de la société FTE, celle-ci n'avait pas exécuté l'ensemble des prestations prévues par le marché de sous-traitance et que la société C et E s'est trouvée dans l'obligation d'avoir recours à deux autres sociétés pour terminer les travaux et qu'elle a, par suite, limité le droit au paiement direct de la société FTE à hauteur de la somme de 95 839,06 euros TTC ;

Considérant, enfin, qu'à supposer même que la société FTE a effectué les travaux supplémentaires allégués, Me A n'établit aucunement que ces travaux auraient eu un caractère indispensable et auraient été réalisés en exécution des prestations prévues par le contrat de sous-traitance du 20 février 2001 agréé au paiement direct par la société ADP, et non en exécution des prestations prévues par les autres contrats signés entre la société FTE et la société C et E en mars, juillet ou septembre 2001, lesquels n'ont pas fait l'objet d'un tel agrément ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Me A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant au paiement par la société ADP de la somme de 130 000 euros au titre de travaux supplémentaires que la société FTE aurait exécutées dans le cadre du chantier d'extension de l'aérogare T9 de l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle ;

Sur les frais d'expertise exposés en première instance :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R.761-1 du code de justice administrative : "Les dépens comprennent (...) les frais d'expertise (...). Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. " ; que la société ADP n'étant pas la partie perdante, les conclusions de Me A tendant à ce que les frais d'expertise soient mis à la charge de ladite société doivent être rejetées ;

Sur les conclusions d'appel en garantie de la société ADP :

Considérant que les conclusions tendant au paiement de la somme de 130 000 euros par la société ADP ont été rejetées ; que, par voie de conséquence, les conclusions d'appel en garantie formées par la société ADP à l'encontre de la société C et E sont sans objet et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge des sociétés ADP et C et E, qui ne sont pas parties perdantes à l'instance, la somme que Me A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Me A, mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de la société FTE, la somme de 2000 euros à verser à chacune des sociétés, ADP et C et E, au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Me A, mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de la société France Tuyauterie d'Europe (FTE), est rejetée.

Article 2 : Me A, mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire de la société FTE, versera une somme de 2 000 euros à chacune des sociétés, Aéroports de Paris (ADP) et Chauffage et Entretien (C et E), en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions à fin de garantie présentées par la société ADP sont rejetées.

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N° 10VE03813


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE03813
Date de la décision : 29/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : MOUHOU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-11-29;10ve03813 ?
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